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L’Allemagne automobile rayonne

Publié le 5 octobre 2012

Par Christophe Jaussaud
5 min de lecture
Alors que les constructeurs français sont dans une période difficile, l’industrie automobile allemande n’a jamais semblé aussi forte et jamais autant de voitures n’ont été produites sur son sol. Analyse de deux trajectoires opposées.

A l’heure où PSA va mal, où Renault est également à un tournant, les constructeurs allemands, à l’exception d’Opel, affichent quant à eux une santé de fer avec des ventes en hausse et des bilans largement positifs. Même la production sur le territoire fédéral n’a jamais été aussi élevée ! En effet, les usines allemandes ont assemblé 5,87 millions d’unités des 12,9 millions (soit 45,2 %) de véhicules produits dans le monde par les constructeurs allemands en 2011. Une production d’ailleurs en augmentation de 5,8 %. Autre bonne nouvelle, les exportations concernent 77 % des véhicules assemblés, soit 4,5 millions (+ 6,6 %). L’Allemagne automobile est donc sur une autre planète. Pour les constructeurs français, la situation est bien différente avec une production totale de 5,6 millions, mais seulement 1,68 million d’unités sortant de chaînes françaises. Le “fabriqué en France” ne représente donc que 29,9 %.

Au chapitre financier, la différence est encore plus frappante. Ainsi, en 2011, le groupe Volkswagen a affiché un résultat net de 15,799 milliards d’euros, Daimler 6,029 milliards et BMW 4,9 milliards, quand PSA et Renault plafonnaient respectivement à 1,13 milliard et 2,14 milliards. Notons toutefois que pour le constructeur de Boulogne, 1,33 milliard d’euros provenaient de sa participation dans Nissan. Depuis janvier, les choses se sont encore détériorées pour les Français : PSA affiche une perte nette de 819 millions d’euros et Renault réussit à sortir la tête de l’eau avec un bénéfice net de 786 millions, en recul de 39 %. Et une fois de plus, Nissan permet de limiter la casse en contribuant à ce résultat à hauteur de 564 millions. L’activité automobile du groupe Renault a seulement réussi à dégager une marge opérationnelle de 0,4 %, soit 87 millions d’euros. Sur ce même premier semestre, le groupe Volkswagen a quant à lui affiché 8,8 milliards d’euros de bénéfice net ! Logiquement, les investissements consentis de chaque côté du Rhin ne sont pas les mêmes !

L’Allemagne au centre des investissements

Même si PSA a rappelé avoir investi 40 milliards d’euros entre 1999 et 2011, même si l’Alliance Renault-Nissan a injecté 4 milliards d’euros dans son programme électrique, ils sont bien loin de la puissance de feu des Allemands. Volkswagen va ainsi investir, entre 2011 et 2016, plus de 76,4 milliards d’euros ! Si 14 milliards seront apportés par les JV chinoises avec SAIC et FAW, le groupe de Wolfsburg va à lui seul investir 62,4 milliards afin de moderniser ses installations et développer de nouveaux produits. Et plus de la moitié des sommes engagées dans les moyens de production le sera en Allemagne, prouvant que produire en Europe de l’Ouest n’est pas impossible à l’heure où nombre d’analystes affirment que 5 à 10 usines sont condamnées sur notre continent. Le volet produits ne sera pas en reste, mais l’un des investissements le plus important réalisé par le groupe est invisible. En effet, avec la plate-forme MQB, Volkswagen, déjà passé maître dans le partage des plates-formes et le développement de modules communs, va prendre une nouvelle longueur d’avance. En effet, cette nouvelle architecture pour les modèles à moteur transversal, dont la nouvelle Audi A3 et la Golf 7 disposent déjà, va lui permettre de faire baisser le coût unitaire des produits de prêts de 20 % tout en proposant plus de contenus technologiques pour les clients. Des économies d’échelles naturellement, mais aussi industrielles, car cette plate-forme MQB permet d’améliorer l’efficacité de l’outil de production avec encore plus de flexibilité sur les chaînes.

L’international est la clé

Les constructeurs allemands ne semblent donc pas jouer dans la même cour. La production de produits à forte valeur ajoutée, notamment en Allemagne, associée à une internationalisation réelle et réussie sont sans doute les principaux éléments qui expliquent ces trajectoires si divergentes. Montée en gamme et internationalisation sont toutefois les leitmotive des constructeurs français depuis de long mois, voire depuis des années, mais force est de constater que les succès sont mitigés. Si le groupe Renault, pris dans le cadre de l’Alliance avec Nissan, peut se targuer d’une réelle internationalisation, ce dernier a toutefois fait le choix, avec une certaine réussite, du low cost. Cette gamme Entry (badgée Renault ou Dacia selon les pays) est même devenue la plus rentable du Français avec plus de 6 % de marge. Quant à PSA, même si les évolutions semblent aller dans le bon sens, elles sont arrivées tardivement et, dans le cas de la Chine, une erreur manifeste de stratégie a été commise. En effet, la marque Citroën est implantée en Chine depuis plus de vingt ans et cela s’est seulement traduit, en 2011, par 230 634 immatriculations ! Dans le même temps, le groupe Volkswagen, certes présent depuis vingt-cinq ans, a écoulé 2,2 millions d’unités. Conscient de cette carence, PSA a profondément réorienté sa stratégie ces deux dernières années, avec notamment une restructuration de son réseau, une refonte de la gamme, la commercialisation de la ligne DS, mais aussi l’arrivée de Peugeot. Le Français vise ainsi 2 millions d’unités en Chine à l’horizon 2020. Mais la Chine, aussi importante soit-elle, doit cependant laisser des ressources pour d’autres conquêtes où consolidations sur des marchés comme la Russie ou l’Amérique du Sud. Il faut trouver le bon équilibre et c’est sans doute là, certes avec beaucoup de moyens, que les constructeurs allemands ont fait la différence en réussissant une internationalisation homogène capable de leur assurer une croissance globale quand l’un des grands marchés, aujourd’hui l’Europe, est défaillant.
 

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