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Constructeurs

Les petits secrets de Zoé

Publié le 30 octobre 2012

Par Alexandre Guillet
5 min de lecture
Avec Agneta Dahlgren, chef de projet design Zoé, plongée dans la genèse et les aléas du projet Zoé. Ou comment trouver l’alchimie entre tabula rasa et référentiel traditionnel.
Avec Agneta Dahlgren, chef de projet design Zoé, plongée dans la genèse et les aléas du projet Zoé. Ou comment trouver l’alchimie entre tabula rasa et référentiel traditionnel.

Lorsque le projet Zoé est lancé, Laurens Van Den Acker n’a pas encore pris les rênes du design de Renault. Pour autant, l’excitation est à son comble, dans le registre de l’ivresse de découvrir un territoire nouveau, vierge. “C’était un grand plaisir de commencer à travailler sur Zoé car, au début, nous avions des propositions très créatives et chaque designer avait l’impression qu’il devait réinventer l’automobile. Au départ, les orientations étaient donc très radicales”, se souvient Agneta Dahlgren. Cependant, une approche plus rationnelle a rapidement rattrapé la spontanéité débridée de l’élan initial : “Petit à petit, nous avons compris qu’il ne fallait pas aller plus vite que la musique. En effet, le client doit d’abord adopter le mode électrique, ce qui marque déjà une immense rupture, et il convient donc de ne pas trop le déstabiliser par le style. La notion de “vraie” voiture est importante. Ce ne doit pas être une voiturette, nous en avons trop vu, mais pas un ovni non plus. Nous avons choisi le thème design le plus fluide, mais qui portait aussi des valeurs de normalité et de robustesse.”

L’art du compromis

Dans le foisonnement des propositions, le concours de dessin ayant été ouvert à de nombreux designers, la notion de compromis qui, entendons-nous bien, n’est pas nécessairement négative, s’est donc imposée. “Nous avons essayé plein de choses, mais parmi les dominantes, on retrouve une source d’inspiration dans la nature. Nous avons là encore dû tempérer certains aspects. Par exemple, pour l’intérieur, nous avions beaucoup de pistes autour de galets, de jardins d’intérieur japonais. Mais, finalement, nous avons choisi le projet qui exploitait le mieux la notion des nouvelles énergies et de la tension électrique, dans une approche zen. La planche de bord renvoie par exemple à une pale d’éolienne, mais dans un traitement classique qui ne désoriente pas le client”, illustre Agneta Dahlgren.

Ne pas tomber dans la caricature du “tout bio”

On retrouve un mouvement similaire au niveau du choix des matériaux : “Certains designers privilégiaient les matériaux naturels, comme le bois ou le liège, mais il fallait éviter l’écueil du “tout bio” qui peut vite tourner à la caricature. Sans pour autant céder du terrain au niveau de l’efficacité environnementale – nous avons d’ailleurs fait le choix de la recyclabilité –, avec des matériaux plus classiques, mais dont la filière de recyclage est parfaitement maîtrisée. Zoé n’est pas l’écologie des années 70, c’est l’écologie prosaïque d’aujourd’hui tournée vers le futur.” Parfois, le compromis prit aussi un tour plus financier… “Nous étions très intéressés par le frein de parking de la Leaf, mais comme la voiture devait rester abordable, nous y avons renoncé”, reconnaît ainsi Agneta Dahlgren.

Les joies de l’architecture électrique

Pour le style extérieur, les choses ont finalement été plus simples et la fameuse liberté offerte par l’architecture électrique a pu être exploitée, comme le confirme Agneta Dahlgren : “En fait, nous avons plus bénéficié de l’architecture électrique que nous ne l’avons subie. Les batteries de Zoé se trouvant sous le plancher, entre les roues, cela nous dégage de la place. Nous avons donc pu optimiser la plate-forme de la Modus. Notamment en relevant la ligne de bandeau de la voiture et en inclinant les dévers, ce dernier point étant aussi dicté par les contraintes aérodynamiques. Au final, l’empattement étant plutôt long et les porte-à-faux plutôt courts, on n’a pas du tout le sentiment d’être sur une base de Modus.” Laurens Van Den Acker est alors arrivé, avec le temps nécessaire pour faire des arbitrages et poser son empreinte sur le projet : “La face avant s’inscrit ainsi dans le fil de la nouvelle identité de marque voulue par Laurens. C’est l’idée d’une grande bouche, avec des phares très effilés et un petit sourire par le jeu des diodes. De même, pour les feux arrière, nous nous sommes efforcés d’ôter au maximum la teinte rouge pour privilégier le bleu, afin de bien marquer la rupture avec les véhicules thermiques.” La dimension zen aura en somme dominé tout le projet, ce qui explique aussi le choix d’harmonies très claires dans l’habitacle, même si Agneta Dahlgren reconnaît que les équipes de style ont dû batailler ferme sur ce point.

Une invitation à penser différemment

L’heure est désormais à la commercialisation du modèle, ultime et seul juge de paix. Si le marché du VE tarde à prendre son envol, cela n’inquiète pas outre mesure Agneta Dahlgren : “Le décollage du marché du VE me fait penser à l’histoire de la poule et de l’œuf, entre les infrastructures et les véhicules… Mais je suis très confiante dans la réussite du modèle. Toute l’équipe est d’ailleurs très fière du travail accompli.” Et d’ajouter, d’un point de vue plus personnel : “Ce projet m’a apporté beaucoup. Ce type de projet vous ouvre de nouveaux horizons et, malgré les contraintes et les délais toujours serrés, cela vous invite à penser différemment, à ne pas utiliser vos vieilles recettes.” Un rafraîchissement qui lui sera sans doute aussi utile sur des projets plus classiques, Agneta Dahlgren travaillant désormais sur le renouvellement de la gamme M1, Mégane et Scénic.
 

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