S'abonner
Distribution

“Les distributeurs automobiles jouent un rôle fondamental dans l’économie américaine”

Publié le 24 juin 2015

Par Tanguy Merrien
8 min de lecture
Pour la première fois en France, William C. Fox, le président de la NADA, l’équivalent outre-Atlantique du CNPA, s’exprime dans les colonnes d’un magazine automobile professionnel. L’occasion de décrypter le système de distribution en vigueur aux USA, d’analyser la situation des concessionnaires, de leurs concédants, sans oublier de se pencher sur les velléités d’entrée de nouveaux acteurs ou de l’évolution des nouvelles technologies. Passionnant.
William C. Fox, président de la NADA.

JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Pouvez-vous avant toute chose présenter la NADA et son rôle en tant qu’association nationale des distributeurs américains ?

WILLIAM C. FOX. L’histoire de la NADA (National Automobile Dealers Associations) a débuté en 1917, quand 30 concessionnaires automobiles se sont rendus à Washington D.C. pour convaincre le Congrès américain de ne pas taxer la vente de produits automobiles de luxe. Pour atteindre leur but, ces concessionnaires avaient mentionné que l’achat d’un véhicule par un particulier était un symbole de l’”American way of life” et non pas un signe ostentatoire de richesse. C’est de cette histoire qu’est née la NADA. Aujourd’hui, l’association représente plus de 16 100 concessionnaires VP et VI à travers les Etats-Unis.
La principale mission de la NADA est de protéger et de défendre les intérêts des distributeurs. Pour cela, nous travaillons étroitement avec les autorités américaines et les informons parallèlement du rôle fondamental joué par les distributeurs dans l’économie américaine.
Par ailleurs, la NADA tient chaque année sa convention nationale, laquelle est considérée comme l’événement automobile de l’année aux Etats-Unis. Ces conventions se tiennent à tour de rôle dans les villes de la Nouvelle-Orléans, San Francisco et Las Vegas, et réunissent plus de 25 000 professionnels du secteur, à commencer par les distributeurs et les directeurs de concessions, mais aussi les constructeurs, les équipementiers ou encore les médias. En outre, chaque année, plus de 2 000 distributeurs étrangers venant de 35 pays différents nous rejoignent pour y participer. L’an prochain, notre convention annuelle se tiendra à Las Vegas du 31 mars au 3 avril 2016.

JA. Depuis quand travaillez-vous au sein de la NADA ?

WCF. Je ne suis président de la NADA que depuis 2015, je suis membre du board depuis 2006 et, dès lors, je n’ai jamais cessé d’être un membre actif de l’association en participant notamment à de nombreux comités.

JA. Comment avez-vous débuté dans le secteur de la distribution automobile ?

WCF. Avec ma sœur, nous avons acheté une petite concession Chevrolet à Weedsport, dans l’Etat de New York, il y a quarante ans de cela. Au fil des années, nous avons développé nos affaires en reprenant plusieurs panneaux de marques américaines et importées. Aujourd’hui, nous sommes associés au sein du groupe Fox Dealerships, Inc., que nous dirigeons ensemble et avec lequel nous possédons quatre affaires dans les villes de Phoenix et Auburn, toujours dans l’Etat de New York, distribuant les marques Chevrolet, Chrysler, Dodge, Honda, Jeep, Ram, Scion, Subaru et Toyota.

JA. Quels sont l’importance de la NADA et son rôle auprès des distributeurs aux USA ?

WCF. J’ai réalisé combien la NADA était importante et le soutien qu’elle apporte notamment pendant la dernière crise économique et financière. En tant que président, je travaille sans discontinuer pour assurer ce rôle prépondérant de la NADA auprès des concessionnaires automobiles américains, et faire de cette entité la seule et unique voix de tout un secteur. En outre, nous préparons l’avenir des générations actuelles afin que ces dernières aient les mêmes opportunités que celles que nous avons connues par le passé. Nous continuerons de défendre fortement les intérêts des concessionnaires et du système actuel, lequel reste pour moi le meilleur et le plus efficace non seulement pour les distributeurs et les constructeurs, mais aussi pour les particuliers.

JA. Quels sont vos objectifs pour aider les concessionnaires automobiles dans les prochaines années ?

WCF. Il y a plusieurs questions importantes qui sont posées aujourd’hui au sein de la NADA. Une de nos priorités est de faire en sorte que les concessionnaires restent compétitifs au niveau des prix et réussissent à proposer des prêts automobiles attractifs à leurs clients. Le marché américain du financement automobile a toujours été très concurrentiel et nous voulons que cela perdure. Quand les banques, établissements de crédits et autres captives se battent pour le meilleur du secteur, ce sont avant tout les clients qui gagnent.
La NADA est par ailleurs très active auprès du Congrès, militant pour une réglementation capable d’annuler les mauvaises prestations de financement par le Bureau de la Protection financière du Consommateur de manière à ce que les prêts automobiles restent toujours abordables pour les acheteurs.
Nous mettons également en avant les avantages des réseaux de distribution : pour nous, les concessionnaires restent le meilleur choix possible aussi bien pour le consommateur que pour le constructeur. Plus il y aura de distributeurs, plus le client en sortira gagnant. De plus, la présence d’un distributeur dans une économie locale est un atout, ne serait-ce que pour tout ce qu’elle génère. En juin 2014, la NADA a lancé son initiative “Get the Facts” afin d’informer les consommateurs, les politiciens et les médias sur les nombreux avantages que comportent les réseaux de distribution. Une série de vidéos, de chiffres clés et de graphiques sont d’ailleurs disponibles sur www.nada.org/getthefacts.

JA. Le système de distribution est aujourd’hui en pleine mutation aux Etats-Unis, mais aussi en France. Comment ce système peut-il s’améliorer dans le futur ?

WCF. La vente en ligne ainsi que le marketing digital sont en constante évolution. Internet et les avancées technologiques présentent de nouvelles méthodes concernant la gestion des stocks, la distribution des véhicules et la manière dont on interagit avec nos actuels et futurs clients sur une base quotidienne. Les acheteurs de voitures demandent de la transparence. Les concessionnaires cherchent à accélérer les procédés de livraison et d’achat. Tout dépend de la manière dont nous intégrons ces nouvelles technologies, avec pour objectif ultime d’améliorer l’expérience d’achat des clients.

JA. Nous avons vu dernièrement certains milliardaires tels que Warren Buffet, George Soros ou encore certains fonds privés prendre position pour devenir distributeur automobile. Comment interprétez-vous l’entrée de ces nouveaux acteurs ?

WCF. Le 31 mars dernier, Warren Buffet a participé à une convention organisée en commun par la NADA et JD Power Automotive à New York. Au sujet de l’acquisition du groupe Van Tuyl par Berkshire Hathaway’s, sa propre holding, Warren Buffet avait déclaré qu’il restait entièrement optimiste et confiant quant au système actuel de distribution automobile. “Le système de distribution actuel fonctionne bien pour les constructeurs, pour les distributeurs et le client. Depuis longtemps maintenant, quand un système de distribution devient si établi, c’est qu’il n’y a aucune raison d’en changer”, avait-il d’ailleurs déclaré.

JA. Tesla a déclaré préférer vendre directement au consommateur plutôt que de compter sur un réseau de distribution. Que pensez-vous de cette position ? N’est-elle pas contraire aux valeurs que vous défendez au sein de la NADA ?

WCF. La vente directe aux consommateurs élimine de facto la concurrence des prix et désavantage le client. La NADA croit assurément que le système de distribution reste le meilleur possible pour vendre des véhicules et délivrer les services attenants. En revanche, la vente directe au consommateur ne permet pas de délivrer ces services et c’est pourquoi notre rôle est quoi qu’il arrive de faire pression sur le gouvernement pour que ce système perdure dans le temps, car il sert de la meilleure façon les intérêts du consommateur américain.

JA. Quels sont, selon vous, les bouleversements ou du moins les principales modifications qui peuvent survenir ces prochaines années ?

WCF. Ces dernières années, nous avons fait face à une concentration du marché et avons subi le départ de nombreux distributeurs. Les concessionnaires américains ont su faire face à la récession économique, à la crise du crédit et aux faillites de certains constructeurs, toujours en s’adaptant et en relevant les nombreux défis qui s’offraient à eux. Quant aux éventuels bouleversements, ils viendront en premier lieu des évolutions et des attitudes des clients vis-à-vis de l’automobile et de l’importance donnée aux nouvelles technologies.

JA. Quelles sont les principales différences entre le système de distribution américain et celui existant en Europe ? Quelles sont les forces et faiblesses de chaque côté de l’Atlantique ?

WCF. Les modèles de distribution sont sensiblement similaires à travers le monde. Les constructeurs ont fait en sorte que les accords passés avec les distributeurs permettent à ces derniers de réaliser toutes sortes d’investissements dans leurs affaires. Toutefois, la plus grande différence entre le système de distribution américain et européen se situe au niveau des lois qui protègent les concessionnaires car celles-ci dépendent des Etats et ne sont pas forcément les mêmes selon les pays. Pour la NADA, chaque opérateur réalisant un investissement dans la distribution automobile devrait être protégé par des lois plus strictes et uniformes. Les gouvernements doivent comprendre que les distributeurs investissent massivement à travers le monde et stimulent donc l’économie, aussi bien au niveau local que national.
 

Vous devez activer le javacript et la gestion des cookies pour bénéficier de toutes les fonctionnalités.
Partager :

Sur le même sujet

cross-circle