Avec Volkswagen, pas de problème…
...très suivie en Lorraine il y a huit ou neuf lustres) et qui nous est revenu à l'esprit il y a quelques semaines, lorsque le constructeur a décidé de se séparer du patron de sa filiale française... Lorsque les statistiques de ventes sont mauvaises, la servitude sans grandeur (autre qu'illusoire) du commerce automobile veut en effet qu'un responsable remplisse son rôle de fusible. Voilà qui est fait : la tradition a été respectée. Mais le problème de Volkswagen est sans doute appelé à demeurer, quelles que soient les qualités du nouveau patron... à moins que le constructeur ne change de stratégie, ce qui est peu probable. Car c'est de là que viennent les déconvenues, présentes et futures, d'un constructeur souvent cité comme un exemple de réussite.
Le syndrome de Phaeton-Golf
Phaeton et Golf… ces deux modèles, si différents entre eux, témoignent de la faiblesse d'une même stratégie. Le marché s'est vengé, à sa façon, d'une double outrecuidance du constructeur. Commençons par Phaeton. On sait que ce modèle est parfaitement cohérent avec l'ambition, annoncée par Volkswagen, de positionner la marque Volkswagen face à Mercedes. Les consommateurs ont été très peu nombreux à répondre à l'appel, pas du tout parce que, en snobs incorrigibles, ils se refuseraient à acheter un haut de gamme badgé Volkswagen. Avec le déclin des vaches sacrées, on a bien vu des consommateurs huppés se diriger vers des SUV coréens ! Et on en verra bien d'autres, dans les mois et années à venir. Mais il faut, pour avoir du succès, premièrement, que le modèle plaise, et deuxièmement que son prix ne donne pas l'impression qu'on se fait avoir. Phaeton, à l'évidence, ne remplit pas ces deux conditions. Dommage ! Que dire, en revanche, de la nouvelle Golf ? Simplement que le constructeur n'a pas voulu considérer qu'une énième Golf, c'était une de trop. Il est sans aucun doute assez difficile d'interrompre une série qui marche commercialement depuis trente ans. Mais si l'environnement concurrentiel a changé (voyez, à titre d'exemple, Corolla Verso) et si les démarches des consommateurs ne sont plus les mêmes, il faut bien en tirer quelques leçons. Soyons clairs : au prix de quelques sacrifices de marge, la Golf se vendra correctement, sans plus. Mais le constructeur aura raté une occasion de renouvellement de sa gamme, ce qui n'est pas rien. Surtout, dans le cas de chacun des deux modèles, Volkswagen semble bien avoir surévalué son effet d'image.
Tout homme bien portant est un malade qui s'ignore
La force de Volkswagen sur le marché est, paradoxalement, la cause première de ses difficultés naissantes. En effet, Volkswagen jouit (encore) d'une image qui lui permet de charger ses modèles d'un supplément de prix, donc d'appliquer à la clientèle un "premium price". Mais, lu dans un miroir, ceci veut dire qu'avec l'effritement inévitable, dans un marché hyper concurrentiel, de son avantage en termes d'image, le constructeur verra se réduire progressivement les marges de ses véhicules… sauf à multiplier les cas "Phaeton-Golf". Peut-il se le permettre ? Tout dépend de la logique qui a présidé à ses choix stratégiques. S'il est exact, comme on a pu le lire tout récemment, que Volkswagen compte, pour les prochaines années, sur un supplément de prix voisin de 8 % par rapport à ses concurrents généralistes, les difficultés du constructeur allemand ne font que commencer. En fait, vue de l'extérieur, la stratégie de Volkswagen semble répondre à la fois à une nécessité et à une constatation. La nécessité est indéniable : il faut que Volkswagen laisse respirer Seat et Skoda. La constatation était tout aussi indéniable jusqu'à il y a peu : Volkswagen était une marque généraliste perçue comme supérieure à la plupart des autres par une fraction importante de consommateurs. D'où l'idée de "pousser la marque" vers le haut du marché… Mais les temps sont précisément en train de changer, et rendent, à notre très humble avis, caduque une stratégie élaborée dans le cadre d'un marché passablement protectionniste. Une copie à revoir ?
Ernest FerrariSur le même sujet
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