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Distribution

Groupe Jeannin : toujours soif de développement

Publié le 14 juin 2021

Par Christophe Bourgeois
9 min de lecture
Le groupe Jeannin, acteur historique des marques du groupe Volkswagen, n’a cessé de croître depuis sa création. L’entreprise couvre désormais trois départements (89, 77, 10), distribue neuf marques et a représenté, en 2020, près de 5 000 voitures neuves.
Le groupe Jeannin a livré 5 000 VN en 2020 grâce aux 9 marques qu'il représente.

 

L’histoire avait pourtant mal commencé. "Je ne sais pas si on peut en parler", avance Yves Jeannin dans son bureau à la concession Volkswagen à Auxerre (Yonne). Il hésite, sourit, puis finalement, se lance. Il y a prescription de toute façon. Nous sommes en 1985. Yves a 26 ans. Il travaille déjà depuis sept ans à l’après‑vente avec son père Bernard, au sein de la concession Volkswagen et Audi que ce dernier a monté en 1968, après avoir travaillé avec son propre père Lucien, en carrosserie.

 

Mais Bernard est malade et doit céder les rênes à son fils. Malheureusement, au‑delà de la maladie, pas dans de bonnes conditions. À cause d’une brouille avec l’un des collaborateurs de Bernard, la marque pousse les Jeannin à se séparer de leur affaire. Un coup dur dans une période difficile.

 

Conduits par VAG, les candidats défilent à Auxerre. Sans succès. Et à force de persévérance, de conviction et peut‑être d’un juste entêtement, il démontre qu’il est l’homme de la situation. Il réussit alors à conserver l’affaire familiale. "C’est le directeur financier de l’époque qui m’a sauvé la peau lorsqu’il a vu mes bilans", se souvient‑il. Trente‑six ans plus tard, le groupe Jeannin représente entre autres marques, nous y reviendrons, toujours Volkswagen, Volkswagen Véhicules Utilitaires, Audi, Seat et Skoda dans l’Yonne (89), mais aussi dans l’Aube (10) et en Seine‑et‑Marne (77) pour un volume total en 2020 de 5 000 VN à quelques unités près. Il figure dans le top 10 des distributeurs Skoda (6e place - 746 unités) et Seat (7e place - 623 unités).

 

Couvrir le département

 

Mais pour arriver à cette taille, les choses ne se sont pas faites simplement. Pendant plusieurs années, Yves est observé par le constructeur et sait qu’au moindre faux pas, son avenir dans la marque est compromis. Mais l’homme a de la ressource. Il tient bon, relève le défi et en 1991, après avoir construit un nouveau site, en face du garage historique, sur l’artère principale d’Auxerre, on lui propose de reprendre l’affaire de Sens (89), qui est à une heure de route. "Le contrat avait été résilié", se rappelle Yves Jeannin. Ce rachat ne faisait pas partie de ses plans initiaux, mais après avoir repris la petite agence d’Avallon, au sud du département, cinq ans auparavant, récupérer cette ville avait un sens ; cela lui permettait de couvrir tout le département de l’Yonne. C’est le premier pas vers la croissance externe qui ne cessera de le guider.

 

Le démarrage n’a pas été pour autant facile. "Il a fallu que je trouve un terrain et que j’embauche une toute nouvelle équipe", se souvient le distributeur. Surtout, il est confronté à une nouvelle clientèle. "Situé à un peu plus d’une centaine de kilomètres de Paris, Sens est naturellement tourné vers la région parisienne", explique‑t‑il.

 

Si le nom Jeannin veut dire quelque chose à Auxerre, c’est alors moins le cas dans cette sous‑préfecture où il faut l’imposer. Dès lors, le groupe Jeannin ne cessera de grandir. Les relations avec le constructeur sont revenues depuis longtemps au beau fixe. En 1996, son directeur de région lui propose de quitter son territoire pour s’installer en Île‑de‑France et reprendre les sites Volkswagen et Audi à Meaux et à Coulommiers (Seine‑et‑Marne). À l’époque, une belle affaire, car Meaux, au cœur de la Brie, est le centre d’une région agricole riche.

 

Malheureusement, les choix politiques ont fait que la situation économique et sociale de la ville s’est ensuite dégradée ; depuis le début des années 2010, la distribution automobile souffre énormément. "Tous les acteurs font du hors-zone pour survivre", souligne‑t‑il. C’est pourquoi, il a cédé Volkswagen, Volkswagen Véhicules Utilitaires et Audi, depuis le 1er janvier dernier, au groupe Gueudet à qui il avait acheté Seat à Melun et à Meaux (Seine‑et‑Marne) en 2018.

 

Passer à la vitesse supérieure

 

Mais revenons à la fin du XXe siècle. Yves Jeannin prend pour la première fois le dit panneau Seat à Auxerre et l’installe à Sens en 1999. Un an plus tard, suite à un dépôt de bilan, il quitte de nouveau l’Yonne pour s’établir cette fois‑ci dans l’Aube (10) en reprenant les quatre marques du groupe allemand, ce qui est pour lui une première en ce qui concerne Skoda. "Comme Auxerre, Troyes est une ville au milieu d’un département très rural, mais je changeais ici de dimension, car l’agglomération compte 130 000 habitants, quand celle d’Auxerre ne dépasse pas les 70 000" , avance ce fervent supporter du club de foot d’Auxerre, dont il est partenaire officiel. Pendant treize ans, il assimile toutes ses acquisitions.

 

 

Yves Jeannin, dirigeant du groupe Jeannin.

 

 

Mais en 2013, la fièvre de l’achat le reprend. Sur une opportunité. À Auxerre, son voisin, qui distribue Nissan, part à la retraite. Une occasion pour lui d’intégrer un autre réseau et de tenter une nouvelle aventure. Il déploie dès lors le panneau également à Sens, puis le distribuera par la suite à Fontainebleau (77). Deux ans plus tard, déjà distributeur de Skoda dans l’Aube, il lance la marque à Auxerre et à Sens, puis en 2018, à l’occasion du rachat de l’affaire SMDA, suite à un départ à la retraite, il étend sa présence chez le tchèque. L’acquisition de SMDA lui permet également d’intégrer le réseau Suzuki et Mazda, distribuant aussi cette dernière marque à Auxerre.

 

Enfin, en ce début d’année, Yves Jeannin a rejoint l’aventure MG Motor, ajoutant un point sur la carte pour le constructeur chinois. Comme beau‑ coup de distributeurs qui ont pris ce panneau, c’est une belle opportunité avec une certaine liberté, assez rare dans le monde automobile. "J’ai de la place chez Nissan, les charges sont réduites et les marges arrière confortables", souligne‑t‑il.

 

Croissance externe

 

À 62 ans, cette soif d’acquisition est‑elle en train de s’étancher ? "Pas vraiment, lâche‑t‑il dans un sourire discret. Il faut que je prépare ma succession". Il s’imagine bien passer les rênes d’ici une dizaine d’années. Si Yves a deux filles, âgées de 35 et 28 ans, c’est du côté des neveux de sa femme qu’il voit le futur. À 35 ans, Alban Charbonnier est directeur des ressources humaines du groupe et Pierre‑Henri Loury, 28 ans, directeur de plaque des marques du groupe Volkswagen. Car le groupe Jeannin est avant tout une affaire familiale, comme l’indique son nom sur les frontaux de ses concessions. En plus de sa femme, Sylvie, à la comptabilité de la holding, qui fêtera cette année ses cinquante ans d’existence, deux nièces travaillent au sein de la structure.

 

Pour se développer, il regarde avec insistance vers le nord‑ouest et l’Île‑de‑France. "D’un point de vue géographique, je n’ai pas trop le choix", observe‑t‑il. Au sud et à l’ouest, dans les départements très ruraux de la Nièvre et du Cher, les possibilités sont très limitées. Toujours à l’ouest, le Loiret se révèle beaucoup plus dynamique mais d’importants acteurs sont déjà bien implantés, sans compter que la communication entre ce département et l’Yonne n’a jamais été une réalité économique, le Loiret étant porté par la Loire. À l’est, la Côte‑d’Or est également bien occupée. Reste dès lors la région parisienne, où, fort du succès qu’il rencontre à Melun, il souhaite se développer.

 

"Dans cette région, le potentiel économique est exponentiel avec un développement de plus en plus grand des zones rurbaines, sans oublier l’important tissu économique", souligne‑t‑il. Pour autant, Yves Jeannin ne veut pas grossir à n’importe quel prix. Surtout, il souhaite rester proche de ses équipes et de ses clients. "Lorsque je donne une poignée de main à mes collaborateurs, je veux encore savoir si cela va ou pas", explique celui qui a commencé comme simple mécanicien dans le garage de son père.

 

Car il reste un homme de terrain tout comme le sont ses affaires. Il n’hésite pas, en effet, à sortir de la concession, lorsque bien entendu les mesures sanitaires le permettent, pour exposer dans les centres commerciaux ou faire les marchés, notamment dans l’Yonne, mais également en région parisienne. "C’est une excellente façon de toucher une clientèle qui n’aurait pas forcément pensé à vous", présente‑t‑il. Venant d’une petite ville comme Auxerre, il sait également ô combien la réputation du nom est importante. "Sur certaines marques, comme Audi notamment, le relationnel fait toute la différence", insiste‑t‑il. Outre la croissance externe, Yves Jeannin, qui a pour philosophie "une voiture neuve égale une voiture d'occasion", compte développer la partie occasion, sans pour autant s’appuyer sur une marque, comme le font aujourd’hui certains groupes de distribution. "Chez Volkswagen et encore plus chez Audi, le label VO a de l’importance, le panneau rassure, même si j’ai moins de liberté que si j’étais totalement indépendant", observe‑t‑il.

 

 

Le groupe Jeannin en quelques chiffres

Date de création : 1981

Nom de la société holding : AMSI

Distribution des marques : Volkswagen, Audi, Seat, Skoda, Volkswagen Véhicules Utilitaires, Mazda, Nissan, Suzuki, MG Motor

Volume des ventes : 4 965 VP (2020), 4 508 VOP

Lieux d’implantation :

Troyes (10) : Volkswagen, Audi, Seat, Skoda, Volkswagen Véhicules Utilitaires

Romilly‑sur‑Seine (10) : Volkswagen, Volkswagen Véhicules Utilitaires

Fontainebleau (77) : Nissan

Meaux (77) : Seat

Melun (77) : Skoda, Seat, Nissan, Suzuki, Mazda

Auxerre (89) : Volkswagen, Audi, Seat, Skoda, Volkswagen Véhicules Utilitaires, Mazda, Nissan, MG Motor

Avallon (89) : Volkswagen, Seat, Volkswagen Véhicules Utilitaires, Nissan

Sens (89) : Volkswagen, Seat, Skoda, Volkswagen Véhicules Utilitaires, Nissan

CA (2020) : 205 millions d’euros

Nombre de collaborateurs : 379

Dans notre top 100 des distributeurs paru en 2020 : le groupe Jeannin était en 62e place avec un CA de 228 millions d’euros (2019)


 

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