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Christophe Michaëli, BNP Paribas PF : "Aider nos partenaires à trouver les moyens de vendre mieux et plus"

Publié le 16 juin 2020

Par Catherine Leroy
6 min de lecture
Des offres de financement innovantes accompagnent la reprise de l'activité commerciale en concession. Le directeur du marché automobile en France de BNP Paribas PF revient sur les reports d'échéances proposés et leurs avantages pour la distribution automobile.
Christophe Michaeli, directeur du marché automobile en France de BNP Paribas Personal Finance.

 

Depuis la fin du confinement, les offres de financement qui décalent la première mensualité en 2021 se multiplient. Que signifie ce mouvement de grande amplitude ?

Etrangement, il est vrai que nous pouvons observer une certaine convergence d’offres de ce genre émanant aussi bien de la distribution que des constructeurs. Comme si en cette période, pour vendre des voitures, il fallait proposer aux clients de ne pas payer tout de suite. Cette tendance part de la volonté de rassurer le client. La mécanique pour celui-ci est simple : "J’achète maintenant et je verrai plus tard pour payer". Mais je pense fondamentalement que l’on ne peut pousser à acheter quelqu’un qui n’en a pas l’intention. Ces offres s’adressent avant tout à des clients qui ont l’intention d’acquérir une nouvelle voiture mais qui s’interrogent sur la pertinence du moment. C’est une réassurance pour l’acheteur. Comme tous les acteurs se sont engouffrés sur ce type d’offres, elles deviennent nécessaires mais pas forcément suffisantes.

 

BNP Paribas Personal Finance est présent dans de nombreux pays, avez-vous observé la même tendance dans d’autres pays ?

Le sujet est apparu dans tous les pays où nous sommes présents. C’est une offre qui donne un temps de respiration après la période difficile liée à la crise du coronavirus.

 

Quelle est la mécanique financière liée à ces reports de remboursements qui peuvent aller jusqu’à 6 mois ?

En LOA, lorsque le premier paiement est décalé de 6 mois, la mécanique consiste à offrir 3 mois de loyers et à en décaler 3 autres. En France, ce type de promotions est très encadré par la loi. L’article L312-10 du code de la consommation indique qu’il "est interdit dans toute publicité de mentionner l’existence de franchise de paiement de loyers ou de remboursement des échéances du crédit supérieure à trois mois." La LLD n’entre pas dans ce cadre.

 

Quels sont les avantages pour les réseaux de distribution ?

Ajoutées au dispositif gouvernemental, ces offres génèrent du trafic utile en concession. Le niveau des commandes est fort. Ce qui permet de reconstituer le portefeuille. C’est essentiel pour assurer le chiffre d’affaires des concessions et le mouvement des stocks dans les semaines et mois qui viennent. Ces offres doivent cependant toujours répondre aux besoins du client final.

 

Pour les sociétés de financement, cela peut-il augmenter le risque de fraude ?

La mécanique des offres de report n’encourage pas la fraude. Mais nous devons redoubler de vigilance pour éviter qu’elle ne retarde l’information et la prise en compte de la fraude. C’est ce que nous faisons…

 

BNP Paribas Personal Finance est partenaire du groupe BYmyCAR qui a lancé ces offres baptisées « Liberty Days » sur un choix de véhicules en stock avec la possibilité, en supplément, de restituer le véhicule avant le terme du contrat. Est-ce un risque plus important ?

C’est surtout une promesse très forte pour le client final. Le client a déjà la possibilité de restituer son véhicule en cours de contrat et que celui-ci soit soldé. Près de 70% des contrats sont ainsi soldés/renouvelés avant leur terme. C’est donc plutôt un dispositif qui complète la réassurance du client. Avec BYmyCAR, nous avons mis sur pied une offre forte et globale. Pas question de faire un "coup" mais réellement d’aller chercher des parts de marché.

Autre exemple, avec notre partenaire Honda Moto, nous avons lancé une offre très aboutie qui inclut l’assurance chômage. Les Français peuvent avoir peur de l’avenir et notamment des risques de chômage. Cela s’illustre notamment par la hausse du niveau d’épargne. Charge à nous de rassurer les clients et les conforter dans leur choix de ne pas retarder leur achat.

 

BNP Paribas Personal Finance est partenaire de constructeurs mais également de groupes de distribution. La même mécanique peut-elle s'appliquer sur ces deux catégories ?

Ce qui nous importe c’est de répondre aux attentes, parfois différentes, des deux ! Lorsque l’on agit en tant que captive, nous coconstruisons les offres avec les constructeurs. Notre rôle va au-delà des offres, et nous avons un vrai rôle de vigilance à jouer sur le niveau des stocks. Nous avons un rôle de modérateur car le risque est porté chez nous dans la plupart des cas. Mais les dialogues sont sains et les sujets, partagés. Pour les distributeurs, notre rôle est de les aider à vendre, de trouver les moyens qui leur permettent de vendre mieux et plus, de garantir leurs revenus, dans le temps. Pour les mois à venir, toutes les solutions peuvent envisagées.

 

Quelle est la situation économique de réseaux de distribution ?

Le point de vigilance, c‘est bien sûr la trésorerie ! Les mesures d’accompagnement (dont le PGE) ont permis d’apporter des solutions. Globalement, la distribution a été très réactive et a pu prendre les bonnes décisions de gestion. Notre stratégie consiste à accompagner chaque distributeur, chaque concession, chaque marque partenaire afin de les aider à générer du chiffre d’affaires et du revenu. Globalement, et c’est une grande force, les réseaux de marques sont sains et sortent d’une période favorable. Ils ont donc la capacité de résister même si nous n’avons pas assisté à de grandes améliorations en matière de fonds propres. La distribution automobile est bien mieux armée que pendant la crise financière de 2008 : elle plus concentrée, plus mature. Malgré tout, cela n’empêchera pas les difficultés et une accélération sans doute des opérations de croissance externe. Les banques sont prêtes à accompagner ces opérations de croissance.

 

La baisse du marché français qui est estimée aujourd’hui à 30 % peut-elle fragiliser les sociétés de financement ?

La crise aura un impact fort sur la rentabilité des établissements financiers, qui est déjà faible. Déjà la crise de 2008-2009 avait coûté 50bp de rentabilité aux sociétés de financement.
Le contexte est très différent. Depuis le déconfinement, le marché repart très fort. Nous devons cependant rester vigilant sur le coût du risque (acheteurs et vendeurs).
Tous les acteurs ne sont pas logés à la même enseigne. Ceux qui ont bâti leur modèle sur la croissance fort des volumes ou sur la clientèle des professionnels, plus affectée, craignent sans doute plus de risque. Mais les revenus d’une société de financement ne reposent pas sur la production immédiate mais bien sur l’encours. Les résultats 2020 seront sensibles à la charge du risque, le reste aura un impact dans le temps.

 

Est-il plus rentable pour une société de financement d’avoir des constructeurs comme partenaires ou bien des groupes de distribution ?

Nous prenons le meilleur des deux mondes. J’observe d’ailleurs que lorsqu’un constructeur organise un appel d’offre pour un partenariat financier, tous les acteurs y répondent. En réalité, l’apprentissage s’organise sur les deux fronts. Il faut un bon équilibre entre les deux catégories d’acteurs, cela permet d’anticiper les évolutions et les grandes tendances de fond. Un seul dénominateur commun : la rentabilité de la relation.

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