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Distribution

Airbags Takata : un distributeur réunionnais mis en examen

Publié le 25 juillet 2025

Par Jean-Baptiste Kapela
4 min de lecture
Dans le cadre d’un dossier lié aux airbags Takata, le distributeur Leal Réunion est mis en examen pour blessures involontaires. Il est suspecté de ne pas avoir procédé au rappel d'un véhicule qu'il a vendu et qui a causé l'accident grave d'un automobiliste en mai 2020.
Takata Airbag
Le 27 mars 2025, un juge d'instruction a mis en examen le distributeur Leal Réunion, qui conteste sa responsabilité dans un accident lié aux airbags Takata défectueux. ©AdobeStock-FellowNeko

Pour la première fois en France, une mise en examen pour blessures involontaires a été prononcée dans un dossier lié aux airbags Takata. Celle-ci concerne celle d'un distributeur automobile de l'île de La Réunion suspecté de n'avoir pas averti un automobiliste accidenté des risques qu'il encourait à rouler à bord d'un véhicule figurant sur la liste des rappels du constructeur. 

 

Selon une source proche du dossier à l'AFP, à Saint-Pierre de La Réunion, le 27 mars 2025, un juge d'instruction a mis en examen le distributeur Leal Réunion, qui conteste sa responsabilité, pour violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence ayant involontairement causé une incapacité totale de travail supérieure à trois mois.

 

Les enquêtes sont progressivement regroupées entre les mains de juges d'instruction parisiens. Les motifs des plaintes déposées sont pour la plupart : "soupçons de tromperie aggravée et de mise en danger de la vie d'autrui".

 

Jusque-là, aucune mise en examen n'avait été rendue publique. Depuis un nouveau rappel fin juin, en France, 1,7 million de véhicules sont visés par une interdiction de circuler jusqu'au remplacement du dispositif et 18 personnes seraient décédées à la suite d'un accident impliquant les airbags de l’équipementier japonais. 

 

"On a décidé d'attendre"

 

Dans le détail, Leal Réunion se voit reprocher de n'avoir "pas procédé au rappel ou au retrait d'une BMW 318i alors que l'airbag installé dedans présentait un défaut pouvant provoquer des blessures, voire la mort". Cette mise en cause est liée à un accident de la circulation ayant eu lieu le 6 mai 2020, au cours duquel un automobiliste, qui a porté plainte, a été victime de blessures graves, notamment au visage, causées par l'explosion du gaz de l'airbag et de projectiles.

 

Lors de son interrogatoire du 27 mars 2025, dont l'AFP a eu connaissance, un dirigeant de Leal Réunion, "circuit officiel" de vente de véhicules BMW sur l'île, a expliqué avoir progressivement tenté, à la suite d'une alerte du constructeur fin 2019 sur la dangerosité des airbags, d'avertir les détenteurs de voitures de cette marque.

 

Mais à l'époque, affirme Leal, la dangerosité n'était "pas clairement établie" et "les gens ne sont pas forcément d'accord pour bloquer leur véhicule [...] On a décidé d'attendre", ajoute le dirigeant, soulignant aussi à sa décharge que le confinement lié à l'épidémie de Covid-19 avait tout gelé au printemps 2020.

 

 

Le juge questionne : "L'automobiliste déclare qu'il n'a jamais reçu de courrier ni d'appel téléphonique de la part de Leal". "C'est vrai", répond le dirigeant. La vérité, c'est que je n'avais pas (ses) coordonnées". Leal a expliqué avoir récupéré en 2013 le circuit de distribution BMW d'un concurrent qui ne lui aurait pas transmis son fichier client, compliquant sa "tâche énorme" consistant à joindre des milliers d'automobilistes. Or, souligne Leal, le véhicule impliqué dans l'accident a été acheté en 2001 et a changé de main plusieurs fois.

 

Vers le statut de témoin assisté ?

 

Une expertise judiciaire tempère cette défense, estimant que Leal n'a réellement commencé à avertir des détenteurs de BMW qu'"à partir de juillet 2020, soit après l'accident".  Cette "inertie" aurait créé une "perte de chance pour le demandeur", d'après l'expert. "Il est facile de refaire le monde, nous avons fait tout notre possible", balaie le dirigeant, clamant ne "pas rester les bras croisés". D'après la source proche du dossier, la cour d'appel de Saint-Denis a été saisie le 22 juillet 2025 d'une demande de placement de Leal Réunion sous le statut plus favorable de témoin assisté.

 

 

Outre divers arguments procéduraux, Me Guillaume Martine, l'un des avocats de la société, "entend démontrer que Leal Réunion a mis en œuvre toutes les diligences possibles pour empêcher que ne surviennent des accidents, en tenant compte de la faible connaissance, à l'époque, de la dangerosité des airbags défectueux".

 

"Des entraves diverses qui existaient, y compris de la part de pouvoirs publics qui étaient alors nettement moins mobilisés qu'ils ne le sont aujourd'hui", a ajouté le conseil, alors que Leal Réunion affirme avoir sollicité en vain l'État pour avoir accès aux données du Système d'immatriculation des véhicules (SIV). (Avec AFP)

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