Prime à la conversion : les démolisseurs à bout de souffle
Si elle est une aubaine pour les automobilistes, la prime à la conversion engendre bien des difficultés dans de nombreux secteurs automobiles. Si, d’un côté, les concessionnaires qui avancent aux clients leur prime subissent les conséquences sur leur trésorerie, de leur côté les démolisseurs doivent faire face à leurs propres soucis. Dans un courrier envoyé au Premier ministre Edouard Phillipe, le CNPA alerte sur le dangereux déséquilibre qu’engendre la prime à la conversion sur l’activité des 1 708 centres VHU, chargés de démolir les vieux véhicules récupérés par les concessionnaires lors de l’achat d’un véhicule.
"Les centres VHU n’ont pas tous bénéficié de l’afflux de véhicules à détruire suite à la prime à la conversion, explique le CNPA. En résumé, tandis que certains centres ayant des relations privilégiées avec les concessionnaires et les réseaux se retrouvent complètement saturés, d’autres regardent les véhicules passer." Avec, en conséquence, un double problème : un déséquilibre dangereux dans l’activité des démolisseurs, mais aussi un processus de traitement des VHU ralenti, pénalisant au passage les concessionnaires.
Des dangers sur le respect de la valorisation
Officiellement, 240 000 demandes de prime à la conversion auraient été formulées jusqu’ici. Certains centres VHU auraient ainsi déjà doublé, sur les dix premiers mois de l’année, le volume de véhicules traités par rapport à celui de 2017. Résultat, des délais de traitement allongés. Alors que la réglementation fixe aux démolisseurs un délais de six mois pour traiter les véhicules, la surcharge de certains centres ferait peser le risque de dépasser ce temps imparti et de déclencher les sanctions. "Il ne faut pas non plus occulter le risque que ces véhicules soient aussi moins bien valorisés par manque de temps", note le CNPA, qui rappelle que, en 2017, selon l’Ademe, 9 millions de pièces de réemploi ont été générées par la filière.
Sans oublier que, selon la directive de 2015, la France doit atteindre 95 % de réutilisation et de valorisation de la masse du véhicule. Des VHU moins bien valorisés font courir le risque d’un taux bien inférieur avec, en conséquence, des sanctions de l’Union européenne.
Les concessionnaires pénalisés
Mais cette saturation de l’activité touche aussi les concessionnaires avec des délais de traitement allongés. Notamment pour ceux qui ne transfèrent pas directement leurs VHU aux centres, mais qui les font transiter par leur réseau, qui lui-même s’adresse ensuite aux centres VHU. "Les centres VHU surchargés ne peuvent plus venir récupérer les véhicules rapidement, les concessionnaires ne peuvent donc pas retirer le certificat de destruction qui leur permet d’être remboursés de la prime à la conversion. Et même une fois ce certificat retiré, les retards de paiement de la part de l’Etat existent, ce qui plonge les concessionnaires dans des difficultés de trésorerie délicates", détaille le CNPA.
Sans compter que certains centres VHU ont eu des difficultés à éditer des certificats de destruction alors que l’Etat n’aurait pas réussi à fluidifier certaines demandes d’agrément pour l’accès au SIV, agrément renouvelable tous les six mois.
Le CNPA appelle à une répartition plus naturelle de l'activité
"Les pouvoirs publics ont minimisé le volume de véhicules détruits et les fonds nécessaires. S’ajoute ce concours de circonstance non sans conséquences pour la filière, mais aussi les concessionnaires", pointe le CNPA, qui sollicite une rencontre avec Edouard Philippe pour échanger sur ces diverses problématiques.
"L’idée serait d’inciter les professionnels de l’automobile à remettre directement leurs véhicules aux centres VHU sans passer par le réseau. Et d'essayer ainsi d’équilibrer la répartition de l’activité entre les VHU, en privilégiant la carte de la proximité avec les concessions. Nous visons une répartition plus naturelle du commerce et regrettons que tout le monde n’ait pas sa part du gâteau", conclut le CNPA.
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