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Distribution

PSA résilie le contrat de plateforme PR du groupe Midi Auto en Bretagne, la justice est saisie en référé

Publié le 29 novembre 2018

Par Tanguy Merrien
5 min de lecture
Résilié brutalement de son contrat de plateforme PR PSA à Quéven (56), le groupe Midi Auto attendait ce 29 novembre 2018 la décision en référé du tribunal de commerce afin de pouvoir poursuivre son activité le temps de trancher le dossier sur le fond. Le président du tribunal a demandé quelques jours de réflexion.

 

Un coup de massue. Dans l’échelle des chocs psychologiques, sans doute aussi élevé que celui de l’arrestation de Carlos Ghosn à Tokyo, mais à la dimension d'un groupe de distribution automobile, en l’occurrence Midi Auto, dirigé par Bernard Hory.

 

Le lundi 12 novembre 2018, les huissiers, à la demande de PSA, arrivent à Quéven, dans le Morbihan, et réclament les livres de comptes de la société MA Pièces Autos Bretagne, une des 39 plateformes de distribution de pièces de rechange PSA en France, dont 28 appartiennent à des opérateurs privés. Deux jours plus tard, une lettre de résiliation à effet immédiat arrive par mail à 8h28. Une demi-heure plus tard, à 9h02, un second courriel arrive à l’ensemble des réseaux Peugeot et Citroën ainsi qu’aux présidents de groupement des agents des deux marques, pour leur notifier la résiliation de la plateforme et leur réaffectation auprès de celle de Brest.

 

Un choc pour Bernard Hory, président de Midi Auto, après 45 années de très bons et loyaux services auprès du constructeur. Le groupe, qui compte 25 concessions (sans les sites annexes) dont 12 Citroën, 6 Peugeot et 9 DS Store, se demande encore quelle faute a-t-il pu commettre ?

 

"Durant toute ma vie, j’ai eu le souci de la durée, des valeurs humaines, du partenariat. Toutes les affaires commerciales reprises, à la demande de Peugeot et de Citroën, perdaient de l’argent et jamais je n’ai licencié un salarié par manque de rentabilité. Nous avons travaillé dur pour que ce groupe puisse aujourd’hui afficher un chiffre d’affaires de 600 millions d’euros et une rentabilité de 2,5 % avant impôt", s’émeut le dirigeant quelques minutes avant l’audience de ce 29 novembre 2018 au tribunal de commerce de Paris pour le référé qui l’oppose au groupe PSA.

 

Etanchéité des plateformes PR pour la vente de pièces

 

Accompagné d’une cinquantaine de salariés venus spécialement de Quéven, Bernard Hory, défendu par Maître Renaud Bertin, attend avec anxiété le début des débats. A l’origine de ce procès, la plateforme de pièces PSA, pour laquelle il a été nommé le 1er juin 2017 dans le Morbihan, en même temps que celle de Limoges, à la demande du constructeur.

 

MA Pièces Autos Bretagne vend des pièces de rechange aux concessionnaires Peugeot, Citroën et DS qui ne sont plus distributeurs de pièces (ex-contrats DOPR), aux agents des deux marques Peugeot et Citroën, mais aussi aux réparateurs et revendeurs de pièces indépendants et notamment à la société Autopuzz, appartenant également au groupe Midi Auto, dont l'objet consiste à une activité de vente de véhicules d'occasion, de réparation et de vente de pièces au comptoir.

 

C'est justement cette activité de revente de pièces qui pose problème au groupe PSA. "Le groupe, qui n'est autre que le deuxième distributeur de véhicules Citroën en France, contourne sciemment son contrat de distributeur de pièces pour alimenter d'autres revendeurs, y compris sur Internet, tels qu'Amazon ou Cdiscount", attaque violemment Me Nathalia Kouchnir-Cargill, avocate du groupe PSA. Résiliée, "brutalement" selon l'expression du président du tribunal, la société MA Pièces Autos Bretagne n'a d'autre solution que de lancer une procédure d'alerte, en référé, afin de pouvoir poursuivre son activité le temps de traiter l'affaire sur le fond. Il en va également de l'emploi des 52 salariés de la plateforme "au moins pendant la période nécessaire à trancher l'affaire sur le fond ou trouver un accord, nous demandons la poursuite des relations commerciales contractuelles", réclame Me Renaud Bertin, avocat du groupe Midi Auto.

 

Délai de réflexion pour la décision en référé

 

Sur ce point, l'audience en référé n'a pas permis de trouver de réponse, le président ayant demandé quelques jours afin d'étudier un dossier pour le moins complexe. Une nouvelle fois, le cœur de l'affaire réside dans l'étanchéité des réseaux, du respect de ce point de la part de MA Pièces Autos Bretagne, mais également de PSA. Pour les avocats de PSA, Autopuzz (groupe Midi Auto) "utilise les moyens de PSA pour faire un commerce de pièces" et accuse Midi Auto de déloyauté envers le constructeur.

 

Midi Auto ne vend qu'une faible part des pièces d'origine Peugeot, émanant de la plateforme MA Pièces Autos Bretagne. Ce que ne manque pas de faire remarquer le président du tribunal : "Le chiffre d'affaires de la plateforme MA Pièces Autos Bretagne devrait s'élever à 30 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2018 alors que le résultat atteint 70 000 euros sur les sept mois de l'année. Autopuzz, quant à elle, affiche un chiffre d'affaires de 15 millions d'euros dont 3 millions seraient issus du commerce avec MA Pièces Autos Bretagne sur la même période de 2018." 10 % du chiffre d'affaires de la plateforme PR MA Pièces Autos Bretagne serait donc issu de la vente de pièces à Autopuzz. Une part qui a baissé à 5 % depuis la mise en demeure de PSA en septembre 2018. "Insuffisant", rétorque le représentant du service PR de PSA aux côtés de son avocate. "Ce serait une catastrophe vis-à-vis du réseau de garder un distributeur qui ne respecte pas les mises en demeure." En France, d'autres plateformes se seraient également vu notifier une mise en demeure de cesser une activité de revente de pièces. Une plateforme en Grande-Bretagne aurait également été résiliée.

 

Midi Auto serait donc le premier groupe à subir les foudres de PSA malgré les excellents résultats obtenus. "Notre plateforme a été reconnue comme la première en France en termes de satisfaction globale client, affirme Guillaume Ramirez, directeur de MA Pièces Autos Bretagne. Et notre chiffre d'affaires a progressé de 28 % à fin septembre alors que la moyenne nationale plafonne à 3 %." Présents à l'audience, quelques agents Citroën attestent de cette qualité de service et se retrouvent aujourd'hui dans l'incapacité de travailler avec MA Pièces Autos Bretagne. "Je suis tombé de ma chaise lorsque j'ai appris la nouvelle il y a deux semaines, explique l'un d'eux. Nous jonglons comme nous pouvons, mais c'est comme si on m'avait enlevé les caisses de l'atelier. Je ne sais même pas comment faire pour retourner des pièces sous garantie que j'avais achetées à MA Pièces Autos Bretagne. Notre collaboration était pourtant excellente."

Catherine Leroy

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