Le Brexit pourrait avantager les constructeurs chinois sur le marché anglais
Au 1er janvier 2024, les droits de douane entre le Royaume-Uni et l'Union européenne vont-ils grimper à 10 % ? C'est toute l'inquiétude des industriels automobiles. Ces derniers s'alarment aujourd'hui de l'absence de règlement de ce dossier qui pourrait mettre à mal les échanges entre les deux parties.
Jusqu'au 1er janvier 2024, les accords du Brexit prévoyaient une exonération réciproque des droits de douane pour un véhicule électrique à condition que la batterie ainsi que certains matériaux critiques de ces batteries soient produits ou assemblés dans l'Union européenne, ou au Royaume-Uni. Cette décision prend fin dans près de six mois sans que l'une ou l'autre des deux parties ne puissent à ce jour répondre à ces critères.
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" Il existe des projets à Dunkerque et dans le Nord de la France mais cette échéance arrive trop vite. Les successions de crises vécues par l'industrie automobile depuis la pandémie ont entraîné des retards. Sans révision de cette règle, au 1er janvier 2024, les échanges entre l'Union européenne et le Royaume-Uni, dans les deux sens, seront taxés à hauteur de 10 %", résume Marc Mortureux, directeur général de la PFA.
La Chine en serait le premier bénéficiaire
Selon une lettre rédigée par l'association des constructeurs européens (ACEA) si "les mesures restrictives sont appliquées à partir de janvier 2024, comme prévu, les droits de douane coûteraient près de 4,3 milliards d’euros aux constructeurs de l’UE sur une période de trois ans, entre 2024 et 2026."
Sur le marché anglais, 47 % des véhicules électriques viennent de l'Union européenne contre 32 % pour la Chine. Les marques chinoises seraient d'ailleurs les principales bénéficiaires de cette règle. En effet, la Chine et le Royaume-Uni, ont, de leur côté, signé un accord de non-taxation des importations chinoises à destination de la Grande-Bretagne.
"Ce n'est pas un petit enjeu", prévient Marc Mortureux. "La Grande-Bretagne est le premier pays d'exportation de l'Union européenne. Ces 10 % de taxe vont peser plusieurs milliards d'euros au secteur. Le but n'est de renvoyer sine die cet accord mais sans doute de le décaler de trois ans, le temps de la montée en puissance des gigafactory sur le sol européen et de la mise en place d'une filière pour l'assemblage des CAM (Cathode Active materials) en Europe."
Les constructeurs par la voie de l'ACEA mais aussi la PFA ou encore le VDA (syndicat allemand) ont écrit à Bruno Le Maire, ministre de l’Économie en France et Robert Habeck, vice-chancelier et ministre fédéral de l'Économie et du Climat allemand, pour demander un ajustement de ces règles.
Des règles contreproductives
À travers cette lettre, les signataires Luc Chatel, président de la filière automobile et mobilités, et son homologue allemand, Hildegard Müller, président de Verband der Automobilindustrie démontrent qu’appliquer cette taxation aux seuls industriels européens équivaut à se tirer une balle dans le pied pour parvenir aux objectifs climatiques de l'UE et mondiaux.
En effet, la filière électrique, qui rencontre déjà des difficultés en raison de l’impact de la pandémie sur la chaîne d’approvisionnement, de la hausse des prix de l’énergie et des matières premières et de la pénurie de matériaux de construction dans le contexte de la guerre en Ukraine, ne doit pas être davantage entravée pour espérer connaître l’essor escompté.
En l'état actuel, ces règles mettraient non seulement à mal la compétitivité européenne, mais présenteraient également "un véritable risque pour la montée en puissance de l'électromobilité. (...) La réduction du volume des ventes sur le marché britannique entraînerait une réduction correspondante du volume de production dans l’UE ainsi qu’une réduction des achats de biens auprès des fournisseurs européens de batteries. L’ensemble de la chaîne de valeur européenne de la transition verte serait donc affecté négativement", alertent les auteurs de la lettre.
Dans l'idéal, les représentants de l'industrie automobile souhaiteraient un report à 2027 de ces règles.
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