S'abonner
Distribution

Salon automobile d'Alger : Oasis de ferveur…

Publié le 1 avril 2005

Par David Paques
7 min de lecture
Loin d'être une caricature aux effluves exotiques, le Salon automobile d'Alger s'est tenu du 1er au 9 mars dernier pour la neuvième année consécutive. Plus de constructeurs, plus de visiteurs, le Salon est à l'image du marché algérien : il prend de l'ampleur et affirme ses prétentions. La manifestation...
Loin d'être une caricature aux effluves exotiques, le Salon automobile d'Alger s'est tenu du 1er au 9 mars dernier pour la neuvième année consécutive. Plus de constructeurs, plus de visiteurs, le Salon est à l'image du marché algérien : il prend de l'ampleur et affirme ses prétentions. La manifestation...

...s'internationalise et jouit désormais d'un succès qui attire les regards. Une réussite au goût épicé de l'engouement algérois. Même si quelques interrogations subsistent.


Sourire jusqu'aux oreilles, les enfants courent de stand en stand à travers les allées bondées du Salon. Des collections d'images sous les bras, ils suivent leurs parents qui multiplient, quant à eux, les clichés. Le Salon d'Alger est un rendez-vous familial, bon enfant. La ferveur y est telle que l'on y parle volontiers de foire, plus que de Salon. On en oublierait presque que c'est l'automobile la star du moment. C'est pourtant sur elle que se braquent les regards et que s'échangent les impressions. C'est aussi pour elle que les quelque 500 000 visiteurs se sont massés sous les tôles incertaines du Palais des Expositions pendant les huit jours du Salon. Les constructeurs eux, n'ont rien oublié. Et leur présence n'a rien d'un hasard. Pour cette neuvième édition, ils sont venus encore plus nombreux qu'à l'accoutumée : 113 exposants cette année. Et hormis les grandes marques sportives ou luxueuses, toutes étaient présentes. Des grandes filiales aux petits importateurs, elles sont là en nombre. Sur neuf jours de Salons, la fréquentation est d'importance. Il s'agit bien ici d'un rendez-vous populaire. Et c'est du reste pour cela que l'entrée est gratuite. Rien d'étonnant donc à voir la majorité des marques qui composent le marché se parer de leurs plus beaux atours. Peugeot expose sa 407 Silhouette qu'il ne vendra jamais et présente sa 1007, dont la commercialisation sur le marché algérien n'est pas à l'ordre du jour. Mais qu'importe. "C'est un Salon d'image", explique Mokhtar Mahdjoub, directeur de la communication Renault Algérie. Et la photographie est plutôt réussie. Du moins pour le public, car côté coulisses, les exposants grondent. L'organisation, assez obscure, n'est pas à la hauteur de leurs attentes. En effet, certaines voix s'élèvent pour protester contre l'autoritarisme dont persiste à faire preuve la Safex, organisateur de l'événement. Au centre des débats ? La périodicité. "L'idée d'organiser un Salon chaque année me paraît totalement inopportune", s'insurge Mohamed Bairy, P-dg d'IVAI, représentant exclusif des marques Iveco, Fiat et Mazda sur le territoire algérien. "Les concessionnaires ont plutôt intérêt à faire des ventes durant le Salon pour rentabiliser ce lourd investissement annuel", témoigne même Franck Ducreux, directeur commercial Hyundai Motor Algérie. Mais dans ces conditions, l'interrogation qui revient de manière récurrente est d'un autre ordre. Comment alimenter le Salon de nouveautés chaque année ? La question reste posée. Le résultat sur les stands est en tout cas révélateur. Les innovations ne sont, en effet, pas très nombreuses, mais de qualité. Au rayon des nouveautés justement : la nouvelle BMW Série 3 semble être une des attractions principales du Salon. La Golf Plus, la Kia Picanto, le Hyundai Tucson, la Citroën C4, le nouveau Pathfinder de Nissan ou encore l'Audi A3 Sportback font également partie de ce bien mince giron de modèles inédits. On en oublierait presque la Logan. Tellement de choses ont été dites sur elle que la "Dacia" est presque déjà entrée dans les mœurs. Pourtant, il s'agit bien d'une exclusivité. L'anti-star roumaine n'était pas à Paris en octobre dernier et n'est apparue à Genève que trois jours après Alger. Ici, le modèle destiné au marché local sera fabriqué à Pitesti, à 100 km de Bucarest en Roumanie. Et il débarquera au mois de mai prochain dans les concessions du réseau algérien. L'autre nouveauté de taille pour les filiales du groupe Renault : la SM3, née de la collaboration avec Samsung Motors. La franco-coréenne venait ici gonfler les rangs d'un stand Renault déjà bien fourni. Et là encore, sa présence dans un Salon était une première.

Le "prêt à partir" de Renault

En réalité, si les exclusivités n'abondent pas, c'est aussi la nature même du Salon qui l'explique. Le marché algérien n'est pas des plus porteurs pour les véhicules "très haute gamme". A Alger, les petites marques asiatiques font partie du spectacle. Ainsi, la Chery Kiou Kiou fait face à la Maruti Zen 1000. Les Geely côtoient les citadines de Citroën, de Hyundai, de Kia, de Ford et des autres. Bref, elles font partie du décor. Et les quelques rares modèles luxueux présentés, dont on sait pertinemment qu'ils ne dépasseront pas la centaine de ventes par an (comme la Ford Mondeo, l'Audi A6, la Subaru Legacy ou le XC90 de Volvo), sont là pour le show. Mais c'est précisément cela qui fait le charme du Salon. Tout est mêlé et le visiteur se régale. A Alger, les âmes qui s'égarent à travers les allées du Salon, le font avec délice. Jamais à l'abri d'un coup de cœur. C'est cette même atmosphère qui symbolise les habitudes de consommation de l'automobiliste algérien. "En Algérie, si vous avez du stock, vous vendez. Sinon, c'est très difficile", résume ainsi Mokhtar Mahdjoub. La disponibilité produit y est, en effet, un maître mot. Et cela explique, par exemple, le dispositif exceptionnel mis en place par Renault sur ce Salon. La marque au losange a, en effet, expérimenté ici une nouvelle méthode : le "prêt à partir". Au-delà des traditionnelles offres promotionnelles faites pendant toute la durée du Salon, le stand du constructeur français proposait à tous les clients désireux de faire l'acquisition d'un véhicule pendant le Salon, de les livrer dans la journée. L'initiative est originale, mais elle reflète surtout à merveille la passion qui anime l'Algérie pour l'automobile. Un autre exemple : celui de la Société Générale. Comme un signe fort de l'importance que prend le crédit dans le marché algérien, la société bancaire avait pris le parti, pour la seconde année consécutive, d'être présente au Salon. Et, nouvelle preuve de cet enthousiasme : la Société Générale étudie les dossiers de prêt en 24 heures. Quand l'automobiliste algérien souffre de fièvre acheteuse, mieux vaut assouvir son appétit avant que cela ne lui passe ! Ici, tout va très vite. Comme ce marché qui s'emballe depuis quelques mois. Comme cette presse spécialisée qui commence à voir le jour. Un nouvel organe d'information sur l'automobile avait ainsi choisi le Salon pour officialiser son lancement. Ce journal, autoalgérie.com, a même couvert l'événement en continu sur Internet. Résultat : au soir du 1er mars, jour d'ouverture du Salon, 23 000 pages avaient été lues sur le site !

Le Salon cherche sa voie

L'automobile est décidément une chose qui passionne le pays. Mais il serait candide et illusoire de résumer le Salon d'Alger à l'exaltation du peuple algérien pour la voiture. Car l'enthousiasme et la ferveur sont bien une affaire d'hommes. Les entreprises, elles, suivent le potentiel à exploiter. Il est dommage que la seule communication qui vaille sur le Salon soit celle envers le visiteur. Dommage que l'organisation laisse une marque, telle Chevrolet, leur faire faux bond au dernier moment. Dommage, tout simplement, que les errements de la Safex empêchent Alger d'avoir le Salon qu'elle mérite. Alger est une des capitales les plus importantes de l'Afrique du Nord. Le marché algérien est même considéré comme le plus volumineux d'Afrique après celui du Nigeria. Ce grand port de Méditerranée devrait pourtant avoir vocation à devenir un carrefour de l'automobile au Maghreb. Et au regard des chiffres de ventes qu'affichent les différents constructeurs, nul doute que cet objectif est réalisable. Le potentiel est là, l'accueil de la population l'est aussi. Mais pour l'heure, nous parlons encore de Salon international. Nous ne parlons pas de "Mondial" d'Alger, ni d'Africaine de l'auto. Malgré ce rythme annuel imposé aux exposants, la majorité des constructeurs continuent à être présents. Et resservent, chaque année, leur recette "exposition occidentale" assaisonnée à la mode locale. Une sorte de modèle européen transposé à l'Algérie. Car pour l'heure, c'est la passion des visiteurs qui confère son identité au Salon. Le Salon automobile d'Alger cherche sans doute encore sa voie.

David Paques

Vous devez activer le javacript et la gestion des cookies pour bénéficier de toutes les fonctionnalités.
Partager :

Sur le même sujet

cross-circle