Jean-Francois Pardé, président Subaru France
Journal de l'Automobile. Subaru est une marque un peu à part au sein du groupe Frey. Pourquoi ?
Jean-François Pardé. Comme Hyundai, Ssangyong et Daihatsu, Subaru est distribuée en France par le groupe Frey. Mais nous avons, en effet, la particularité d'avoir Fuji Industries au capital de Subaru France. De manière générale, c'est un parti pris du constructeur de garder un pied dans chaque pays où la marque est commercialisée. Seuls les Etats-Unis ont une vraie filiale. Au quotidien, cela nous permet de travailler en toute indépendance. Le fait d'être importé par le groupe Frey nous permet de bénéficier d'un back office que nous ne pourrions pas avoir en étant une simple filiale. C'est la force du groupe. Il y a une organisation transversale à toutes les marques distribuées par le groupe pour les questions d'informatique, de comptabilité, de location ou de gestion après-vente, avec notamment une société qui gère toute l'activité pièces de rechange. C'est un vrai plus. C'est ce qui permet à une marque à faible volume comme la notre d'être sur le marché français.
JA. Côté performances, vous avez clos 2 009 avec des ventes en hausse de
13 %. C'est une surprise pour vous ?
J-FP. En 2009, nous avons fait près de 1 400 immatriculations. Mais n'oublions pas que nous avons également Andorre et les DOM sur notre marché. Ce qui signifie que nos facturations sont toujours supérieures à nos immatriculations. Je considère que nous sommes relativement stables. Et je m'en félicite car cela survient au moment d'un changement brutal du marché français. Cela a été une vraie rupture. Heureusement que nous avons eu l'arrivée du Diesel en 2008. Ce qui nous a permis de rester à notre place.
JA. Quelle part de vos ventes représente le Diesel aujourd'hui ?
J-FP. Sur le mois de février, le Diesel a représenté plus de 83 % de nos immatriculations. Le reste des ventes concernait naturellement des Justy essence, mais aussi nos modèles Sport, qui pesaient, auparavant, 70 % de nos ventes. Sur ces véhicules, nous avons été laminés. Rappelons-nous qu'il y a deux ans, nous étions 100 % essence ! C'est donc un vrai virage. Nous sommes, en effet, passés d'une moyenne de 190 g en janvier 2008, à une moyenne de 150 g en février 2009. Sans cela, nous étions en mauvaise posture. Quelque part, le Diesel nous a sauvés.
JA. Justement, quelle est désormais la place de l'Impreza ?
J-FP. Il y a trois ans, 90 % des ventes de l'Impreza concernaient des modèles Sport WRX STi, donc 100 % essence. Aujourd'hui, cela s'est totalement retourné et c'est finalement assez symbolique de ce que nous vivons. Il n'y a plus de marché pour ce type de véhicules. Désormais, 95 % des ventes d'Impreza concernent un moteur Diesel. C'est une révolution. Alors que sur le Forester, la transition s'est faite aisément, puisqu'il y avait une vraie légitimité sur ce modèle. Comme sur l'Outback, lancé en janvier, où nous sommes là encore à 90 % de ventes en Diesel.
JA. Mais le fonds de commerce de Subaru était précisément les moteurs essence… Comment communiquez-vous désormais ?
J-FP. Ce n'est effectivement pas la même clientèle. Avant, les choses étaient différentes. Les clients venaient acheter la voiture bleue. Nous n'avions presque pas d'efforts à faire. Aujourd'hui, nous restons une marque de niche, mais nous ne faisons désormais que de la conquête. Nous axons donc désormais nos communications sur l'association du moteur Boxer Diesel aux 4 roues motrices permanentes de série. C'est notre nouveau credo. Il y a donc un vrai travail de mise en place du développement par le Diesel. Cela n'a rien d'anodin pour nos distributeurs. Notons d'ailleurs que, depuis l'arrivée du Diesel, le chiffre d'affaires moyen par affaire est en hausse.
JA. C'est par ce biais que le réseau va demeurer performant ?
J-FP. Notre travail de base, c'est le support à la vente. Nous devons donner au réseau les moyens de vendre des véhicules. Nous avons commencé par élaguer et recentrer quelque peu la gamme de manière à lui simplifier la tâche et à être en ligne avec le marché. Nous n'avons plus qu'une vingtaine de modèles en catalogue contre une quarantaine auparavant. C'est plus facile à travailler et la rotation des stocks est bien plus importante. Avant, quand il fallait écouler les modèles essence, il fallait vraiment se battre et cela finissait par dégrader les marges. Le 2e paramètre, c'est que nous avons revu la façon de soutenir nos distributeurs.
JA. C'est-à-dire ?
J-FP. Nous avons coupé nos budgets de communication nationale et avons tout reporté sur les supports réseau à un niveau local. Nous estimons qu'il vaut mieux mettre ces sommes sur de la promotion régionale. L'an dernier, nous avions mené l'expérience durant six mois et cela n'a pas eu d'incidence sur les affaires. Ce qui prouve bien que nous sommes une marque de spécialistes, avec une véritable estime des gens qui nous connaissent, mais en manque de notoriété vis-à-vis du grand public. Nous avons récemment fait une étude afin de mieux connaître notre clientèle. Il s'avère que nos clients sont quasi exclusivement des hommes, de plus de 40 ans, sur des régions très spécifiques. Cela nous a confortés dans notre analyse et nous permet de continuer à travailler sereinement cette cible. Nous avons donc décidé de déplacer un maximum de budget pour donner les moyens aux concessionnaires de bien travailler.
JA. Cela se traduit comment ?
J-FP. De l'aide à la vente bien sûr. Nous sommes très bien placés en termes de tarifs. Un véhicule 4 roues motrices Diesel à 23 000 euros, comme nous le proposons en ce moment avec l'Impreza, ça n'existe pas.
JA. Croyez-vous que le marché actuel soit encore propice à une nouvelle croissance de vos ventes ?
J-FP. En ce début d 'année, nous sentons un léger désamour pour les petites voitures. Clairement, nous ne poussons donc pas la Justy cette année et la laissons un peu de côté. C'est un modèle qui nous aide bien par ailleurs, mais là où nous en avons vendu 300 l'an dernier, nous n'en vendrons peut-être même pas 200 cette année. Nous constatons que les grandes fonctionnent de nouveau et observons le retour d'une clientèle un peu frileuse, qui avait adopté une position attentiste en 2008 et 2009. Nous pensons donc que la place de la marque en France est à 2 000 immatriculations par an. C'est, du reste, notre objectif pour cette année.
JA. A Genève, nous avons vu certaines choses inédites sur le stand de Subaru. Je veux parler de la technologie hybride, via le Tourer Hybrid Concept, mais aussi de l'électrique. Quelle peut être la place de telles solutions chez une marque comme Subaru ?
J-FP. L'électrique est une direction que l'on emprunte depuis longtemps. Au Japon, nous sommes même la seule marque, avec Mitsubishi, à déjà commercialiser des véhicules électriques. En l'occurrence, il y a actuellement 500 exemplaires de la petite R1e qui y roulent en expérimentation. La marque travaille donc clairement le sujet. Nous avons d'ailleurs dévoilé également la Stella Plug-in. Mais Fuji Industries considère que l'électrique est une solution pour les flottes captives. C'est tout.
La 2e chose, c'est l'hybride. A ce sujet, nous venons de présenter le Tourer Hybrid Concept. En termes de style, il s'agit d'une simple recherche. En revanche, ce qui est fondamental, c'est la technologie sur laquelle le concept s'appuie. Cela montre que nous sommes très avancés sur le dossier de l'hybride. Mais notre volonté est d'associer cette technologie à nos moteurs à plats et à notre chaîne cinématique. Nous nous lançons donc dans l'hybride avec le souci de garder notre philosophie. Ce modèle sera lancé au Japon en 2012, puis sera commercialisé à l'export dans la foulée.
JA. Où en est le réseau aujourd'hui ?
J-FP. Nous avons 80 distributeurs. A terme, notre plan est d'atteindre les 100 points de vente. Notre objectif d'atteindre les 2 000 VN passe d'ailleurs aussi par cette extension du réseau. C'est évident. Nous sommes donc en phase de recrutement.
JA. Quel est le profil des opérateurs que vous recherchez ?
J-FP. Nous sommes un "complément d'activité", par ailleurs, de plus en plus légitime. Avec la défaillance de certaines marques, nous sommes une opportunité. Actuellement, beaucoup d'investisseurs préfèrent des produits qui s'achètent, même s'ils doivent avoir des marges moins importantes. Nous, nous faisons des produits qui se vendent. Ce n'est pas pareil. Cela demande un vrai travail, mais aussi d'être passionné par la marque et ses produits. Il faut aller chercher le client. Ce n'est pas de la prise d'ordre. Le facteur humain est déterminent. Nous disons donc aux investisseurs : Vous allez gagner de l'argent car nos produits sont d'une qualité hors du commun, que nous avons des excellents taux de satisfaction et de fidélisation.
Sur le même sujet
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.