Xavier Horent, Mobilians : "Le barycentre de la filière automobile s’est déplacé vers les services"
Le Journal de l'Automobile : Dans quelques semaines sera signé le prochain contrat de filière. Quelle part pour les services de l’automobile dans ce nouvel engagement avec le gouvernement ?
Xavier Horent : Je dois avant tout mettre en avant la qualité du travail réalisé avec la Plateforme de l’automobile (PFA). Le degré de confiance mutuel est réel et nous sommes dans une vraie logique de coopération. Cet état d’esprit a permis de construire un contrat de filière qui est plus équilibré. C’est indispensable si nous voulons atteindre nos objectifs en termes de baisse des émissions du parc roulant. Ne penser qu’autour des véhicules neufs ne suffit plus. Dans ce sens, le contrat à venir est un progrès indiscutable.
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J.A. : Comment inscrire l’amélioration du parc dans ce contrat ?
X.H. : Nous travaillons sur un axe concernant le pilotage et la gestion de ce parc. Nous allons proposer de faire combiner toutes les solutions existantes, y compris le rétrofit. C’est d’autant plus indispensable que le marché de la voiture neuve va souffrir de l’attentisme des clients. Nous disposons encore de trois semaines de travail avant de finaliser le texte. Mais l’intention politique est bien présente. La transformation est bien en marche malgré les taux d’intérêts en hausse, les taxes qui augmentent et la demande qui baisse. Tout va se jouer dans les quatre à cinq ans qui viennent pour arriver à tenir les objectifs de réduction des émissions de CO2, de production de deux millions de véhicules électriques en France et atteindre une approche plus cohérente notamment sur le sujet de l’économie circulaire.
J.A. : L’économie circulaire est justement un sujet dont s’emparent les constructeurs en créant dans leur stratégie des divisions dédiées. Comment préserver la filière indépendante du recyclage ?
X.H. : Il est légitime de vouloir une filière performante et forte en manière d’économie circulaire. Mais pourquoi ne pas s’appuyer sur un tissu de PME qui existe. Personne ne s’occupait du recyclage ; ce qui était en bout de chaîne devient aujourd’hui stratégique. C’est un vrai renversement de l’histoire. C’est sans doute le métier qui a le plus d’opportunités mais arrêtons d’être dans un raisonnement de captation de la valeur. La logique de partenariat doit prévaloir. Si le contrat de filière peut y aider, Mobilians en sera satisfait.
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J.A. : Ce contrat de filière devrait donc tenir compte des intérêts des métiers de l’aval de l’automobile ?
X.H. : Le futur document devrait être plus équilibré même si le tropisme de Bercy reste encore très industriel. Bien que nous soutenons la demande des industriels, Mobilians a à cœur de défendre la filière dans son ensemble. Mais le gouvernement et les fabricants savent que le barycentre de la filière s’est déplacé vers les services. Notre secteur a besoin de sagesse. Et il est important que nous soyons tous alignés.
Avec 25 000 entreprises adhérentes et un budget de 25 millions d’euros, Mobilians est une organisation totalement atypique en Europe. Mais il faut bien comprendre que nos financements dépendent de la qualité de notre travail et nous devons donc être performants.
J.A. : Mobilians a soutenu une proposition de loi, déposée au début de cette année, pour revoir les relations contractuelles entre distributeurs et constructeurs. Comment évolue ce sujet ?
X.H. : Clairement, nous avançons sur le sujet. Mais plutôt que de nous diviser devant le parlement, nous avons convenu qu'il était largement préférable de déterminer ensemble des points d'équilibre. De manière transparente, Mobilians a suspendu son lobbying parlementaire et gouvernemental pour privilégier un dialogue franc et direct et aboutir à un texte consensuel pour normaliser ces relations. et surtout ranimer une cohésion autour d'un esprit partenarial. C'est ce principe qui nous permettra de relever les très nombreux défis du futur. Nous espérons aboutir à une conclusion avant la fin de cette année : il est temps de se projeter de manière collective et positive. De manière générale, la filière doit absolument capitaliser sur sa coopération interne avec une vision beaucoup plus décloisonnée des enjeux, des risques et des opportunités. Elle ne doit pas se rétrécir dans une stratégie court-termiste de captation de la valeur au profit de quelques-uns et au détriment de tous les autres en particulier les dirigeants de TPE, PME et ETI qui innovent et investissent sans fuir leur responsabilité sociale.
J.A. : Que pèse désormais Mobilians ?
X.H. : Nous pesons désormais l’intégralité de la branche des services et nous allons même au-delà de notre champ d’action avec l’intégration par exemple des opérateurs de bornes de recharge. Notre volonté est de constituer un véritable écosystème. Nous sommes un mouvement d’entrepreneurs qui veulent devenir des acteurs. À ce jour, Mobilians compte 25 000 entreprises adhérentes pour un total d’environ 300 000 salariés. Et notre budget atteint 25 millions d’euros. Mais il faut bien comprendre que nos financements dépendent de la qualité de notre travail et nous devons donc être performants. C’est une organisation totalement atypique en Europe.
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J.A. : Vous avez récemment décidé de quitter le Cecra et de mener votre propre lobbying à Bruxelles. Allez-vous créer une nouvelle structure ?
X.H. : Ce n’est pas notre volonté et nous ne souhaitons pas nous enfermer à nouveau dans une structure. Nous souhaitons plutôt nous doter de moyens supplémentaires en créant un poste de lobbying à Bruxelles. De la même manière, nous allons privilégier les relations bilatérales avec des organisations similaires présentes sur les plus gros marchés européens comme en Italie, en Espagne, en Belgique et en Allemagne. Nous avons déjà réalisé nos premiers échanges avec la ZDK, (la fédération nationale du commerce automobile allemand), qui sont d’excellents augures pour porter nos sujets à la Commission et au Parlement. Le sujet aujourd’hui est d’agir et non plus de commenter les décisions. En ce sens, nous allons préparer les échéances électorales notamment avec nos partenaires allemands. Nous devons en effet repenser totalement notre représentation à Bruxelles et nos méthodes de travail avec l'ensemble de nos parties prenantes, y compris bien sûr les ONG.
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