La Chine sur courant encore alternatif

Quand le gouvernement de Pékin émet un desideratum, la formule “vos désirs sont des ordres” prend tout son sens. Après que Pékin ait eu réaffirmé, à la veille du Salon de Guangzhou, sa volonté de voir l’introduction significative de véhicules alternatifs, notamment électriques, sur son marché entre 2015 et 2020, les constructeurs se sont donc engagés dans une course aux effets d’annonce. Le JV Shenzhen BYD Daimler New Technology Company a ainsi confirmé qu’un véhicule électrique serait produit et commercialisé dès 2013. Ce modèle sera vendu sous une nouvelle marque qui sera dévoilée en 2012 lors du Salon de Pékin. A peu près au même horizon, en l’occurrence fin 2013, le groupe Volkswagen a annoncé le lancement de modèles électriques, via ses deux JV avec SAIC et China FAW Group Corp. Karl-Thomas Neumann, responsable de l’électro-mobilité au sein du groupe, table sur “un volume de 10 000 VE d’ici 2018”, tout en appelant les autorités locales à “donner une feuille de route claire pour ces véhicules”, notamment au niveau des aides et des incitations à l’achat.

Pour célébrer la naissance de la marque Shouwang, Hyundai et BAIC ont dévoilé un concept-car électrique

Par ailleurs, le JV entre Hyundai et BAIC a dévoilé à Guangzhou sa nouvelle marque pour le marché chinois, baptisée Shouwang. Le premier modèle présenté n’est autre qu’un concept-car électrique, le BHCD-1, même si aucune date de commercialisation n’a été validée. De son côté, Freeman Shen, directeur de Volvo Cars Chine, a annoncé son intention de lancer la C30 électrique en Chine. Si elle est d’ores et déjà en phase de test à Shanghai, le dirigeant ne s’est pas engagé sur une date de lancement officiel, réclamant lui aussi plus de “précisions sur les aides d’Etat pour aller plus avant”. Enfin, GM a rendu public le prix de la Volt. Un prix fixé à 57 000 euros qui rend le modèle inaccessible à l’immense majorité des clients potentiels, même avec des aides à l’achat substantielles. Le président de GM Chine, Kevin Wale, table par conséquent sur “des volumes confidentiels”.

Vers un report des plans de production de VE actuellement annoncés

Si l’effervescence électrique était donc manifeste au Salon de Guangzhou, plusieurs analystes ne cachent pas leur scepticisme face aux effets d’annonce. En premier lieu parce que la demande n’existe pas encore sur le marché. Il y a un hiatus entre les objectifs du gouvernement chinois et la demande du marché, qui refuse d’adopter des modèles moins compétitifs que les modèles thermiques, notamment sous l’angle des tarifs et de l’autonomie. “Les constructeurs font des efforts, diplomatie oblige, pour montrer au gouvernement qu’ils peuvent suivre, mais la réalité du marché ne va pas encore dans ce sens”, explique Lin Huaibin, chez IHS Automotive Chine, avant de poursuivre : “Par exemple, on peut penser que la nouvelle marque Shouwang ne lancera pas un premier modèle électrique en sachant pertinemment qu’il sera très dur à vendre. Les dirigeants opteront sans doute pour la sécurité avec un véhicule thermique, voire, au mieux, un hybride”. Et Boni Sa, analyste production chez IHS, de renchérir : “Les dispositifs d’aides sont actuellement inefficaces pour orienter la clientèle vers les véhicules électriques. Dans un premier temps, on verra beaucoup de concept-cars et de tests-pilotes, mais peu de série. Dès lors, il y a fort à parier que beaucoup de plans de production de VE actuellement mis en avant par les constructeurs seront en fait reportés”.