BMW Horizon se met en ligne
“Les distributeurs manquent d’innovation”. Tel était le constat que nous faisait Eric Le Gendre, expert du cabinet ICDP, il y a quelques semaines. Cette remarque, il la soulevait fort de ses nombreuses entrevues avec des concessionnaires, qu’il exhorte à devenir “acteurs” plutôt que “spectateurs” des changements sociétaux. Une invitation à transformer le modèle économique que BMW Horizon – propriété de Bernis Investissements – n’a pas attendu de recevoir pour prendre des initiatives. “Les comportements des consommateurs ont bien évolué et il est évident de voir qu’Internet joue un rôle majeur dans le parcours d’achat”, entame Alexandre Montfort, le directeur après-vente du groupe.
Il y a un peu plus d’un an, il a convaincu sa présidence de prendre la direction du commerce en ligne. Une révolution pour un distributeur BMW. Un projet qui s’imposait comme une nécessité pour ce groupe de trois concessions, à Courbevoie (92), Saint Gratien et Pontoise (95). Pour quelle raison ? Le bilan commercial s’achevait toujours sur un chiffre d’affaires jugé insatisfaisant au registre de la vente d’accessoires et de produits dérivés. Le rayon “Lifestyle” comme il se nomme au marketing du groupe bavarois. “L’après-vente contribue plus que n’importe quel autre poste dans le groupe Horizon, mais nous étions trop faibles au magasin”, confirme Alexandre Montfort. Avec 16,5 millions d’euros facturés en 2014, son poste concourrait à hauteur de 50 % de la marge du groupe, soit autant que le VN, le VO et le financement réunis.
100 000 euros par an
Pourtant, un point restait perfectible, le commerce de pièces et d’objets dérivés à l’effigie de BMW et Mini. Hormis les jantes, peu de sorties de caisse, laisse comprendre le responsable. Il a donc décidé de doter le groupe d’un nouvel outil de travail : le canal Internet. Une tâche qu’il a confiée à une agence extérieure, McFly, dont la mission a été de proposer une interface pour les consommateurs. En juin 2015, tour à tour, les offres BMW et Mini du groupe francilien se trouvent en ligne, sur les sites www.shop-bmw.fr et www.shop-mini.fr. Un projet sur lequel BMW Group France n’est intervenu qu’ultérieurement pour valider le respect de la charte graphique.
A y regarder de près, BMW aurait été mal avisé de freiner l’initiative. Rappelons que la maison munichoise ne propose rien dans ce domaine, à ses distributeurs, contrairement à Mercedes, par exemple, qui a lancé sa boutique virtuelle en 2012. Et les trois premiers mois d’activité du site donne raison à l’investisseur. En ne communiquant que sur sa base de 35 000 clients, les sites ont totalisé 65 000 visites en l’espace de trois mois. En majorité sur le site de BMW, s’étonne-t-on. Plus probant, dans ce même laps de temps, le chiffre d’affaires du canal Internet “a déjà rattrapé le montant annuel du canal physique”, fait-il savoir.
Impatient de nature, tel qu’il le confesse lui-même, Alexandre Montfort se dit toutefois un peu déçu. Il aimerait que les choses aillent plus vite. Que l’effet levier de croissance soit plus indiscutable. Il faudra patienter. “Nous visons un volume d’affaires de 100 000 euros à l’année”, glisse-t-il, acceptant de voir ce projet mûrir à son rythme.
80 % de taux de conquête
Il y a de bonnes surprises. Le panier moyen atteint 70 euros, soit un score honorable en phase de démarrage. D’après le dernier rapport de la Fevad (fédération de la vente à distance), la moyenne nationale s’établit à 81 euros, tous secteurs confondus. Mais surtout pour Horizon, 80 % des transformations s’avèrent être des personnes étrangères au portefeuille client. Un effet de conquête qui donne des idées de grandeur au groupe qui se voit bien dépasser les frontières. “Nous nous rendons compte qu’il existe une demande pour les produits dérivés, en particulier les vêtements, et que faute de place nous ne pouvions les exposer, analyse le directeur après-vente. Le peu de stock que nous avions n’impactait pas la trésorerie. Le problème relève davantage d’un manque à gagner évident que d’une perte”. A ceci, il faut ajouter la contrainte que les articles sont vendus par le magasin de pièces détachées, soit un poste de travail aux horaires d’ouvertures non favorables à la consommation. Ce qui fait l’objet d’un autre débat, soit dit en passant.
Le salon e-Commerce Paris et l’actualité de la Fevad nous ont encore récemment rappelé que toute démarche e-business requiert une logistique bien huilée. BMW Horizon n’a pas manqué à ses obligations. Le groupe a identifié les services de La Poste et de transporteurs pour couvrir ses besoins nationaux. Toute commande passée par un client génère une requête dans les réserves des concessions, cas échéant la centrale BMW-Mini est mise à contribution. Toute la marchandise transite forcément par un des points de vente, d’où le délai annoncé allant jusqu’à 10 jours. Une formule “web-to-store”, soit le retrait en concession, a également été imaginée pour les clients prêts à se déplacer. “Un bon moyen de provoquer le contact physique”. Toujours est-il que le système se heurte à la problématique des horaires d’ouverture du magasin. Tout du moins à Courbevoie, où les bâtiments sont distincts et distants de quelques centaines de mètres.
Dans un an, cela va s’améliorer. Les délais de livraison pourraient être raccourcis. Et pour cause, une nouvelle concession va ouvrir ses portes à Pontoise, en remplacement de l’actuelle, profitant d’un espace d’entreposage de la marchandise 50 % supérieur, soit 500 m2 (voir encadré). “Si je me livre à une vision idyllique, ce canal doit devenir un poste à part entière qui échappe à ma gouvernance pour avoir son propre responsable, se prend à imaginer l’instigateur du projet. Nous pourrions alors vendre d’autres biens, mais surtout des services”. A l’instar des contrats de service, l’après-vente regorge de solutions et références commercialisables. C’est en tous les cas avec un regard empreint de sincérité qu’il se dirait fier de voir ce “bébé” prendre son indépendance.
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FOCUS - BMW Horizon, l’incubateur
Le projet e-commerce a engendré un autre programme inédit en France au sein des murs de BMW Horizon, à Courbevoie. Pour la première fois en effet, une startup sera hébergée par un distributeur. Tout a commencé avec un appel d’offres du groupe qui a reçu plus d’une centaine de dossiers de candidature, en provenance de jeunes entrepreneurs focalisés sur le commerce digital, la gestion des données et les applications mobiles. Dix d’entre eux ont été sélectionnés et invités à soutenir leur projet. Le droit d’intégrer les murs le 5 octobre 2015 a été remporté par Data Thinks. La société garde son indépendance mais aura le groupe comme client prioritaire, notamment pour développer un système de recommandation d’articles.
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FOCUS - Bernis Academy ouvre ses portes
Ce concept interne se destine à former chacun des 135 collaborateurs des trois concessions du groupe à l’univers digital. Ainsi, personne ne restera étranger aux mutations de l’entreprise, tel l’e-commerce, par exemple. Outre des sessions classiques, les plus avertis auront pour mission d’accompagner leurs collègues, soit un moyen de resserrer la fracture numérique au sein des équipes.
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FOCUS - Pontoise va déménager
La concession BMW Horizon de Pontoise (95) profitera de nouvelles infrastructures dans un an environ. Sur un terrain d’un hectare, un bâtiment de 3 600 m2 va être construit. Il permettra d’étoffer l’offre VO, passant de 30 à plus de 70 modèles exposés. Le service après-vente gagnera également au change. Les capacités d’absorption des flux de clients devraient dépasser les 30 véhicules par jour, contre une vingtaine à ce jour. L’ancienne concession sera quant à elle vidée de toute activité BMW.