La maison D’Ieteren fête ses 200 ans
...aujourd'hui les frontières de la Belgique. Roland D'Ieteren, le gardien du temple, revient sur sa philosophie du métier et la flamme qui habite encore son clan.
Bruxelles, 50, rue du Mail. Nous sommes au fief du D'Ieteren Group, à Ixelles plus précisément. Un des nombreux quartiers de la capitale belge. Dans le grand bâtiment qu'occupe la famille D'Ieteren depuis le début du XXe siècle, le patron patriarche arpente ses murs et se plaît à conter l'authenticité de son épopée familiale. Deux cents ans que les siens décorent le panorama de l'automobile belge. Difficile d'imaginer une telle saga dans laquelle le feu sacré se transmet de génération en génération. Difficile de croire en une telle longévité. Et à l'heure d'entamer, pourquoi pas, un bicentenaire de plus, la famille se rappelle cette année 1805 où l'aventure a commencé. Aujourd'hui, le groupe tient ainsi à montrer ses galons. Ceux d'un métier qui a fait son succès. Ceux d'une ambition qui pousse la société à s'exercer désormais dans plus de 100 pays. "Nous avons le devoir de préserver et d'entretenir la mémoire de notre entreprise", martèle Roland D'Ieteren.
Cette mémoire, justement, s'exprime aujourd'hui par le besoin de communiquer. Fier, le chef d'orchestre actuel raconte son histoire. Celle dont il fut tantôt témoin, tantôt acteur. Point par point, l'homme fort de la distribution belge énonce les différents métiers que sa famille a pratiqués. Ainsi, du charronnage à la représentation, six générations de D'Ieteren se sont succédé. Et toujours l'automobile et ses services sont restés leur cœur de métier. Des petits Tilbury qui sortaient de l'atelier de Jean-Joseph, fondateur de l'entreprise familiale, le groupe a puisé son sens pour l'art de la finition. Un art entretenu ensuite par ses fils, petits-fils et descendants pendant de nombre d'années. Au total, sept métiers ont occupé le quotidien des D'Ieteren. Fournisseur de voiture à la cour de Hollande puis à la cour de Belgique à la fin du 19e siècle, la petite entreprise familiale a rapidement accédé à la reconnaissance. Aujourd'hui, si les activités ont changé, l'envie d'entreprendre et de véhiculer cette idée singulière du métier reste intacte. De la confection des calèches de luxe, l'entreprise s'est, en effet, orientée plus tard vers l'assemblage et la distribution de certaines marques. Et toujours avec autant de réussite. Représentant exclusif des marques du groupe Volkswagen en Belgique depuis 1948, de nombreux constructeurs sont venus garnir ses enceintes. Audi (1974), Seat (1984), Skoda (1992), Rolls-Royce et Bentley (2000), ou encore Lamborghini (2001). Ces dernières années, le groupe a même pris la voie d'une diversification franche.
FOCUSD'Ieteren Group
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"Je ne crois pas au multimarquisme"
En 1989, année d'un autre bicentenaire, D'Ieteren est, en effet, devenu actionnaire majoritaire d'Avis Europe. Dix ans plus tard, en prenant le contrôle de Belron, la société enregistrait l'arrivée dans son giron de Carglass et Autoglass, numéro 1 mondial de la réparation et du remplacement de vitrage automobile. Des options stratégiques qui ont fait prendre au D'Ieteren Group une autre dimension, une envergure internationale. "Je suis personnellement convaincu que les entreprises familiales ont cette capacité à réfléchir sur le long terme et à préparer l'avenir", confie Roland D'Ieteren pour expliquer ce succès. Car la réussite de son entreprise est aussi celle de sa famille. Celle d'une profession de foi pour un métier qui, chez les D'Ieteren, fait parler les lois du sang.
Ce métier justement, Roland D'Ieteren y tient. Et face à l'évolution de la distribution automobile, l'homme qui depuis trente ans préside aux destinées de la société affirme ses convictions. Notamment en ce qui concerne les réseaux multimarques qui commencent à fleurir. "Nous sommes nous-mêmes une organisation multimarque", reconnaît-il. "Mais chez nous, chaque marque a sa propre organisation. La logistique est commune, mais le reste est indépendant. C'est la seule manière de faire du bon travail", précise-t-il. "Je ne crois pas au multimarquisme qui mélange tout. C'est, certes, une facilité, mais ça ne permet pas de faire le métier à fond", ajoute-t-il encore. Car le service est au cœur de sa politique. Et représenter autant de marques donne une idée de la tâche qui incombe aux concessionnaires. Et à plus forte raison quand un groupe tel que le sien distribue des Volkswagen à côté de Lamborghini. "Chaque marque a ses particularités. Et je suis persuadé que pour offrir un service adapté au client, il faut être formé à toutes ces spécificités. Faire uniquement de la vente me paraît difficile. A terme, je ne vois pas comment on peut travailler de la sorte. Ce sont des supermarchés de l'auto qui n'offrent aucun service particulier", explique-t-il encore. Et, comme un point final à son argumentaire teinté d'une forte conviction : "Je reste persuadé que les concessionnaires exclusifs resteront la base de la distribution automobile." L'homme est on ne peut plus clair. Son métier est bien plus que de la vente. Une panoplie de certitudes qui symbolise ce caractère. Ce trait que la famille a su préserver et qu'aujourd'hui, à son tour, Roland D'Ieteren tente de transmettre, alors qu'arrive la septième génération. "J'espère qu'ils auront la force de s'attaquer à la gestion quotidienne de notre entreprise", conclut-il, le regard brillant. Comme cette flamme qui ne s'éteint pas depuis deux cents ans maintenant.
David Paques
ZOOMUne galerie royale Le roi des Belges ne s'y est pas trompé. La "New D'Ieteren Gallery" est un beau parterre de carrosseries. En inaugurant cette exposition le 16 mars dernier, son altesse Albert II est en effet venu honorer la famille de son goût pour le travail d'orfèvre. En deux cents ans d'existence, les D'Ieteren ont réalisé pas moins de 6 000 travaux de ce type. Et pour l'occasion, le groupe a mis les petits plats dans les grands en invitant la délégation royale à faire honneur à cet éventail de galbes qui ont marqué l'histoire automobile. Une centaine de voitures anciennes décorent ainsi les 4 000 m2 de la galerie. Toutes sont des modèles que la société a créés, assemblés ou distribués depuis sa naissance. Au programme : des Volkswagen, bien sûr, mais pas seulement, des Studbaker, des Imperia, des Excelsior, des Minerva, Panhard, de Dion, Porsche, Audi, Skoda, bref… toutes les marques sur lesquelles les D'Ieteren ont travaillé. Ce florilège est permanent et se doublera jusqu'au mois de juin d'une rétrospective des activités familiales. Le droit d'entrée servira, en outre, à financer certains projets avec la Croix Rouge de Belgique. |
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