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Constructeurs

Kia : des grêles qui font pschitt…

Publié le 29 janvier 2010

Par David Paques
6 min de lecture
Lundi dernier, Michel Falvo, distributeur Kia à Roncq (59), était l'invité de notre confrère Pierre Mercier, sur son émission de 7PMTV, pour dénoncer l'attitude "criminelle" de son concédant pour ne pas, selon lui, avoir informé...
...le client du fait que certains véhicules avaient été grêlés. Retour sur une affaire pour le moins douteuse où la confusion des genres et la rancune entraînent nombre de malentendus. Les dessous de "l'affaire".

Dans la nuit du 25 au 26 mai 2009, le stock de véhicules neufs de Kia, basé sur le parc logistique STVA d'Avrigny (60), a été touché par la grêle. 4 200 voitures ont été touchées. Une mésaventure que nombre de constructeurs rencontrent régulièrement. Le problème, inédit jusque-là, c'est qu'un des distributeurs lance aujourd'hui une procédure contre le constructeur coréen, pour fustiger son manque de transparence. Invité de notre confrère Pierre Mercier ce lundi, dans le cadre de son émission Internet 7PMTV, Michel Falvo s'explique. "On peut considérer que Kia France fait preuve d'inconscience totale. C'est criminel ce qu'ils font", estime l'intéressé. Des termes forts, qui contrastent sans doute avec l'objet du problème. Le distributeur reproche en effet à son constructeur de ne pas avoir communiqué les numéros de châssis des véhicules grêlés, afin d'en avertir le client final, là où d'autres marques l'annoncent à l'acheteur et lui consentent généralement une remise. "Pénalement, le concessionnaire vendeur est responsable", poursuit Michel Falvo. Le constructeur s'en défend.

La notion de VN en jeu

"Nous avons bien évidemment informé le réseau car cela allait générer un retard dans les livraisons", assure t-on chez Kia France. Dès le 26 mai, la marque a envoyé une première circulaire pour en informer ses distributeurs. Deux autres ont suivi en juin, puis en juillet. Trois directives que le Journal de l'Automobile s'est par ailleurs procuré. Quant à la communication des numéros de châssis, le plaignant est dans le vrai. "Nous avons délibérément gardé ces informations de manière à conserver la responsabilité en cas de problème ultérieur. Puis, objectivement, s'il y en avait un, quelle partie du véhicule concernerait-il  ? La peinture ? Cela tomberait sous le coup de la garantie", annonce t-on chez Kia. En effet, on parle ici de légers dégâts esthétiques, pas d'omission meurtrière quant à la sécurité des voitures vendues.

Depuis cette nuit de grêle, 3 335 de ces VN ont été livrés à client. "Les véhicules ont tous été expertisés une première fois. Ceux qui ont été touchés, ont, ensuite, été réparés. Et, pour la plupart, cela n'a même pas nécessité d'actes de carrosserie mais de simples débosselages. Ensuite, STVA, le logisticien, a lui-même missionné un organisme indépendant pour expertiser de nouveau le stock. Dekra, en l'occurrence. Des experts qui ont certifié les véhicules sans défaut et conformes au cahier des charges du constructeur", explique encore un porte-parole de la marque.

Le 12 janvier dernier, Michel Falvo et son avocat Maître Christian Bourgeon, ont néanmoins obtenu la nomination d'un expert pour qualifier les véhicules livrés. L'objet étant de savoir si ces derniers pouvaient être considérés comme véhicules neufs, ou non. "C'est vrai, il n'existe pas de texte obligeant un constructeur à avertir ses distributeurs ou ses clients d'un tel aléa. Mais c'est parce qu'il y a un flou juridique sur la notion de véhicule neuf. En tout état de cause, prévenir le client est une affaire de bon sens et de déontologie", estime Maître Bourgeon. "On peut toujours dire qu'un véhicule a été remis en état, il n'en reste pas moins que le distributeur ne sait pas l'importance des dommages qu'a subis le véhicule qu'il vend".
La question est, dès lors, de savoir si la certification de l'organisme indépendant suffit à dédouaner le constructeur de ce que certains appellent "bon sens" ou d'autres "honnêteté" ?

Confusions et mélange des genres

Le flou qui entoure la notion de VN est à vrai dire tout aussi important que celui qui demeure autour de l'affaire elle-même. Premier point : dans son entretien à Pierre Mercier, Michel Falvo laisse entendre que le constructeur ne serait pas assuré pour son stock d'Avrigny, pour expliquer cette absence de transparence. "Faux", assure la marque.
Confusion ensuite, autour du plaignant lui-même et de sa démarche. Depuis septembre dernier, Michel Falvo est président du groupement des concessionnaires Kia. "Nous avons 75 des 110 distributeurs de la marque qui ont adhéré", s'esbaudit l'investisseur. C'est exact. Problème : le constructeur ne reconnaît pas la structure. "Ce groupement n'est pas représentatif du réseau de Kia en France. Les distributeurs n'ont même pas voté", nous explique-t-on chez le constructeur. Ce que reconnaît un opérateur du réseau : "Il a été élaboré de manière anarchique et n'est pas dans une démarche constructive", explique t-il. D'autres abondent dans ce sens et regrettent d'avoir adhéré à un groupement dont le président était désigné d'office… Soit.

Enlevons toute ambiguïté, c'est en son nom propre que Michel Falvo attaque en référé, pas au nom du groupement. "Je le fais à titre personnel car des pressions ont été exercées sur mes collègues du bureau et je ne tiens pas à les mettre dans l'embarras", nous expliquait Michel Falvo, à l'issue de cette rencontre. En réalité, le distributeur aurait été "lâché" par ses confrères.

"Je ne peux pas cautionner qu'on salisse le réseau de cette manière."

"Tout le monde était contre une action avant de discuter avec la marque. Nous étions encore moins favorables à une communication dans la presse", raconte un opérateur francilien. "On ne peut pas imposer des choses comme ça. Surtout que le constructeur nous a soutenus dès le début et que c'est une marque ouverte avec laquelle on peut discuter", poursuit-il. "Nous étions unanimes. Même en menant une action en son nom, sa casquette de président de groupement donnait des airs de conflit d'intérêts. Ce n'était pas possible", raconte un des membres du bureau. "Il nous avait dit qu'il sortirait du groupement pour faire sa communication. Il ne l'a pas fait et a volontairement insinué le doute. Je ne peux pas cautionner qu'on salisse le réseau de cette manière. Il ne fait du bien à personne", commente ce dernier. Aujourd'hui, Michel Falvo a grandement entamé son crédit auprès des distributeurs de la marque. "Même les soutiens de la 1ère heure l'ont lâché", nous confie un distributeur très remonté. Néanmoins, le président refuse de démissionner. Et le bureau du groupement serait en train de finaliser son éviction.

Reste à savoir pourquoi une telle procédure. "C'est un conflit personnel avec la direction de Kia France", assurent de nombreux distributeurs. Certains évoquent un différend sur les objectifs commerciaux de Monsieur Falvo sur l'année 2009. C'est, en effet, le seul concessionnaire du réseau français à ne pas avoir signé ses objectifs l'an dernier, contestant, semble t-il, la méthode de calcul du constructeur. "Nous lui avons proposé un contrat à 193 VN pour 2009. Il en voulait un à 90. Nous avons accepté un compromis à 150 livraisons qu'il a refusé de signer également", précise Frédéric Verbitzky, directeur général de Kia Motors France. Au final Michel Falvo aura livré 89 VN l'an dernier. "C'est une opération qui fait pschitt…", commente, dépité, un concessionnaire. Dommage que constructeurs et distributeurs aient été éclaboussés…

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