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Distribution

Christophe Maurel, CNPA : "Le secteur automobile va avoir besoin d’un électrochoc"

Publié le 8 avril 2020

Par Catherine Leroy
4 min de lecture
Avec plus de 80 % de l’activité commerciale des distributeurs à l’arrêt, le secteur vit une période totalement inédite. Christophe Maurel, président des concessionnaires VP au sein du CNPA, fait le point.
Christophe Maurel, président des concessionnaires VP au sein du CNPA : "En moyenne, les distributeurs font appel aux prêts garantis par l’Etat à hauteur de 7 % de leur chiffre d’affaires."

 

Quel est le sentiment qui prévaut dans les réseaux de distribution, suite à l’arrêt du commerce et à l’épidémie de coronavirus ?

Je souhaite avant tout revenir sur le contexte de cette situation sanitaire de crise qui nous abasourdit tous. La France recense malheureusement plus de 10 000 décès en 20 jours, ce qui provoque une situation de tension et d’anxiété. Ce sentiment est partagé bien sûr par nos clients mais aussi par nos collaborateurs. L’ambiance est grave, tendue.

 

Comment les distributeurs automobiles s’organisent pour faire front à cette crise sanitaire qui met à plat l’activité économique du pays ?

Le premier point qui nous préoccupe est de savoir comment nous pouvons maintenir la population en sécurité. Et quand je parle de population, je pense aussi bien aux clients qu’aux salariés de nos groupes. Il s’agit d’une réelle discussion de fond : comment s’occuper de nos salariés, au-delà des gestes barrières qui s’imposent ? Nous allons devoir repenser les postes de travail, rendre obligatoire le port de masques... Nous sommes au-delà des préconisations mais notre sujet aujourd’hui est que tout le matériel n’est pas encore disponible pour que les chefs d’entreprise puissent s’organiser et répondre à ce besoin de sécurité.

 

Beaucoup de dirigeants étaient perplexes face au discours du gouvernement sur leur possibilité d’ouverture alors que les clients n’avaient pas le droit de circuler. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Nous sentons toujours ce malaise lié au double langage des pouvoirs publics. Comment gérer une possibilité de travail tout en étant confiné ? Les clients doivent rester chez eux et nous sommes dans l’incapacité de maintenir une activité face à des annulations en après-vente et bien sûr en livraison de véhicules neufs ou d’occasion. Certains de nos clients se sont même vu infliger des amendes en se rendant dans nos ateliers. La réalité est que nous parvenons tout juste à maintenir un léger flux de rendez-vous à l’après-vente même si la profession a pris le parti de rester ouvert a minima pour les métiers essentiels à la gestion de la crise sanitaire.

 

Cette contradiction a généré de nombreuses craintes sur la possibilité de faire appel au dispositif de chômage partiel. Les dernières annonces du gouvernement ont-elles rassuré les professionnels ?

Nous avons toujours des crispations sur ce sujet. D’autant que beaucoup d’entreprises ont connu des difficultés pour s’inscrire auprès de leur Direccte (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi). Le système n’était pas adapté et nous avons mis près de deux semaines avant de pouvoir accéder aux demandes en ligne. Certains codes d’entreprises étaient erronés. Une situation aussi exceptionnelle mérite des moyens exceptionnels également. Aujourd’hui, notre inquiétude se porte sur ce qui sera réellement pris en compte pour le chômage partiel.

 

Les mesures de report d’échéances fiscales ou de prêts garantis vous semblent-elles suffisantes ?

Ces décisions fonctionnent très bien et il faut les saluer. Le système bancaire, dans sa totalité, joue le jeu. En moyenne, les distributeurs font appel aux prêts garantis par l’Etat à hauteur de 7% de leur chiffre d’affaires. Nous allons constater des pertes abyssales mais notre première priorité est de sauver notre trésorerie, demander des mesures de chômage partiel, imposer une partie de congés payés et bien sûr assurer cet aspect social de la crise. Mais nous aurons aussi besoin de revoir nos contrats d’assurance, ce qui est prévu concrètement dans nos protections pertes d’exploitation. Ce sera un sujet à creuser également.

 

La profession réclame un plan de relance pour la consommation d’automobiles. Sous quelle forme pourrait-il être mis en place ?

Dans ce contexte, nous allons avoir besoin d’un électrochoc dans le secteur automobile. Nous nous sommes positionnés sur une nouvelle prime à la conversion dont l’objectif est de relancer la consommation avec des vertus environnementales et sociales et qui surtout viendrait en soutien du marché du véhicule d’occasion. Nous ne sommes pas dans une industrie qui est en bonne santé et les distributeurs ont, d’une manière vitale, besoin d’un soutien pour écouler les véhicules d’occasion dont nous disposons en stock et qui sont évalués à 500 000 unités en France en ce moment. La fluidité de nos trésoreries viendra des ventes de ces véhicules. Au 16 mars 2020, les distributeurs disposaient en moyenne de 2 à 2,5 mois de trésorerie, qui vont fondre très vite. Vendre nos VO nous permettra de mieux absorber le choc.

 

Comment jugez-vous la réaction et les plans mis en place par les marques automobiles vis-à-vis de leurs réseaux ?

Des mesures ont été prises très rapidement que ce soit pour les reports d’échéances, d’affacturage, le versement anticipé de primes dues. Mais maintenant, il faut que nos trésoreries tiennent bon et c’est pourquoi, nous ne pourrons accepter de nouvelles livraisons que si nous écoulons notre stock de véhicules d’occasion. Sinon, nous ne ferons que repousser les difficultés.

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