Entretien : Michael Manley, vice-président exécutif et directeur des ventes monde de Chrysler Group
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du groupe Chrysler.
Journal de l'Automobile. Comment expliquez-vous les 33 mois de croissance consécutive enregistrés par votre groupe ?
Michael Manley. Si l'on se souvient de notre situation voilà quelques années, nous avions alors beaucoup de lignes de produits entre nos différentes marques. Nous avons depuis rationalisé notre offre et aujourd'hui, nous avons quatre gammes sur six segments de véhicules. Je pense qu'une grande partie de nos résultats à l'international vient de cet effort. Parallèlement, nous avons renforcé notre réseau de distributeurs en Europe et dans le monde, ce qui a contribué à nous offrir des opportunités de volumes.
JA. Quelle est la part des marchés européens dans cette croissance ?
MM. L'Europe a un rôle très important dans ce résultat. Elle représente 50 % de nos ventes à l'international. C'est un des marchés les plus importants dans le monde. Ce sont des marchés sur lesquels nous aspirons à plus d'intégration dans le futur, avec des distributeurs plus établis dans chaque pays. C'est pour cette raison que nous travaillons sur notre réseau.
JA. Etes-vous satisfait par ces ventes européennes ?
MM. J'estime qu'on peut toujours faire mieux. Je pense qu'il y a aujourd'hui beaucoup plus d'opportunités en Europe pour nous qu'auparavant, notamment avec le succès des SUV, mais aussi parce que nous y devenons un acteur de plus en plus expérimenté. Pour cela nous devons continuer à proposer des produits adéquats. L'Europe est un marché très important pour les véhicules du segment B, que nous n'avons presque pas comparativement à ceux du segment C. Pour avoir davantage de performances dans le futur, nous nous devons donc de compléter notre gamme.
JA. Quelle marque du groupe Chrysler a, selon vous, le meilleur potentiel en Europe ?
MM. Je vais forcément vous parler de Dodge, parce que nous sommes jeunes en Europe. Nous y avons lancé la marque en 2004 en partant de zéro. Et, en peu de temps, nous avons obtenu de bons résultats, notamment sur ce segment C grâce à la Caliber. Pour Jeep, nous devons continuer à être le premier fournisseur de SUV dans le marché.
JA. Que pensez-vous du système bonus- malus en France ?
MM. Le nouveau système de taxation va avoir un important impact sur le marché français. Lorsque nous regardons les résultats de janvier, c'est très net. En un mois, il y a déjà eu d'importants changements. Mais je ne parle pas d'une mutation traditionnelle pour un segment en particulier ou un type de véhicule, comme le SUV. Ce changement de fiscalité influe dans beaucoup de domaines. Il n'y a aucun doute sur le fait que ce type de législations, se multipliant dans divers pays d'Europe, aura un fort impact sur l'industrie automobile et sur notre stratégie produits. Nous avons le devoir de répondre.
JA. Quel type de technologies plus respectueuses de l'environnement le marché français peut-il attendre sur vos futurs modèles ?
MM. Nous avons récemment lancé en Europe un petit SUV économe en énergie. Pour accompagner ce lancement nous allons communiquer sur notre "Fuel Economy Challenge". Un voyage de Londres à Berlin (soit 1 124 km), au volant de Jeep Patriot et Compass pourvus d'un moteur 2 l turbodiesel, avec un seul plein de carburant. Les véhicules engagés ont tous affiché des consommations inférieures à 5 l/ 100 km. Des performances très importantes à nos yeux. D'ailleurs, nous continuons de travailler avec nos partenaires sur cette technologie Diesel. Bien sûr, nous poursuivons aujourd'hui le développement de moteurs hybrides. Nous présentons d'ailleurs ici deux concept-cars, l'un propulsé par un moteur hybride Diesel, l'autre par une pile à combustible.
JA. Vous aviez annoncé un objectif européen de 400 000 ventes à l'horizon 2012. Est-ce toujours d'actualité ?
MM. Tout à fait. Nous maintenons cet objectif. Nous avons connu l'an dernier une croissance de + 15 % alors que le marché était assez difficile. Nous avons poursuivi en janvier et février sur une nouvelle croissance de 10 %. C'est un bon rythme que nous allons tenter de maintenir en 2008. Nous avons, pour nous y aider, d'importants lancements de véhicules dans les prochains mois, comme le Dodge Journey. Un véhicule très important pour nous en Europe. Le challenge pour nous est de maintenir ce rythme en 2009 et en 2010 pour remplir nos objectifs fixés en 2012. Je pense que nous avons le plan produits pour y parvenir.
JA. Est-ce que cela passe par la multiplication des points de vente ?
MM. Je pense que nous avons besoin de quelques distributeurs supplémentaires en Europe. Nous avons en effet des zones non occupées dans certains pays. Nous sommes donc en phase de recrutement. Mais il est surtout très important pour nous de travailler avec nos distributeurs existants pour accroître leur possibilité de ventes. C'est essentiel. Nous devons être attentifs à leurs besoins, aux marchés et investir dans les marques.
JA. Devez-vous, pour cela, jouer la carte des distributeurs exclusifs ?
MM. Ce qui est important, c'est de donner l'opportunité à nos distributeurs de faire plus de profits. Je pense que des distributeurs exclusifs ont de meilleures performances, donc de meilleurs profits. Mais chaque marché est différent en Europe. Sur certains d'entre eux, nos volumes ne sont pas assez importants pour cela. Dans ces cas-là, les distributeurs cherchent forcément à représenter plusieurs marques pour avoir de meilleurs retours sur investissement. Nous devons donc être flexibles. Cela étant, je reste persuadé que lorsque l'on se concentre sur une marque, on peut optimiser son business model. L'exclusivité peut ainsi apporter beaucoup de bénéfices. Représenter plusieurs marques n'est pas la seule façon de dégager plus de profits.
JA. En 2007, Jim Press a annoncé la suppression de 23 000 emplois. Pensez-vous que cela puisse avoir un impact sur la production de véhicules et leur livraison à travers le monde ?
MM. Nous parlons ici d'optimisation du processus de production de Chrysler. Il s'agit de regarder la manière dont le marché global évolue et d'adapter notre appareil en conséquence. Sur les 20 derniers mois, le marché américain chute. En 2007, la production US a été de 15,9 millions de véhicules environ. Ce que nous avons fait, c'est donc de nous projeter dans le futur pour être sûrs que nos capacités de production soient adaptées à la demande du marché mondial. C'est une réflexion logique. Nous devons voir où se situe la croissance. Elle n'est pas aux Etats-Unis, donc cela impacte nos usines locales. Mais je ne pense pas qu'il faille craindre un quelconque problème au niveau international.
JA. Pensez-vous que ce soient ici les derniers départs ?
MM. C'est vraiment difficile à dire. Ce qui est certain, c'est que lorsque votre appareil de production est optimisé, vous avez davantage la possibilité de répondre aux changements du marché. Si nous voulons connaître la croissance dans le futur, il faut travailler avec une base stable. Nous avons franchi une étape essentielle vers l'adaptation de nos capacités de production aux marchés. Je ne sais pas si ce sera la dernière, mais elle nous donne en tous cas la possibilité de grandir.
Photo : Le Dodge Journey qui doit être lancé en Europe à la fin du printemps est au cœur de la stratégie Dodge sur le Vieux Continent. Il sera lancé avec un moteur 2 l turbodiesel, mais aussi avec un 4 cylindres essence de 2,4 l, puis un bloc V6 de 2,7 l.
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