Présidentielle américaine : l'automobile, symbole du clivage entre Harris et Trump
Si l’automobile a cristallisé les débats lors des dernières élections européennes, il en est de même outre-Atlantique. L’élection présidentielle américaine qui aura lieu le 5 novembre 2024 est sur le point d’aboutir après des mois de campagne tendue et pleine de rebondissements. D’un côté, Kamala Harris, l’actuelle vice-présidente des États-Unis candidate démocrate, et de l’autre, Donald Trump, ancien président des États-Unis et candidat républicain. Deux prétendants au titre que tout oppose, y compris dans le secteur automobile, où les visions diffèrent clairement.
Kamala Harris, dans la continuité de Joe Biden
Selon les attentes des spécialistes du secteur, la politique de la candidate démocrate devrait coller à celle de l’actuel président des États-Unis, Joe Biden, sur les grands enjeux automobiles. Durant les quatre dernières années, ce dernier s'est illustré par son soutien au véhicule électrique via des incitations dans leur production ou à l’achat par le biais de crédits d’impôt.
De nouvelles normes ont d’ailleurs été publiées durant son mandat, visant à éviter 7,2 milliards de tonnes de CO2 d'ici à 2055, selon l’Environment protection agency (EPA). Notons que l’Inflation réduction act (IRA), la loi visant à réduire l’inflation, a permis plus de souplesse dans l'achat d'un véhicule électrique. Avant son élection en 2020, les voitures électriques représentaient aux États-Unis 1 % des ventes en 2019 contre 8 % en 2024, selon le cabinet Cox Automotive.
Au cours du mandat Biden, Kamala Harris a toujours affiché son soutien aux mesures en faveur de l’environnement. Rappelons que l’actuelle vice-présidente a coparrainé le Green New Deal en 2019, ce plan visant à faire tourner les États-Unis à l’énergie propre en dix ans. Naturellement, la candidate à la présidentielle américaine soutient fermement les véhicules électriques et ne s’en est pas caché durant sa campagne en promettant des investissements massifs sur le sujet.
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Parmi les électeurs convoités, les ouvriers du secteur automobile, en particulier ceux travaillant à Detroit, capitale américaine historique de la voiture et fief de grandes marques comme General Motors, Ford ou encore Chrysler, revêtent une importance stratégique. La ville est d’autant plus importante qu’elle se situe dans l'État stratégique du Michigan, qui pourrait inverser la vapeur dans ces élections et qu'on appelle "Swing State".
À cet égard, la candidate démocrate semble, sur le papier, avoir remporté l’adhésion de cette frange de la population. En effet, en tant que digne héritière de Joe Biden après son retrait surprise le 21 juillet 2024, Kamala Harris peut compter sur le soutien de l’United auto workers (UAW), le principal syndicat automobile des États-Unis, notamment par l’intermédiaire de Shawn Fain, son président. Ce dernier fait campagne pour elle et assure que tous les membres du syndicat voteront pour la vice-présidente. Joe Biden s'est souvent rallié aux syndicats en les soutenant notamment sur le piquet de grève.
Donald Trump entre chien et loup vis-à-vis de l’électrique
Fervent "écolosceptique", le candidat républicain souhaite que la voiture, reste thermique et compte revenir sur les mesures de Joe Biden en faveur de la transition énergétique. Donald Trump s’est montré très acerbe en ce qui concerne le mandat de l’actuel président. Il assure que la politique de Joe Biden et le programme de Kamala Harris n’a pas d’avenir en matière d’emploi et ruine le secteur automobile américain en laissant la part belle à la Chine. "Je mettrai fin au mandat des véhicules électriques dès le premier jour, et je sauverai ainsi l’industrie automobile américaine de l’anéantissement, qui se produit en ce moment, et économiserai aux clients américains des milliers et des milliers de dollars par voiture", a lancé l’ex-président des États-Unis lors de la convention des Républicains.
Pourtant, Donald Trump se montre moins radical sur le sujet de l’électrification lorsque son soutien majeur, Elon Musk, fait campagne à ses côtés. "Je suis pour les voitures électriques, je dois l'être parce qu'Elon m'a fortement soutenu" avait-il même déclaré lors d’un meeting à Atlanta le 3 août 2024. Si le candidat a pu tenir des propos très durs à l’encontre des véhicules à batterie, dans un entretien accordé à Reuters, l’ex-président des États-Unis a légèrement nuancé ses propos, affirmant être "un grand fan" des voitures électriques, mais qu’elles resteront cantonnées à un marché restreint.
Néanmoins, selon les spécialistes de l’automobile, un rétropédalage en ce qui concerne l’électrification semble peu probable. "Les perspectives d'un retour en arrière marqué ne sont pas envisageables, car des montants très importants ont déjà été investis", assure Mike Jackson, un responsable de l'Association des fournisseurs d'équipements à l’AFP.
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Si l’UAW se place aux côtés de Kamala Harris en revenant sur le potentiel de sa politique, le syndicat se montre beaucoup moins tendre à l’égard du candidat républicain. "La voie à suivre est claire : nous battrons Donald Trump et son programme de milliardaire et élirons un champion de la classe ouvrière à la plus haute fonction de ce pays", peut-on lire sur un communiqué daté du 21 juillet 2024 à la suite du retrait de Joe Biden.
Mais Donald Trump rend coup pour coup en appelant au licenciement de Shawn Fain en juillet. Preuve d’une élection sous tension, des membres de l’UAW et des ouvriers automobiles ne s’accordent pas avec cette voix commune et s’activent pour la campagne du candidat républicain de leur côté. À l’image de Brian Pannebecker qui gère un groupe Facebook intitulé Ouvriers de l'automobile pour Trump (Auto workers for Trump 2024). Ce dernier s’étant exprimé avec Donald Trump lors de rassemblements dans le Michigan.
Des violons qui s’accordent sur les taxes
La vision diffère concernant l’avenir du véhicule électrique, mais les deux candidats s'accordent sur un point : les taxes douanières à destination des entreprises chinoises. En effet, depuis plusieurs années, les États-Unis et la Chine entretiennent des relations conflictuelles d’un point de vue commercial.
Au cours de son mandat, Joe Biden a augmenté les droits de douane sur les véhicules électriques chinois en mai 2024, mesure déjà mise en place par Donald Trump au cours de son mandat. Kamala Harris a soutenu le fait de protéger le pays contre "des pratiques commerciales injustes" en provenance de la Chine.
Sur la méthodologie, en revanche, la vice-présidente ne donne pas plus de précisions. Elle conservera sans doute les taxes déjà en vigueur sur les produits d’importation chinois, comme l’estiment plusieurs spécialistes.
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Souhaitant mener une politique protectionniste, Donald Trump trouve que ces taxes douanières ne sont pas suffisantes. Le candidat républicain a déjà précisé qu’il comptait imposer à plus de 60 % tous les produits en provenance de l’empire du Milieu… y compris les véhicules électriques, bien évidemment.
Plus globalement, le candidat républicain a précisé auprès de nos confrères du Time Magazine qu’il souhaite imposer l’import de marchandise à hauteur de 10 %.
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