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Constructeurs

Jean-Christophe Kugler, Renault : "L’électrification va arriver chez Dacia"

Publié le 6 mars 2019

Par Damien Chalon
8 min de lecture
Rencontré à l’occasion du Salon de Genève, Jean-Christophe Kugler, le directeur des opérations de la région Europe du groupe Renault, évoque les projets actuels et futurs de Dacia, ainsi que les performances commerciales de la marque low cost.
Jean-Christophe Kugler lors de la présentation du nouveau Duster lors du salon de Francfort en 2017.

 

Avez le recul, comment jugez-vous l’année 2018 de Dacia en Europe ?

Il y a un chiffre que peu de personnes ont remarqué, nous avons vendu 511 593 Dacia l’année dernière en Europe. C’est un chiffre assez impressionnant. Nous sommes sur la même dynamique en 2019. Sans que cela ait été un objectif, nous sommes au coude à coude avec les coréens. C’est assez surprenant car nous ne vendons qu’à des particuliers alors que les coréens vendent aussi à une clientèle flotte. Cela veut dire que si nous ne considérons que la clientèle des particuliers, nous sommes dans le Top 5 européen. Nous sommes donc très bien placés. La Sandero est la voiture la plus vendue à particuliers et le Duster s'impose comme le SUV préféré des particuliers en Europe. Finalement, nous ne connaisons pas le potentiel maximal de Dacia. Nous avons toujours été freinés par la production. Tout ce que nous fabriquons est vendu.

 

Comment vous adaptez-vous au niveau industriel ?

Nous sommes assez pragmatiques. Nous ouvrons des capacités de production et nous regardons si les ventes suivent toujours. C’est le cas, à chaque fois nous utilisons les nouvelles capacités à 100 %. De ce fait, nous ne connaissons pas la limite maximum de la marque en Europe. Personne n’est en mesure de faire une simulation pour dire que Dacia, compte tenu de ses atouts et de ses concurrents, vaut tant sur le marché européen. C’est d’autant plus compliqué que nous avons des parts de marché très disparatres selon les pays. Si en France nous atteingnons les 5/6 % de part de marché, en Angleterre nous sommes à environ 1 % alors que nous pouvons monter à 12 % dans d’autres pays. Nous avons donc du mal à évaluer notre potentiel.

 

Dacia n’est-elle pas trop dépendante de ses deux piliers que sont la Sandero et le Duster ?

Les autres produits se vendent très bien aussi ! Nous sommes au maximum de nos capacités de production. Le Lodgy, qui n’avait pas forcément très bonne réputation avec un style que certains clients trouvaient un peu pataud, se porte bien grâce à la version Stepway et aux diverses améliorations que lui ont été apportées, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Nous sommes également au maximum de production pour le Dokker et la Logan MCV. Nous sommes bloqués partout. Il n’y a aucun véhicule de la marque qui a des capacités de production disponibles.

 

Quelles sont vos capacités de production ?

Nous avons atteint une capacité de plus de 700 000 unités produites en 2018. L’essentiel était destiné à alimenter le marché européen mais aussi de grands marchés comme la Turquie. Nous avons par ailleurs annoncé le doublement de la capacité de production de l’usine de Casablanca en octobre dernier. Cela va nous permettre de repousser la frontière un peu plus loin.

 

Comment expliquez-vous le succès croissant de Dacia ?

Dacia bénéficie de deux trends de société assez importants. Le premier est ce que l’on appelle le « smart buy » que l’on retrouve chez des enseignes telles qu’Ikea ou Easyjet. C’est une tendance de fond. Les clients changent leur façon d’arbitrer le budget du ménage. La question n’est pas qu’ils n’ont pas de moyens mais ils veulent utiliser leurs revenus différemment. Ils achètent malin, ce qui permet d’avoir d’autres expériences en parallèle comme un super voyage. Dacia bénéficie très fortement de ce phénomène. Nous bénéficions aussi du trend sur les SUV. Clairement, nos véhicules sont identifiés par nos clients comme des SUV avec bien entendu le Duster, mais aussi nos versions Stepway. J’ajoute enfin que nous bénéficions d'une communauté de clients très forte. Ils sont les meilleurs ambassadeurs de la marque, ils sont très fidèles et, en plus, montent progressivement en gamme. Ils sont arrivés chez nous de manière pragmatique, ils sont maintenant dans l’émotionnel. Cela se vérifie dans les pique-niques que nous organisons chaque année. Nous avons également plus de 4 millions de followers sur Facebook et plus de 5,5 millions de véhicules en circulation dans le monde.

 

Vous parlez de montée en gamme, est-ce que le panier moyen sur le nouveau Duster est plus élevé que sur la précédente génération ?

Oui, à chaque fois nous montons un petit peu. Nous offrons de plus en plus de technologies, nous bénéficions des étagères de l’Alliance. Quand les technologies de nos partenaires arrivent à un coût compétitif grâce aux effets d’échelle, nous les intégrons. Je pense par exemple à la caméra de recul qui est une option très appréciée même sur la Sandero. On amène petit à petit des technologies qui sont attendues par les clients et qui sont prises massivement en option. Le Duster bénéficie par exemple de la caméra 360° et de la carte mains libres. Dacia est encore une fois une marque très pragmatique. Nous ne développons rien de particulier, nous allons chercher les composants au bon coût que nos clients attendent. Ces équipements sont la plupart du temps proposés en option, il faut que nos véhicules restent accessibles.

 

"C’est assez simple d’envisager une vente sur internet"

 

Avez-vous envisagé de nouveaux modes distribution pour vos produits ?

Je tiens tout d’abord à souligner que dans tous les pays d’Europe nous avons un fort soutien de nos concessionnaires. Nous faisons un bon travail conjointement depuis 2004. C’est un point clé. Après, évidemment, vu que nous avons une gamme assez simple, il est envisageable de vendre sur internet. Nous sommes en test depuis novembre dernier sur ce sujet en Angleterre avec le site Dacia Buy Online. Nous proposons un processus d’achat complet, bon de commande et financement compris. Avec notre branche RCI, nous voulons proposer une nouvelle expérience client. Si le client ne veut pas se présenter en concession, il n’est pas obligé, il ne s’y présentera que pour récupérer son véhicule. Ce test se fait en lien avec nos concessionnaires qui veulent également se projeter vers l’avenir. Ils s’intéressent aux modes de distribution de demain. C’est au travers de ces expériences que nous sommes capables de voir ce que les clients attendent. Il est  facile de le faire avec Dacia qui a une offre relativement simple. Nous avons en plus réduit la gamme qui est proposé sur internet. Nous allons avoir d’autres expériences en Europe.

 

Peut-on envisager un tel dispositif en France ?

Notre objectif est tout d’abord de bien comprendre comment cela tourne, d’identifier les freins éventuels. Nous faisons d’abord une expérience sur un pays pour cerner les points clés, pour ensuite la dupliquer partout, y compris en France. Ce sera étudié au cas par cas. Si les concessionnaires en France sont intéressés, nous allons évidemment en discuter avec eux.

 

D’autres projets sont-ils à l’étude en matière de distribution ?

Nous nous posons aussi des questions sur le nouveau look des concessions Dacia avec nos équipes de designers. Nous sommes par exemple assez contents du style de notre stand à Genève, cela pourrait être une piste. Nous ne sommes cependant pour l'instant pas très avancés sur le sujet.

 

Comment se positionne Dacia face aux changements technologiques qui touchent le monde de l’automobile ?

Comme toujours, Dacia suivra les demandes de ses clients. Ils auront des demandes naturelles mais aussi des demandes contraintes. Des contraintes liées aux restrictions de circulation ou à des taxes. Nous sommes très attentifs à l’évolution des réglementations dans les villes et les pays qui peuvent impacter nos clients, et donc les freiner dans leurs intentions d’achat. Nous essayons d’être bien en adéquation pour faire une offre compatible avec leurs usages. Nous avons par exemple beaucoup poussé sur le GPL avec une gamme complète. C’est une solution économique et écologique qui marche bien. Se pose aussi la question de l’électrification de nos produits dans le futur. Nous allons avoir des contraintes d’émissions au niveau du groupe Renault et Dacia devra apporter sa contribution. Encore une fois, le point fort de la marque à l’intérieur de l’Alliance est de pouvoir être en observation permanente sur les technologies disponibles et de voir quel sera leur coût dans deux ou trois ans.

 

Une Dacia électrique, est-ce une possibilité ?

Qui dit électrification ne veut pas forcément dire électrique. L’électrification chez Dacia va arriver, mais je ne suis pas en mesure de vous dire si nous aurons un modèle 100 % électrique. Nous souhaitons arriver au bon moment sur les technologies, c’est-à-dire en gardant notre positionnement dans le marché. Nous en voulons pas quitter notre territoire. Il faut absolument que ces solutions d’électrification soient des solutions achat malin. Nous sommes très vigilants sur ce point.

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