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Vers un marché étale en 2015

Publié le 4 février 2015

Par La Rédaction
11 min de lecture
L’année 2014 aura été marquée par un rebond très timide des immatriculations, à l’avantage des marques françaises, principalement Renault. Et selon les prévisions d’IHS, aucune embellie majeure n’est à attendre en 2015.
Renault Espace

(Nota bene : les estimations chiffrées d’IHS que nous publions sont encore en cours de validation et donc susceptibles d’évolutions).

2014 conduit à tirer des conclusions structurelles sur le marché français

Comme prévu, l’exercice 2014 n’a pas été aussi mauvais que le millésime 2013 pour les ventes de véhicules légers neufs en France, mais le scénario optimiste d’un rebond plus marqué ne s’est pas non plus réalisé. Ainsi, le marché VL progresse seulement de 0,5 % par rapport à 2013, pour s’établir à 2 167 978 unités contre 2 157 790 il y a un an. Pour les seuls véhicules particuliers, la croissance est encore plus ténue car elle s’est limitée à + 0,3 %, pour un total de 1 795 885 immatriculations, soit 5 429 unités de plus qu’en 2013. Bien que cela ne recouvre qu’une valeur symbolique, le marché demeure donc sous le seuil de 1,8 million d’unités. “Cela ne constitue pas une surprise et en volume, les résultats sont proches des prévisions que nous faisions il y a un an, sans prendre en compte les ajustements que nous avons effectués en cours d’exercice”, commente Carlos Da Silva, analyste chez IHS, avant de poursuivre : “Nous avions touché le fond en 2013 et une légère reprise était attendue pour 2014, même s’il faut reconnaître que le second semestre et tout particulièrement le dernier trimestre n’ont pas généré les résultats escomptés. Au final, on peut clairement parler d’année en demi-teinte”. Pour autant, il ne convient pas nécessairement de se montrer alarmiste par rapport au sévère décrochage du mois de décembre (- 6,8 % en VP et – 4,5 % en VP&VUL). “Nous ne tablions pas sur un repli d’une telle ampleur, mais ce n’est pas fondamentalement une surprise, car depuis près de cinq ans, les données du mois décembre étaient parasitées par les effets d’anticipation liés à un dispositif du bonus-malus qui changeait régulièrement. On ne peut donc pas en conclure que le mois de décembre condamne l’exercice 2015 par avance”, nuance ainsi Carlos Da Costa.

En somme, l’année 2014 restera frappée du sceau de la déception, car les nouveaux produits ne manquaient pas, notamment sur les importants segments A et B, mais sans créer une véritable et significative dynamique. De même, un produit décalé, clivant et enthousiaste comme le Citroën C4 Cactus n’a pas eu l’impact que l’on pouvait espérer. Nous pouvons donc désormais en tirer des conclusions structurelles sur le marché français et Carlos Da Silva ne s’en prive pas : “On peut estimer que ce volume de ventes constitue le niveau étalon de notre marché, au-delà de quelques variations. De plus, il semblerait que le produit automobile en tant que tel n’est plus aussi à part qu’auparavant pour les consommateurs”. En outre, si le marché français avait donné des signes de reprise encourageants au premier semestre, il s’est ensuite rétracté, contrairement aux autres grands marchés européens. Autre spécificité française, il y a un réel souci avec la confiance des ménages, ces derniers faisant montre d’une grande prudence. “En fait, c’est la vraie question posée pour 2015 : les Français vont-ils rester très prudents et continuer à privilégier l’épargne ?”, lance Carlos Da Silva, avant de revenir, lui aussi avec prudence, à des perspectives plus réjouissantes : “Nous pensons cependant qu’on peut s’attendre à une évolution positive du marché dans la deuxième partie de l’année 2015. Notamment quand certaines réformes se seront en partie concrétisées, comme la loi Macron par exemple. Mais nous mettons quand même cette vision au conditionnel”.

La France est-elle vraiment le mauvais élève de l’Europe ?

Une idée fréquemment mise en avant voudrait que la France soit le mauvais élève de l’Europe et le seul marché à ne pas suivre la reprise automobile de la zone. C’est sans doute aller bien vite en besogne et une prise de champ élargie permet de relativiser cet anathème. Ainsi, alors que certains pays voisins s’effondraient après la crise, dans des proportions vertigineuses pour l’Espagne et l’Italie, la France battait des records de ventes dans le cycle post-crise, 2009 étant un bon exemple. Le marché était certes sous perfusion, mais d’autres pays ont aussi eu recours aux aides d’Etat. “Il faut aussi reconnaître que le marché allemand, caractérisé par une part importante de ventes tactiques, environ 40 % contre 20 % en France, a connu un rythme irrégulier en 2014”, ajoute Carlos Da Silva. En somme, l’Espagne et à un degré moindre, l’Italie enregistrent des croissances marquées parce qu’ils reviennent de loin et l’Allemagne et le Royaume-Uni bénéficient d’un environnement économique plus favorable. Et selon Carlos Da Costa, il ne faut pas s’attendre à un miracle sur les marchés européens : “La progression des ventes va se poursuivre, mais d’une manière modérée, tout simplement parce que nous avons affaire à des marchés matures, dépendants du renouvellement et d’un vieillissement de la population”. De surcroît, il n’y a pas qu’en France que la crise a entraîné une reconsidération du poste budgétaire automobile par rapport au budget global des ménages. D’ailleurs, Carlos Da Silva voit même déjà plus loin : “Alors qu’on peut envisager des progressions des ventes de 1 à 2 % dans les prochaines années, il faut aussi garder à l’esprit qu’à moyen terme, dans l’intervalle 2020-2025, un processus de démotorisation se produira en Europe”.

Fortunes diverses pour les marques françaises

L’examen de l’année 2014 en France met aussi en évidence que l’effet “nouveautés” tend à s’essouffler. Un phénomène qui concerne aussi les modèles phares sous l’effet de la multiplication et de l’hybridation des segments et des silhouettes. Toutefois, on retrouve un réel impact des nouveaux produits sur le segment porteur des crossovers. C’est notamment le cas pour Renault avec le blockbuster Captur. “Le niveau de ventes du modèle dépasse les objectifs initiaux que la marque avait fixés et on constate aujourd’hui qu’il y a quasiment un Captur vendu pour deux Clio vendues”, souligne Carlos Da Costa. Au-delà du Captur, Renault doit composer avec une gamme vieillissante et se concentrer sur deux lancements de premier ordre : le cousin du “Qashqai”, qui devrait donner du souffle à la marque, et l’Espace, qui ne bouleversera pas les volumes de ventes mais recouvrera une valeur symbolique et d’étalonnage par rapport à une légitimité Premium. “Faisant partie des gagnants de l’exercice 2014, Renault va donc devoir gérer deux lancements importants en 2015, tandis que 2016 sera l’année névralgique pour le juge de paix des volumes”, synthétise Carlos Da Silva, tout en indiquant que Dacia, valeur sûre, devrait poursuivre sur sa lancée. Toujours au registre des marques françaises, la situation est beaucoup plus contrastée chez PSA. “2015 et 2016 risquent d’être des années difficiles pour les trois marques du groupe”, avance Carlos Da Costa. Chez Peugeot, peu de nouveautés au programme et des modèles trop sages ou en cycle de vie avancé. Pour Citroën, peu de nouveautés aussi et un doute sur la capacité du C4 Cactus à séduire enfin largement. Et que dire de DS, arc-boutée sur la seule DS3, de surcroît vieillissante. “La DS3 est le seul modèle qui fonctionne en Europe et il s’agit de faire vivre le modèle jusqu’en août 2018… Même s’il y aura des lancements dans l’intervalle, c’est long ! Il va falloir apprendre à faire le dos rond”, met en garde Carlos Da Silva, avant d’ajouter : “La stratégie du groupe n’est pas en cause, dans la mesure où les équipes ont montré qu’on pouvait créer un interstice dans le Premium, mais le manque de ressources est un handicap très lourd, surtout dans ce périmètre. De plus, le Premium ne se limite pas au design et réclame aussi des innovations technologiques, souvent coûteuses à développer. Dès lors, il y a un vrai risque de voir la marque DS s’étioler en Europe”.

Les généralistes font grise mine

Pour les autres généralistes, c’est plutôt la soupe à la grimace, surtout que leurs concurrents français ont regagné des parts de marché, et la revue de troupe n’est guère engageante. Chez Fiat, malgré un volume conséquent de ventes tactiques, les résultats ne sont pas bons et en l’absence d’un plan “produits”, il est difficile d’envisager des lendemains qui chantent à court terme. Ford est encore à la peine, tandis que la progression d’Opel est un peu en trompe-l’œil si on se réfère à son volume de ventes tactiques. La marque à l’éclair peut néanmoins compter sur un plan “produits” attrayant à court terme. Dans des proportions différentes, Kia et Hyundai se retrouvent en délicatesse, ce qui ne constitue pas à proprement parler une surprise dans la mesure où leurs ventes n’étaient pas aussi “saines” que certains voulaient le faire croire. S’ajoute à cela le traditionnel effet de palier après un cycle de forte croissance. Selon Carlos Da Silva, “même s’ils sont abrupts, les ajustements actuellement mis en œuvre chez Hyundai France sont les bons”. Enfin, même Volkswagen a marqué le pas, de manière très relative s’entend, ce que confirme Carlos Da Silva : “Même quand la situation n’est pas très favorable, Volkswagen demeure très solide, en pouvant s’appuyer sur des valeurs sûres comme la Golf ou la Polo. Si la marque n’a pas été aussi conquérante qu’elle le souhaitait, c’est aussi parce qu’elle est restée fidèle à ses principes, notamment en termes de rentabilité. Pour 2015, Volkswagen va encore pâtir de son manque de crossover sur le segment B. Par conséquent, ce sera un exercice sans euphorie, mais sans grand risque non plus”.

Quand le Premium tire son épingle du jeu par le bas

Alors que les perspectives du Premium semblaient contrariées par le malus, force est de reconnaître que ce segment historiquement réduit en France a fait preuve d’une grande résistance. “En revanche, ils s’en sortent plutôt par le bas, c’est-à-dire par leur entrée de gamme”, modère Carlos Da Silva. Mercedes-Benz, sans grande surprise, a tiré profit de son nouveau langage stylistique, à nouveau différenciant, et de son duo Classe A / GLA. De son côté, Audi a un peu marqué le pas, mais la marque a vraisemblablement atteint un palier après des années de croissance. “Cela reste tout de même très solide, avec un strict respect du principe de rentabilité, et Audi a d’ores et déjà ouvert une nouvelle phase, au niveau du design, donc il n’y a pas d’alerte particulière”, indique Carlos Da Silva. Enfin, si on peut estimer que les voyants sont au vert pour Volvo et surtout Porsche, attardons-nous sur BMW, toujours avec Carlos Da Silva : “La marque a atteint ses objectifs, mais en “poussant” un peu les immatriculations sur les derniers mois de l’année. En revanche, les perspectives 2015 sont très bonnes, car le groupe propose quelque chose de nouveau. A l’orée de 2015, BMW semble en pole position”. En clair, nous pouvons affirmer que le Premium n’a pas trop souffert, mais qu’il reste à un niveau de pénétration faible en France, marché sur lequel il ne parvient à exister que par le biais de l’abaissement de son seuil d’entrée de gamme.

Le “Qashqai” Renault en guise de stress-test

Pour 2015, l’heure n’est donc pas à l’euphorie, mais quelques modèles donneront le la. Si la Twingo et le futur “Qashqai” Renault sont des succès et que le C4 Cactus fait bouger quelques lignes, nous pourrons estimer que le marché français n’est pas trop fermé. Autrement… Et au-delà, il faut s’attendre à un premier semestre calme, voire totalement étale, avant d’envisager une seconde partie de l’année plus dynamique.
 

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