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La détention de Carlos Ghosn au Japon jugée arbitraire

Publié le 24 novembre 2020

Par Christophe Jaussaud
4 min de lecture
Un groupe de travail de l'ONU a jugé arbitraire la détention de Carlos Ghosn au Japon. Leur rapport pointe notamment une violation de la Déclaration universelle des droits de l'Homme. Le gouvernement local estime cet avis "totalement inacceptable" et sans portée juridique.
Un groupe de travail de l'ONU a jugé, le 20 novembre 2020, que la privation de liberté de Carlos Ghosn au Japon était arbitraire.

 

L'affaire Ghosn n'a pas fini de faire du bruit. Ainsi, le 20 novembre 2020, plus de deux ans après l'arrestation du dirigeant au Japon, un groupe de travail de l'ONU a jugé, dans un rapport, que la "privation de liberté" de Carlos Ghosn au Japon était "arbitraire" ouvrant, selon ce groupe, un droit à indemnisation. C'est un tableau accablant que dressent ces experts indépendants, qui dépendent du Conseil des droits de l'Homme mais ne s'expriment pas au nom des Nations unies. Le gouvernement japonais a jugé cet avis "totalement inacceptable" et souligné qu'il "n'est "pas juridiquement contraignant".

 

Dans ce rapport, les experts concluent que "le processus d'arrestation et de détention de Carlos Ghosn à quatre reprises était fondamentalement inéquitable, car il l'a empêché de retrouver sa liberté et de bénéficier des autres droits à un procès équitable, notamment celui de communiquer librement avec un avocat". Et d'ajouter : les "violations du droit à un procès équitable étaient d'une telle gravité qu'elles ont conféré à la détention de M. Ghosn un caractère arbitraire". En outre, soulignent-ils, "M. Ghosn a été détenu dans des conditions de nature à le contraindre à faire des déclarations le mettant en cause, ceci en violation de son droit à la présomption d'innocence".

 

Les experts de l'ONU soulignent que leur avis ne porte pas sur les accusations portées à l'encontre du dirigeant au Japon, mais sur les conditions dans lesquelles la procédure a été menée. A cet égard, le groupe de travail de l'ONU est d'avis que "la privation de liberté de Carlos Ghosn du 19 novembre 2018 au 5 mars 2019 et du 4 au 25 avril 2019, en violation des articles 9, 10 et 11 de la Déclaration universelle des droits de l'Homme et des articles 9, 10 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, était arbitraire".

 

Il note notamment que les conditions de mise en liberté sous caution imposées à Carlos Ghosn "semblent avoir été exceptionnellement strictes, en particulier l'interdiction, pendant la deuxième période de mise en liberté sous caution, de tout contact avec son épouse, autrement que par l'intermédiaire de ses avocats, sans autorisation préalable du tribunal et pour une durée indéterminée". "Compte tenu de toutes les circonstances de l'affaire, la réparation appropriée serait d'accorder à M. Ghosn un droit exécutoire à une indemnisation et à d'autres réparations, conformément au droit international", considère-t-il.

 

Pour les avocats de Carlos Ghosn, François Zimeray et Jessica Finelle, cet avis "est une décision courageuse qui constitue un tournant décisif", et qui "établit irréfutablement ce que nous avions dénoncé dès l'arrestation de M. Ghosn : une détention arbitraire, un déni de son droit à une justice impartiale, des traitements indignes et dégradants". Le Groupe de travail exhorte le gouvernement japonais à garantir "une enquête complète et indépendante sur les circonstances entourant la détention arbitraire de M. Ghosn, et à prendre des mesures appropriées contre les responsables de la violation de ses droits". Les experts, qui ont travaillé sur des éléments fournis par une "source" dont le nom n'est pas donné, demandent à cette dernière et au gouvernement japonais de leur fournir des informations sur les mesures prises, notamment en matière de réparation, dans un délai de six mois.

 

L'ex-patron du numéro un mondial de l'automobile Renault-Nissan-Mitsubishi Motors avait été arrêté le 19 novembre 2018 à son atterrissage à Tokyo, soupçonné d'avoir omis de déclarer une grande partie de ses revenus aux autorités boursières entre 2010 et 2015. Le 5 mars 2019, un juge japonais acceptait sa libération sous caution, avec interdiction de quitter le Japon, mais quelques semaines après, le 4 avril, il était de nouveau arrêté, accusé d'avoir utilisé 5 millions de dollars pour son bénéfice personnel avant d'être libéré sous caution le 25 avril. Carlos Ghosn, qui nie ces accusations, était arrivé le 30 décembre à Beyrouth au terme d'une fuite rocambolesque du Japon, qu'il est soupçonné d'avoir quitté caché dans un caisson de matériel audio. (avec AFP)


 

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