La pièce captive doit-elle le rester ?
Invité à discuter sur la compétitivité et l’avenir de l’industrie française, le CCFA (Comité des constructeurs français d’automobiles) explique que la protection juridique des créations de design automobile des pièces de carrosserie reste plus que jamais indispensable au maintien de la compétitivité de l’industrie automobile française. Une position qui mérite explication, à l'heure où beaucoup de pays d'Europe ont ouvert ce marché à tous, et où la question se pose de plus en plus en France.
En fait, le CCFA affirme que l'ouverture des marchés reviendrait à décourager l'innovation. En gros, le risque serait donc grand de voir la créativité française fondre comme neige au soleil si l'on n'en retirait pas les fruits financiers…
Le CCFA brandit le spectre de la délocalisation devant les pouvoirs publics, déclarant que la fin de la protection juridique est "un contre-sens dans le débat sur le Produire en France" et risque de menacer "des milliers d’emplois industriels". Un phénomène qui n'a pu être observé dans les autres pays d'Europe où la pièce de carrosserie a été libéralisée, affirme à contrario la Feda. (ndlr : si beaucoup de pays d'Europe ont choisi de libéraliser, les pays des BRIC, le Japon, la Corée du Sud ou l'Allemagne n'ont pas ouvert le marché).
En guise d'épilogue, le CCFA ajoute que le dispositif de pièce de carrosserie captive assure aux groupes automobiles l’amortissement de leurs investissements en recherche et développement, tout en omettant de préciser qu'il leur offre aussi la possibilité de spéculer sur le marché, en appliquant des politiques tarifaires calquées sur leurs envies et besoins, sans risque de se voir opposer de concurrence.
Enfin, et c'est peut-être là le véritable argument qui mériterait débat entre les parties, les constructeurs et leurs réseaux ont l’obligation légale d’assurer à leurs clients la disponibilité des pièces dix ans après la fin de vie d’un véhicule. Ils sont donc tenus de stocker des pièces à très faible rotation, tandis qu'il y a fort à parier que les producteurs et distributeurs indépendants, soumis à aucune obligation sur le sujet, se concentreraient sur le 80/20. Le débat reste entier et, devant les levées de boucliers consécutives aux hausses de prix constatées ces dernières années sur de nombreuses pièces de carrosserie, les constructeurs auraient pris un "engagement en faveur d’une politique de modération tarifaire des pièces protégées". A suivre au fil du cordeau.