"L’ambition est de rassembler 200 000 visiteurs, de satisfaire les constructeurs présents et de faire nourrir des regrets aux absents"
JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Par rapport à la richesse de vos expériences passées, pouvez-vous nous dire ce qui vous a motivé à vous investir dans la relance du salon de Lyon ?
Philippe Gurdjian. Tout d’abord, c’est un défi, un vrai défi ! Et j’ai toujours aimé les challenges difficiles, voire impossibles ! Matra, avec la Bagheera et l’Espace, les circuits, Magny Cours, Kuala Lumpur, Bahreïn en 90 jours, Abu Dhabi… Bref, la proposition me motive ! Elle m’amuse aussi car l’automobile reste une de mes grandes passions. Or, l’automobile change considérablement et à un rythme intense et, dès lors, il n’y a pas de raison pour que les salons n’évoluent pas. En revenant en arrière, il faut se souvenir du choc pétrolier de 1973 et de la décision qui suivit en 1976 d’organiser le salon de Paris tous les deux ans, pour des raisons économiques. Mais à l’époque, le temps de développement d’un modèle était beaucoup plus long qu’aujourd’hui et le nombre de modèles était bien moindre. Ce qui signifie bien que, pour le public qui veut suivre l’actualité des produits, il n’y a pas trop de salons. L’objectif est donc de faire du salon de Lyon le petit Genève que ce dernier fut à sa création, avec un positionnement similaire sur la qualité. Par ailleurs, nous allons porter un soin particulier au confort des visiteurs, avec des espaces détente, des animations et un grand dynamisme.
JA. Qu’entendez-vous par “dynamisme”, un mot un peu valise ?
PG. Au-delà de toutes les animations et expositions que nous proposons, le dynamisme tient principalement aux essais que pourront réaliser les visiteurs. Vous êtes sur un stand, vous regardez les modèles de tel ou tel constructeur et vous n’avez ensuite que quelques mètres à faire pour pouvoir essayer un véhicule. Il n’y a pas un salon européen qui propose actuellement cette prestation ! Le lieu le permet, c’est un acquis, mais encore faut-il savoir l’exploiter. Et cette année, vous aurez 190 véhicules disponibles à l’essai. Par ailleurs, vous pourrez aussi essayer des 4x4 sur une piste dédiée. Bref, j’y reviens, l’objectif est de faire évoluer l’idée même de salon et de dépasser l’ancien principe de podium-vitrine.
JA. L’intention est bonne, mais nous avons tous vu des salons allant dans le sens du dynamisme et pourtant, bien souvent, les visiteurs peinent à s’approprier ce qui leur est proposé. Comment éviter cet écueil ?
PG. Il faut que tout soit pratique et simple. Quand j’évoque un espace détente, je fais référence à quelque chose de très simple ! Sur la plupart des salons, si vous voulez tout simplement vous asseoir pour faire une pause, vous ne pouvez pas… Sauf sur un rebord ou dans une voiture d’exposition… A Lyon, vous aurez un espace digne de ce nom. Attention, je ne bombe pas le torse pour dire que tout sera parfait, mais nous faisons beaucoup d’efforts et, par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que nous préparons aussi l’édition 2013. Nous avons mis beaucoup d’ingrédients dans un récipient et une réaction chimique va se produire. C’est ça le dynamisme de Lyon. Nous avons monté en gamme le salon à tous les niveaux et je pense que nous pouvons étonner.
JA. Pour assurer l’alternance avec le Mondial de Paris, Lyon est-elle la ville idoine ?
PG. C’est tout de même la seconde ville de France et elle occupe une place très centrale en Europe, ce n’est pas rien ! En outre, Lyon a été le berceau de l’automobile, même si peu de gens le savent. Nous avons une opportunité à saisir car cela nous permet de montrer des voitures anciennes et de raconter une histoire. La rétrospective organisée avec la Fondation Marius Berliet et le Musée Malartre en est un parfait exemple. Pour l’anecdote, on peut citer la STELA, un véhicule de 1942 qui pèse deux tonnes, dont une tonne de batteries ! Et il fait valoir à peu près la même autonomie que les modèles électriques contemporains.
JA. Avez-vous rencontré une grande réticence des constructeurs par rapport à la relance du salon de Lyon ?
PG. Je crois que le comité stratégique que nous avons mis en place nous a donné de la crédibilité car il est composé d’hommes qui ont connu de grandes réussites dans le monde de l’automobile. Par ailleurs, la plupart de gens me connaissent et GL Events est un partenaire établi avec des références irréprochables. Ensuite, nos propositions, volontairement dynamiques, ont séduit nos interlocuteurs. A l’issue de nos réunions de travail avec les constructeurs, les retours étaient positifs. Je ne cherche pas à dire que tout a été aisé, mais au final, selon le principe additif du 1+1+1+1…, nous couvrons 80 % du marché.
JA. Néanmoins, comment expliquez-vous l’absence de certains constructeurs de premier ordre ?
PG. Honnêtement, je ne comprends pas la position des absents… En tout état de cause, que ces constructeurs ne viennent pas se plaindre qu’ils ont des difficultés à vendre leurs voitures. Je ne vois pas comment ils vont pouvoir justifier leur absence vis-à-vis de leurs réseaux, au local… Surtout que nous avons fait des efforts significatifs de promotion du salon, avec un budget de plus d’un million d’euros investi. Le salon s’est aussi fixé pour mission de soutenir le marché automobile, et nous ne le faisons pas à l’économie ou en nous cachant derrière la conjoncture. Dès lors, il est difficile de comprendre pourquoi des acteurs de ce marché ne jouent pas le jeu. Mais je ne veux pas m’étendre sur les absents, ils ont toujours tort, c’est bien connu…
JA. Vous évoquez la conjoncture, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle se révèle difficile et incertaine… Pas idéal pour relancer un événement, n’est-ce pas ?
PG. Comme je le disais à l’instant, notre ambition est aussi de soutenir le marché de l’automobile, actuellement en difficulté. Dès lors, il y a deux possibilités : soit on est attentiste et on se contente de critiquer, position répandue mais stérile, soit on se retrousse les manches, on essaie de faire des choses, on se projette vers l’avenir. C’est notre attitude. Par ailleurs, il faut redonner de la joie à l’automobile ! Regardez les couleurs des voitures, noir, gris, gris, noir, c’est triste… Il faut oser des couleurs un peu sexy, j’aime bien le mot. Il faut recréer le désir automobile et l’assumer. Le salon peut y participer, les années impaires, c’est une conviction.
JA. Le salon de Lyon était notamment réputé pour être un “salon de ventes”, comment conserver cette précieuse spécificité ?
PG. Je crois que le fait de proposer des essais de modèles va permettre de conserver cette spécificité. Sur un salon statique, vous venez avant tout voir, avant d’aller ensuite, éventuellement, en concession. Avec l’essai dynamique du véhicule, la donne est modifiée. Car vous pouvez toujours acheter votre voiture dans la foulée, sur le Salon. Toutefois, la conjoncture économique étant ce qu’elle est, je ne prétends pas que les choses seront simples…
JA. Comment pérenniser le salon de Lyon dans le temps ?
PG. L’idée est vraiment d’être l’alternance de référence du Mondial de Paris. Le comité stratégique s’inscrit dans une démarche à long terme et, dès l’issue de cette édition, nous analyserons ce qui a fonctionné et ce qui est perfectible, afin de repartir de plus belle pour 2013. Nous allons aussi jouer la carte de la créativité et je pense que les constructeurs sont sensibles à ce discours. En effet, quels sont les constructeurs qui seront les gagnants de demain ? Ce seront les constructeurs créatifs, capables de faire rêver les gens et de ne pas se murer exclusivement dans le rationnel.
JA. Certaines expositions que vous proposez et le corner supercars participent-ils délibérément de cette démarche ?
PG. Oui. L’automobile reste un produit sensuel, avec le plaisir de voir, de toucher. Même si la sécurité est une priorité et qu’on peut développer les assistances à la conduite, même si l’environnement est un enjeu de premier ordre, le plaisir doit rester central. Regardez le succès des supercars auprès du grand public ! Qu’on ne vienne pas me dire que le plaisir et le rêve automobiles n’existent plus ! D’où notre parti pris de mettre en valeur les supercars et de décliner des expositions d’exception autour des 50 ans des voitures du Mans, avec des Matra, Bentley, Audi, etc., des 50 ans du Club Porsche, des 50 ans de la 4L, le 3e succès mondial derrière la Ford T et la Coccinelle, ne l’oublions pas. Dans le même temps, nous avons aussi mis en place l’espace Electric City pour une projection vers l’avenir et une appréhension concrète des offres d’ores et déjà disponibles, comme l’Ampera et la Fluence Z.E. par exemple. Une approche à la fois prospective et concrète, Eurexpo travaillant d’ailleurs actuellement à la mise en œuvre de 100 places pour VE dans le parking.
JA. Comment distinguer Electric City de tous les autres événements liés au véhicule électrique et aux énergies alternatives en général, et comment éviter l’écueil du “un de plus” ?
PG. Nous avons décidé d’opter pour un espace d’exposition dédié à ces véhicules afin de les mettre en valeur et d’aider les constructeurs à mieux démontrer leurs avancées. Nous connaissons tous les difficultés que rencontrent encore ces véhicules, principalement au niveau des batteries et du contrôle de la masse, mais il y a une offre disponible qu’il faut montrer dans sa dimension bien réelle. C’est un monde en développement. Cela fait partie de l’avenir de l’automobile.
Pendant très longtemps, j’avais coutume de dire : “Quel est le seul élément dans un véhicule qui n’a pas fait de progrès depuis un siècle ?” Réponse, la batterie. Pour de nombreuses raisons, et pas uniquement technologiques. Aujourd’hui, les choses évoluent, rapidement.
JA. Quelle est votre perception du “plaisir électrique” et du changement de paradigme que de nombreux experts évoquent sans relâche ?
PG. Il y a plusieurs plaisirs automobiles et plusieurs paradigmes. Il ne faut pas sombrer dans une vision monolithique et uniforme du monde automobile. Rouler dans le silence en ville me paraît très pertinent. Mais écouter le bruit d’un huit cylindres n’est pas non plus désagréable ! Nous devons aussi prendre en compte la variété des environnements. Je pense que l’automobile reste un moyen de transport individuel et une passion individuelle. Cela ne signifie pas non plus qu’il ne faut pas prendre en compte les nouveaux défis qui nous sont proposés. Je pense que nous allons devenir plus rationnels, mais on ne change pas le monde en un jour… Et une nouvelle fois, le plaisir et le rêve demeureront primordiaux, même si la notion de véhicule et de déplacement évoluera.
J’insiste aussi volontiers sur le fait qu’il ne faut pas oublier tous les progrès accomplis par l’automobile. Il y a vingt ans, en cas de choc frontal, le moteur était sur les genoux des passagers avant. Aujourd’hui, rien ne bouge. C’est l’exemple type du progrès qui ne se voit pas, mais qui n’en est pas moins essentiel.
JA. Pour conclure, par quels relais numériques et liés aux réseaux sociaux prolongez-vous le salon cette année ?
PG. Nous avons fait certaines choses, le site internet salonautolyon.com, une page Facebook, nous nous lançons sur Twitter, et nous avons développé une application iPhone et Android. Mais nous n’avons pas eu le temps de faire tout ce que nous souhaitions. Des supports d’accompagnement existent donc, mais le dispositif sera bien plus avancé pour l’édition 2013.
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Zoom preview lyonnais
BMW : Série 1, M5, coupé Série 6
CHEVROLET : Aveo Diesel, Cruze 5 p, Camaro
CITROËN : DS5, concept GQ
DELLAVILLA : R1
HONDA : Civic
HYUNDAI : i40 SW, Santa Fé 2012, ix20 1.6 CRDI 115, Veloster
KIA : Picanto 3 p, Rio, Soul restylée
McLAREN : MP4-12 C
MERCEDES-BENZ : Classe B, Classe M, SLS AMG roadster, Concept Classe A
MINI : Coupé
OPEL : Ampera, Astra GTC, Zafira Tourer
RENAULT : Twingo restylée, concept Frendzy, Koleos restylé
SEAT : Exeo restylée
SKODA : concept Fabia RS2000, concept MissionL
SUBARU : XV
SUZUKI : Swift sport
TOYOTA : Yaris
VOLKSWAGEN : Golf cabriolet, nouveau Tiguan, new Beetle, UP
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Portrait chinois de Philippe Gurdjian
Si vous étiez un pays ?
Venise…
Si vous étiez un plat cuisiné ?
Un pot-au-feu.
Si vous étiez une musique à écouter le matin ?
Johnny Hallyday, “Pour moi la vie va commencer”.
Si vous étiez une musique à écouter le soir ?
James Brown.
Si vous étiez un véhicule du passé ?
La Ferrari 250 GTO.
Si vous étiez une voiture contemporaine ?
Elle n’existe pas…
Si vous étiez une voiture de course mythique ?
La Porsche 917 “longue queue”.
Si vous étiez un arbre ?
Un cyprès, parce c’est un arbre qui cherche à toucher le ciel !
Si vous étiez un objet, un bel objet ou un objet qui vous fascine ?
La boule, c’est parfait.
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