“La franchise représente un moyen de développement et non un métier !”
JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Comment s’est comporté le secteur de la franchise en 2014 ?
RENÉ PRÉVOST. Encore une fois, la franchise a démontré qu’elle disposait des bons atouts et qu’elle continuait d’attirer. Ainsi, le nombre de franchiseurs enregistre une légère progression, passant de 1 720 à 1 796. Côté franchisés, les chiffres évoluent de 65 000 à 68 000. Quant au chiffre d’affaires, qui s’est tassé en 2013, il remonte de 48 à 51 milliards d’euros. La franchise représente donc un bon moyen pour une entreprise de se développer et d’être aussi performant qu’un commerce indépendant. Si on focalise sur l’automobile, ce secteur comptait 67 réseaux en 2013, contre 72 en 2014, mais le nombre de franchisés reste, lui, stable, à 7 400 environ. Le CA automobile atteint 2,475 milliards d’euros. Attention toutefois à ne pas perdre de vue que la franchise représente un moyen de développement et non un métier ! Et la crise a permis aux bons d’être encore meilleurs, mais les moyens le restent !
JA. Comment expliquer ces résultats ?
RP. La franchise a su s’adapter à la crise, en travaillant notamment sur ses charges et ses stocks, afin de maintenir sa marge d’exploitation brute. Dans la franchise, tout est normé pour que le benchmark du réseau permette de conserver une bonne rentabilité. Les concessionnaires doivent subir des charges lourdes, certes, avec un chiffre d’affaires très important, mais on se pose la question de savoir s’il s’agit d’un garage ou d’un produit financier ! Dans le cas de l’après-vente automobile, Internet a fortement impacté le marché, prenant des parts sur les centres-autos et les concessionnaires, les fast fitters et les MRA résistant bien. Là encore, la franchise auto s’est adaptée à cet environnement économique, mais il convient de rappeler que le prix n’intervient qu’en cinquième critère de choix d’un garage, la proximité primant, sans pour autant être déconnecté des prix du marché !
JA. Et dans le cas de Speedy, à combien se monte la rentabilité ?
RP. Chez Speedy, nous ciblons une marge brute d’exploitation de l’ordre de 57 %, 16 % sur l’ebitda. Il convient ensuite de retirer le salaire du gérant, et la rentabilité tombe ainsi à 10 %. Ces chiffres incluent que les investissements de départ ont été absorbés lors des deux premières années. La rentabilité de notre schéma reste forte, mais le point mort a augmenté. Cela provient de la transformation de notre concept. L’activité pneumatique a baissé, elle représente 40 %, tandis que les prestations mécaniques se développent, avec un poids de main-d’œuvre plus important ! A terme, nous devrons également investir dans la démarche d’éco-entretien, particulièrement avec le programme antipollution que la Ville de Paris vient d’entériner. En termes de résultats, sur décembre et janvier, nous avons connu deux mois d’embellie. Nous constatons que le parc auto vieillit, que les gens roulent moins et entretiennent moins leur voiture. Parallèlement, la montée en technologie des véhicules tend à faire baisser le “do-it yourself”, mais complexifie aussi, pour les réseaux, l’accès à la réparation, voire simplement aux informations techniques. Ce dernier point représente un vrai challenge pour nous, et nous traitons d’ailleurs uniquement avec des marques Premium, qui interviennent en première monte, afin de nous aider à intervenir sur tous les véhicules.
JA. Les candidats connaissent-ils bien les tenants et aboutissants de la franchise ?
RP. Ils se montrent particulièrement bien informés sur les points forts et les difficultés de la franchise. En revanche, ils ont tendance à oublier que la réussite d’un centre ne signifie pas que tous les centres vont réussir. Il convient de prendre le temps de bien se former avant de se lancer. Nous avons ouvert 39 nouveaux franchisés. La rentabilité s’obtient désormais avec un chiffre d’affaires annuel de 450 000 euros, contre 350 000 euros auparavant. Il convient plus que jamais de ne pas se tromper dans l’emplacement et dans les hommes ! Ce sont eux qui font toute la différence. Le métier de l’automobile ne laisse pas de place à l’improvisation et il convient de respecter le client final. Un client achète aujourd’hui de la mobilité avec sa voiture, et il veut donc que l’on traite son véhicule le plus rapidement possible, ou bien qu’on lui propose des alternatives pour ne pas compromettre sa mobilité.
JA. Comment se présente le salon de la Franchise ?
RP. L’édition 2015 paraît prometteuse, et l’automobile sera bien représentée, avec un nombre équivalent d’enseignes. La franchise intéresse d’ailleurs de plus en plus de professionnels de l’automobile, concessionnaires ou professionnels du VO, qui y voient une solution pour traiter les véhicules multimarques. Nous recrutons aussi beaucoup d’agents, qui ne peuvent pas supporter les coûts imposés par les constructeurs, avec une rentabilité très faible.
JA. La loi Macron est passée, avec des points qui impactent la franchise. Qu’en pensez-vous ?
RP. Ce n’est pas la première fois que nous sommes obligés de nous battre contre des lois qui ne correspondent pas à notre activité. Les politiques ont tendance à oublier que franchisés comme franchiseurs doivent être protégés. La loi Macron veut réduire la durée des contrats à six ans et retirer la protection du savoir-faire. Ce n’est pas très loyal car un franchiseur conserve pour son franchisé une zone d’exclusivité. Il faut conserver un équilibre contractuel avec des obligations pour les franchiseurs comme pour les franchisés. Et le fait de passer de neuf à six ans change la donne pour un banquier. Nous sommes sur des modèles économiques qui demandent du long terme avant de pouvoir être rentables. Que pensera la banque avec un engagement si court ? La Fédération française de la franchise se charge de réaliser une veille permanente sur ces sujets, et de se faire entendre si besoin est !
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