La maison automobile brûle et le gouvernement ne répond pas
L'impatience gagne la filière automobile. Aucune information ne filtre sur les aides à l'achat de voitures électriques pour 2025. Et les rares confidences qui arrivent, donnent des sueurs froides aux professionnels. Notamment l'annonce discrète d'une baisse de l'enveloppe à 700 millions d'euros, soit à peine la moitié des aides versées en 2024.
"Cette annonce, au lendemain du Mondial de l'Auto 2024, sonne presque comme une provocation", s'indigne ce professionnel. Et pour cause, le défilé des ministres lors de cette édition du salon de l'automobile laissait espérer une prise en compte de la situation critique de la filière. "Le gouvernement essaie de montrer qu'il se préoccupe de nous, qu'il comprend que la situation est grave. Mais le jeu politique est illisible et l'attention n'est pas tournée vers la réalité", poursuit-il.
Des bonus réduits comme peau de chagrin
Dans ce budget contraint, d'environ 700 millions d'euros, seuls les dispositifs de bonus écologique et de leasing social seraient épargnés des coupes. Mais on est loin des aides massives et simples demandées par Luc Chatel, président de la Plateforme automobile (PFA). L'inquiétude est telle que ce dernier s'est fendu d'un courrier à Michel Barnier, Premier ministre. Dans la foulée de celui envoyé par Mobilians, syndicat qui soutient les services de l'automobile.
"Des informations contradictoires nourrissent depuis plusieurs semaines une instabilité défavorable à la projection des acteurs économiques et des consommateurs", regrette Xavier Horent, délégué général de Mobilians.
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Compte de la maigreur de l'enveloppe, les deux dispositifs seraient de toute façon conditionnés aux ressources des ménages français. Avec un plafonnement beaucoup plus strict que lors de l'opération 2024 du leasing social. "Mais comment convaincre des clients qui n'achètent jamais de voitures neuves, de s'engager sur un achat de voiture électrique neuve ?", se demande Marc Mortureux, directeur général de la PFA.
Pire, selon Mobilians, "des mesures telles que le leasing social mettent en péril les entreprises de la distribution automobile en imposant des engagements de reprises difficilement tenables à court terme", souligne Xavier Horent.
Quant à l'intégration du véhicule d'occasion dans ce leasing, là aussi, le secteur peut faire une croix sur une demande ardemment appuyée par le groupe Stellantis. Plaidé par Carlos Tavares lui-même auprès du président de la République, le soutien aux voitures d'occasion électriques est déjà relégué aux oubliettes.
Émissions de CO2 : le compte à rebours va commencer
Or, la baisse des aides va venir plomber un marché automobile déjà en souffrance. Depuis six mois déjà, les immatriculations sont en baisse. Et le volume de voitures mises à la route, depuis le début de l'année, dépasse à peine 1,4 million d'unités. Les professionnels l'assurent : au global sur l'année complète, le marché n'atteindra pas 1,7 million de voitures neuves, soit peu ou prou le même volume que pendant les années marquées par la crise sanitaire de la Covid-19.
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Cette conjoncture difficile survient alors que la filière automobile doit se préparer à un défi réglementaire majeur. À partir du 1er janvier 2025, soit dans sept semaines, les nouvelles normes CAFE (Corporate average fuel economy) d'émissions de CO2 entreront en vigueur. Ces normes imposent des seuils très stricts aux constructeurs automobiles, qui devront afficher une moyenne d'émissions de seulement 81 g/km de CO2 pour les voitures neuves commercialisées. Chaque gramme de CO2 excédentaire sera sanctionné par une amende sévère, fixée à 95 euros par gramme et par véhicule vendu.
Pour l'ensemble de la filière, le non-respect de ces exigences pourrait avoir des conséquences financières catastrophiques. Selon les prévisions, les amendes potentielles pourraient atteindre un total de 15 milliards d'euros si les constructeurs ne parviennent pas à baisser significativement leurs émissions.
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Face à ce compte à rebours, les constructeurs doivent intensifier leurs efforts pour commercialiser leurs gammes électriques. Toutefois, ces incertitudes autour des aides gouvernementales compliquent cette transition. La combinaison de la baisse des subventions et des nouvelles normes strictes de CO2 met l'industrie automobile sous une pression sans précédent.
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