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Industrie

Florent Menegaux, Michelin : "Les règles européennes rendent l’avenir de l’industrie impossible"

Publié le 21 octobre 2025

Par Catherine Leroy
3 min de lecture
Lors d'une rencontre organisée par la Plateforme automobile (PFA), les acteurs de la filière ont eu droit à un avertissement sans détour du président de Michelin. Florent Menegaux a livré un diagnostic sévère sur la compétitivité industrielle française et européenne, à l’heure où la concurrence asiatique s’impose comme une force de premier plan.
PFA Florent Menegaux
Lors d'une rencontre organisée par la Plateforme automobile (PFA), les acteurs de la filière ont eu droit à un avertissement sans détour de Florent Menegaux. ©Le Journal de l'Automobile

"Si on s’endort, on est mort !" D’une formule lapidaire, Florent Menegaux a résumé le climat d’urgence qui pèse sur l’industrie européenne. Invité d’un déjeuner organisé par la Plateforme automobile (PFA), le président de Michelin a livré un constat sans concession aux représentants de la filière automobile : entre la concurrence asiatique et des normes européennes jugées irréalistes, l’avenir de l’industrie française est en jeu.

 

Des règles climatiques déconnectées du réel

 

Selon Florent Menegaux, les acteurs asiatiques ne jouent plus seulement la carte des prix bas. "Aujourd’hui, nous faisons face à une concurrence de très haut niveau", a-t-il insisté. Michelin en sait quelque chose : "Nous avons perdu des parts de marché, des volumes de production et de vente, et les droits de douane ont créé un environnement international erratique", a rappelé son dirigeant. Un scénario que vivent désormais les constructeurs automobiles européens.

 

Florent Menegaux rejette la politique du "prix bas", qui enclenche selon lui une spirale dangereuse : "Elle entraîne une baisse des coûts, mais aussi une baisse des salaires." Or, sans gains réels de productivité, cette stratégie aboutit à des importations massives, une consommation artificiellement soutenue mais une destruction d’emplois. Le patron de Michelin défend au contraire une logique inverse : "Nous pensons qu’il faut rompre ce cercle et revaloriser les salaires."

 

 

Le président de Michelin reconnaît que les enjeux climatiques et le pouvoir d’achat sont fondamentaux. Mais il déplore un cadre réglementaire européen inapplicable : "Sans business model, la transition énergétique n’est pas possible." Parmi les exemples pointés : le report du règlement sur la déforestation, qui vise à interdire le caoutchouc ayant contribué à la dégradation des forêts alors que le manufacturier avait préparé chaque élément nécessaire à la traçabilité, ou encore la norme Euro 7, censée mesurer l’abrasion des pneus selon une méthodologie qui "ne reflète pas la réalité de l’usage".

 

La France, poids stratégique mais fragilisé

 

La France représente 8 % du chiffre d’affaires de Michelin, mais 16 % des impôts et 16 % des effectifs, avec 14 usines sur le territoire. Or, plus de la moitié sont sous-exploitées et 75 % de la production sont exportés. "Si je protège un outil qui n’est pas compétitif, j’accélère la dégradation", avertit Florent Menegaux, tout en assurant qu’il n’est pas question de fermetures. À Avallon dans l'Yonne, par exemple, l’usine de rechapage ne tourne qu’à 40 % de sa capacité, concurrencée par des pneus asiatiques neufs, moins chers que des enveloppes rechapées.

 

 

Enfin, le président de Michelin regrette la vision souvent caricaturale des métiers industriels. Pour lui, la clé réside dans une meilleure articulation entre les pouvoirs publics et les entreprises : "Les univers sont trop disjoints pour être efficaces et avoir une vision commune."

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