Mercato industriel entre ZF et TRW
C’est une annonce pour le moins étonnante, mais rétrospectivement pleine de sens. L’Américain TRW avait récemment reconnu avoir été approché par un acheteur, sans en préciser l’identité. L’indiscrétion est venue de Friedrichshafen, du siège même de celui qui projette de lancer une OPA, l’Allemand ZF, spécialisé dans les transmissions, notamment automobiles et poids lourds. TRW a alors admis qu’il “évaluait la proposition ainsi que d’autres possibilités susceptibles de créer de la valeur pour les actionnaires”.
Toutefois, pendant l’été, les choses se sont un peu compliquées. Les ambitions de ZF pourraient être conditionnées à sa sortie du capital de ZF Lenksystems, la join-venture qu’il co-détient avec Bosch, pour des raisons de concurrence. En effet, cette société a pour cœur d’activité le développement et la commercialisation de systèmes de directions automobiles, une part importante de l’activité de TRW ! ZF tente donc de parvenir à un accord avec Bosch sur la vente de sa participation dans la co-entreprise, fondée dans les années 2000 et enregistrant pas moins de 5,5 milliards d’euros de CA annuel. Mais la trêve estivale a considérablement ralenti les opérations, qui devraient maintenant reprendre rapidement, puisque le groupe allemand souhaite parvenir à un accord avec TRW durant le mois de septembre. Autre problème, des sources proches du dossier affirment que les discussions s’annoncent âpres, en raison d’une clause contractuelle dans la joint-venture, interdisant aux deux parties d’entrer en concurrence avec l’entreprise pendant une période de temps définie, en cas de sortie de la JV. Cela pourrait donc coûter cher de démanteler Lenksystems, et ZF aura besoin d’argent pour financer l’acquisition de TRW.
ZF évalue TRW entre 8,1 et 8,8 milliards d’euros, un chiffre largement sous-évalué pour les analystes, qui parlent plutôt de 12 milliards d’euros. Les négociations s’annoncent donc serrées, si le projet se maintient, car d’autres prétendants pourraient ainsi être amenés à se présenter, avec des offres plus alléchantes…
Synergies évidentes
Il faut dire que, depuis le début de l’année, le titre de TRW a bondi de près de 34 %. L’Américain, qui a réalisé un chiffre d’affaires de 13,24 milliards d’euros en 2013, est spécialisé dans les systèmes de sécurité active et les aides à la conduite (Adas), le freinage et les composants de trains roulants.
A ce titre, les synergies apparaissent évidentes avec ZF. Pour l’équipementier de Friedrichshafen, il s’agit d’ajouter les technologies de TRW (airbags, prétensionneurs, assistance à la conduite…), à un portefeuille déjà bien rempli, mais exempt de systèmes électroniques. Et ainsi pouvoir se battre à armes égales avec Schaeffler-Continental, et Bosch bien entendu.
Selon de nombreuses projections, le marché des technologies d’assistance au conducteur va croître de près de cinq fois d’ici 2020. Le sujet devient donc éminemment stratégique. Si l’opération se concrétise, elle donnera naissance au second équipementier automobile mondial, derrière Bosch, avec un CA de 40 milliards de dollars.
L’hypothétique rapprochement entre ZF et TRW arrive après de nombreuses initiatives semblables, au rang desquelles la reprise de Continental par Schaeffler. Par ailleurs, en juin dernier, le spécialiste de la filtration et des pistons Mahle s’est offert une participation majoritaire dans le capital de Letrika, un fabricant slovène de moteurs électriques et de systèmes d’entraînement électriques. Et les constructeurs ne sont pas en reste. Cette année, Volkswagen a acheté un centre de recherche dirigé par QNX Software (une unité de Blackberry), tandis que Daimler s’offrait un partenariat de choix avec Nokia. Mercedes a également étendu ses locaux à Sunnyvale, en Californie, pour développer des logiciels multimédia. De la connectivité en toute chose demain, vous dit-on…