Le groupe Sofipel sort de sa zone de confort
“Nous nous caractérisons par cette volonté farouche d’indépendance”, nous confiait, en 2011, Marc Pelleau, président du groupe Sofipel. Le décor était planté. L’adage qui stipule que “l’on n’est jamais si bien servi que par soi-même” caractérise à merveille la philosophie du groupe breton, qui a façonné ces vingt dernières années un maillage qui n’a pas vraiment d’équivalent en France. Spécialisé dans la vente de véhicules d’occasion via six enseignes complémentaires – Jacques Bervas, Premium by AutoStore, Kersaint Auto, Hyper Auto, Sélection Auto et Caréco Brest (seule petite “entorse” à l’indépendance farouche prônée par le dirigeant) –, le groupe, créé en 1993, est devenu l’acteur indépendant le plus important sur le marché de l’occasion avec 13 000 unités commercialisées en 2013, dont 70 % à particuliers. Un joli succès, qui repose sur la construction d’un réseau de points de vente cohérent sur toute la Bretagne, facilitant les synergies entre les six enseignes, répondant chacune à une cible de clientèle spécifique, mais également sur la maîtrise des coûts (logistique, transport, fournisseurs) ou encore la centralisation des achats. Très discret, le groupe a longtemps donné l’impression d’être refermé sur lui-même, comme pour mieux défendre son pré carré. “Nous aimons bien être maîtres chez nous”, confie Yannick Sevestre, directeur financier de la holding Sofipel. “Mais le groupe a évolué”, assure le dirigeant. Il s’est notamment ouvert.
Création d’un “pôle” automobile à Kersaint-Plabennec
Lorsque l’on siège à Brest, le développement ne peut se faire que dans un seul sens. Le groupe a donc d’abord repoussé les frontières départementales pour aller s’implanter dans les Côtes-d’Armor et le Morbihan, avant de parachever son quadrillage breton en ouvrant un quatrième point de vente Jacques Bervas à Rennes, en 2011. A l’époque, Marc Pelleau était déjà très clair : “Sur la Bretagne, hors Loire-Atlantique, pour nous, c’est fini.” La boucle était bouclée. Le groupe, qui tient à respecter une distance stratégique de 150 km entre chaque point de vente afin d’éviter toute cannibalisation, aurait pu en rester là, consolider ses positions, ou entrevoir des développements via ses autres enseignes. Pourquoi ne pas ouvrir un deuxième Premium By AutoStore, par exemple ? “Parce qu’il est plus difficile de dupliquer une enseigne comme Premium By AutoStore, qui nécessite de trouver un bon emplacement et d’y implanter un showroom important. Elle a atteint son rythme de croisière sur Brest, quatre ans après son ouverture”, répond Yannick Sevestre. En 2013, le groupe a bien saisi l’opportunité d’ouvrir une deuxième structure Hyper Auto à Kersaint-Plabennec (29), créant ainsi un petit “pôle” automobile sur l’axe Brest-Morlaix, mais le dirigeant assure qu’un tel projet ne verra pas le jour ailleurs. “Nous avons pu créer ce pôle suite au rachat des parts que possédait Laurent Henault, notre ancien associé à Kersaint Auto. Nous avons trouvé un accord avec lui afin qu’il quitte l’entreprise fin 2013 en raison de divergences flagrantes sur sa gestion économique et commerciale, en total désaccord avec la politique de notre groupe. Ce développement était aussi une réponse aux besoins des clients sur des produits à petits budgets. Mais il nous a fallu presque dix ans pour développer ce pôle automobile. Notre axe de bataille est de développer Jacques Bervas.”
Un site Jacques Bervas à Caen
Ainsi, le groupe Sofipel ouvrira prochainement une cinquième structure Jacques Bervas à Caen (14), la première en dehors des frontières bretonnes. “Nous avons trouvé un emplacement sur Caen et les négociations sont finalisées pour une ouverture courant juin 2014”, informe Yannick Sevestre. Une fois ce chantier finalisé, le groupe ne compte pas s’arrêter en si bon chemin et nourrit des velléités de conquête sur d’autres villes, en particulier sur Nantes, place forte du marché de l’occasion hexagonal, qu’il convoite depuis déjà quelques années. “Nous avons eu des propositions l’an passé, auxquelles nous n’avons pas donné suite car la période ne s’y prêtait pas. La base d’un tel développement est de trouver le foncier et la surface de stockage. Cela peut être à Nantes, mais aussi ailleurs”, précise le dirigeant. Cette expansion ne surprendra pas les concurrents locaux, elle couvait depuis un certain temps. En revanche, la prise du panneau Suzuki n’était pas franchement attendue.
Sofipel s’ouvre aux constructeurs
Depuis le printemps dernier, le groupe est distributeur et réparateur agréé Suzuki via son enseigne brestoise Auto Sélection, qui poursuit en parallèle son activité de vente de véhicules d’occasion. “Cela ne change pas fondamentalement notre philosophie, plutôt les méthodes de travail et l’organisation”, note Yannick Sevestre. Le responsable d’Auto Sélection, Christian Leroy, qui autrefois œuvrait au sein de réseaux de marques, a été moteur de ce rapprochement avec les dirigeants de Suzuki, marque qui était représentée auparavant par le groupe Schuller. Par le passé, la holding avait déjà représenté la marque Kia, une aventure qui avait très vite avorté. L’histoire ne semble pas se répéter puisque, de l’avis du directeur financier, les huit premiers mois d’activité sont satisfaisants. Au point de donner des idées au groupe. “Nous allons nous laisser le temps de faire nos preuves avec Suzuki et, au regard de cette très bonne première année d’exploitation, nous n’excluons pas d’ici deux ou trois ans de travailler avec d’autres marques. Nous ne sommes pas fermés au monde de la concession”, assure Yannick Sevestre. Principalement sollicité par des acteurs indépendants spécialisés dans le VO qui souhaitent revendre leurs affaires, le groupe avoue être consulté modérément par les constructeurs sur des dossiers de reprises d’affaires automobiles. “Nous avons eu par le passé des propositions de marques auxquelles nous n’avons pas donné suite pour des questions de structures. Mais elles se comptent sur les doigts d’une main, nous avons avant tout une image de professionnels du VO. Nous avons eu aussi des velléités de reprendre certaines marques, qui n’ont également pas abouti”, poursuit Yannick Sevestre. A l’heure où certains groupes de distribution rencontrent des difficultés, le profil du groupe breton pourrait séduire quelques constructeurs.
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FOCUS - Croissance de 10 % pour Jacques Bervas
L’enseigne Jacques Bervas, via ses quatre sites de Brest, Lorient, Rennes et Saint-Brieuc, a commercialisé un volume de 9 000 voitures d’occasion en 2013, soit une croissance de 10 % par rapport à 2012. Le site de Rennes, qui a ouvert ses portes en 2011, a représenté 3 000 unités l’an passé. “Sur une année complexe, nous nous sommes adaptés, n’hésitant pas à rogner sur nos marges pour conserver notre clientèle”, indique Patrice Hascoët, qui dirige le site d’Ille-et-Vilaine (35). L’enseigne, dont le mot “Discount” apparaît sur la façade des bâtiments, ne déroge pas à sa philosophie de départ : des achats en lots pour un positionnement prix agressif. “Nous essayons toujours d’être les mieux placés ou d’être parmi les mieux-disants en termes de prix. Pour cela, nous scrutons les tarifs affichés sur La Centrale, Le Bon Coin, chez les marchands et les concessionnaires locaux. En revanche, nous avons un prix affiché sur lequel il n’y a pas de discussions ou de négociations, ou alors à titre exceptionnel”, précise Patrice Hascoët. La société, qui relève une hausse du kilométrage des produits issus de la location longue durée depuis plusieurs semaines, reste axée sur les voitures de 1 à 5 ans, avec un kilométrage moyen de 70 000 à 100 000 km. Les produits âgés de plus de 5 ans sont alors revendus à des marchands spécialisés sur ce segment ou alors à la structure Hyper Auto de Guipavas (29), qui est spécialisée dans les produits plus âgés.
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