Tarik Yaou, Jeep : "Notre marque est la plus rentable de Stellantis"

Le Journal de l'Automobile : À fin octobre, Jeep a reculé de 14,7 % (8 244 immatriculations) après avoir connu une année 2024 exceptionnelle. Est-ce juste un trou d'air ?
Tarik Yaou : Nous nous attendions à ce que 2025 soit un peu moins bon que 2024. Mais je tiens à relativiser la situation. Si 2024 a en effet été la meilleure année récente de l'histoire de Jeep en France avec 11 790 immatriculations, 2025 sera, avec environ 10 000 voitures, la deuxième meilleure année.
Le recul de nos immatriculations s'explique par notre engagement plus faible dans le leasing social. L'année dernière, nous avions fait le choix d'être très présents avec l'Avenger, ce qui nous a permis de bénéficier d'une très forte visibilité. Nous avons effectivement écoulé 2 200 "leasing social".
Cette année, la part de cette offre sera moindre, environ 500 véhicules. Je note que si l'on retire le leasing social, nous sommes donc en progression. Il s'agit d'un beau résultat dans un contexte où le marché est négatif et où notre gamme est actuellement en transition.
J.A. : C'est-à-dire ?
T. Y. : Le Renegade est en fin de vie. Il n'est plus produit et nous ne travaillons qu'avec du stock. Et le Compass actuel vient tout juste d'être remplacé par la troisième génération.

Jeep vient de lancer la troisième génération du Compass. ©Jeep
J.A. : Ce qui signifie que vous n'aurez plus que deux modèles dans la gamme ?
T. Y. : Au premier semestre 2026, effectivement. La gamme sera constituée de l'Avenger et du Compass. Mais dans la deuxième moitié de l'année, deux autres modèles, tous électriques, viendront compléter l'offre : le Recon, qui reprendra l'esprit du Wrangler, mais en 100 % électrique, et le Wagoneer S, pour lequel nous ouvrirons les commandes au printemps prochain.
Nous estimons que les deux premiers produits, tous assemblés en Europe, à Tychy (Pologne) pour l'Avenger et Melfi (Italie) pour le Compass, représenteront 80 % des immatriculations en France, avec une part prédominante du Compass qui devrait couvrir la moitié de nos ventes.
Grâce à son image, Jeep est assez peu mis en concurrence
J.A. : Quelle est la répartition des canaux de ventes ?
T. Y. : Nous fonctionnons très bien auprès des particuliers. Grâce à son image, Jeep est assez peu mis en concurrence. Les clients viennent acheter une Jeep et hésitent avec très peu d'autres modèles. En outre, l'Avenger nous a permis de faire beaucoup de conquêtes. En revanche, les ventes aux entreprises sont LE sujet numéro un. Ce canal est actuellement trop faible. Le BtoB ne représente que 16 % de nos immatriculations. Jeep bénéficie d'une très bonne notoriété, mais nous ne sommes malheureusement pas dans la shopping list des entreprises, excepté auprès des professions libérales.
J.A. : Comment y remédier ?
T. Y. : Chez Jeep, notre réseau est très disparate. Il est constitué d'acteurs historiques, notamment ceux de la période Daimler-Chrysler, qui représentent environ 30 % du réseau, et ceux qui distribuent la gamme depuis plus récemment, lors de la constitution de Stellantis.
Dans cette cartographie, certains sont très dynamiques auprès des particuliers, mais n'ont pas forcément les compétences en interne pour aborder les entreprises. Alors que d'autres distributeurs, principalement issus de grands groupes, intègrent Jeep dans leur division BtoB.
Depuis cette année, nous travaillons activement pour que les différences entre les opérateurs, liées à notre histoire, s'effacent. Nous mettons en place des formations dédiées auprès de nos forces commerciales afin que chaque vendeur soit capable de proposer notre offre auprès des entreprises.
Nous avons pour ambition que les ventes aux entreprises grimpent à 25 % d'ici fin 2026
J.A. : Pour quelles ambitions sur le canal des entreprises ?
T. Y. : Notre gamme couvre toutes les technologies, de l'hybridation, y compris rechargeable, à l'électrique. Avec les moyens que nous mettons en place, nous avons pour ambition que les ventes à entreprise grimpent à 25 % d'ici fin 2026 et à 35 % en 2027.
J.A. : Jeep ne souffre-t-elle pas d'une image qui ne correspond plus aujourd'hui à sa gamme ?
T. Y. : Comme je vous l'ai dit, Jeep bénéficie d'une très belle notoriété. Mais dans l'esprit d'une partie de la population, la marque est liée à des motorisations qui ne sont pas adaptées au marché français. Nous devons alors prendre notre bâton de pèlerin pour faire connaître la gamme qui, je le répète, est désormais 100 % électrifiée et électrique. Et elle le sera encore plus l'année prochaine avec le Recon et le Wagoneer S. Notre offre est donc parfaitement adaptée pour répondre aux car policies des entreprises. Elle est d'ailleurs très large, car elle va de 24 000 euros avec l'Avenger jusqu'au Grand Cherokee à près de 100 000 euros.
J.A. : Vous appuyez-vous sur Stellantis pour promouvoir vos véhicules auprès des entreprises ?
T. Y. : Bien sûr. C'est une force de nous appuyer sur un acteur français majeur sur le marché national.
J.A. : Jeep Academy est un outil de promotion de la marque qui a toujours fonctionné par le passé. Est-ce encore le cas malgré le fait que certains modèles, comme le Wrangler, ne soient plus au catalogue ?
T. Y. : La Jeep Academy existe toujours et est plus dynamique que jamais. Jusqu'à présent réservée aux particuliers, nous l'avons désormais ouverte aux clients professionnels pour mettre en avant nos produits.

La Jeep Academy est un outil de promotion assez unique sur le marché français. ©Jeep Academy
J.A. : Comment se porte le réseau ?
Nous disposons d'un réseau de 140 concessions et d'une bonne couverture. Nous n'avons pas de zones blanches si ce n'est en région parisienne, principalement pour des questions immobilières.
J.A. : Le réseau gagne-t-il de l'argent ?
Jeep est très souvent intégré dans d'autres marques au sein du réseau. Mais si l'on extrait l'activité de Jeep, la rentabilité est positive (elle est d'ailleurs la plus élevée de toutes les marques Stellantis, NDLR).
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