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Constructeurs

Volkswagen : les raisons d'une crise profonde

Publié le 4 septembre 2024

Par Nabil Bourassi
4 min de lecture
Le constructeur automobile allemand envisage la fermeture d'une usine nationale. Ce serait une première pour Volkswagen qui a fait de son pays d'origine son point d'ancrage industriel. Mais le groupe dirigé par Oliver Blume est acculé par des difficultés structurelles accentuées par une conjoncture maussade.
Volkswagen crise
Le groupe Volkswagen envisage de fermer une usine en Allemagne. ©AdobeStock

C’est un véritable séisme. Après avoir annoncé la fermeture de son site de Bruxelles, Volkswagen Group envisage sérieusement de fermer une usine en Allemagne. Ce serait une première absolue pour le mastodonte de l’automobile (plus de dix millions de voitures neuves vendues par an), véritable vitrine de la puissance industrielle allemande. 

 

Jusqu’ici, Volkswagen a fait de l’Allemagne sa base arrière industrielle, puisque la moitié des effectifs mondiaux du groupe y est basée, soit plus de 300 000 personnes. Une anomalie pour certains analystes qui constatent que l’Allemagne ne représente que 13 % des ventes de Volkswagen. D'après de récentes déclarations de son directeur financier, les surcapacités industrielles représenteraient l'équivalent de deux usines allemandes...

 

Dix milliards d'économie pour la seule marque Volkswagen

 

Mais la situation financière et commerciale de Volkswagen n’était plus tenable. Fin 2023, le groupe avait arraché un accord avec les syndicats pour baisser les coûts de la seule marque Volkswagen de dix milliards d’euros. 

 

Les résultats du premier semestre 2024 ont montré que le mal était bien plus profond. Avec un chiffre d’affaires malgré tout en hausse de 4 % (83,3 milliards d’euros), le groupe a enregistré une chute des profits (-8 %) et une marge en baisse à 6,6 % (7 % un an auparavant). 

 

Les ventes des marques premium plongent

 

Dans le détail, c’est encore plus alarmiste. Les analystes ont ainsi découvert que, sur le second trimestre, la marge opérationnelle est tombée à 1 %. Les ventes en Chine, premier marché d’exportation, notamment des modèles premium, ont baissé de 7 % sur l’ensemble du semestre, et même de 20 % sur le second trimestre.

 

Autre point d’alerte, les marques premium accusent également des baisses conséquentes. Problème, ce segment est le premier pourvoyeur de profits pour Volkswagen. Les ventes d’Audi baissent de 8 % sur le semestre, avec un chiffre d'affaires plus bas au second trimestre, où les ventes reculent de plus de 11 %. Celles de Porsche sont également en chute libre : -7 % sur le semestre, -10 % au second trimestre. 

 

L'échec de la stratégie électrique

 

Mais Volkswagen inquiète également pour l’échec de sa stratégie concernant les voitures électriques. Sa famille ID (ID.3, ID.4…) n’a pas réussi à s’imposer sur le marché européen pris en étau entre le très agressif constructeur Tesla et les marques chinoises. Volkswagen est parvenu à maintenir ses volumes, mais au prix d’importantes ristournes, autrement dit avec moins de profits.

 

Les perspectives de la voiture électrique made in Volkswagen sont sombres. Oliver Blume a opéré un changement à 180 degrés de la stratégie voitures électriques engagée par son prédécesseur, Herbert Diess (PDG de 2018 à 2022). Ainsi, le projet Trinity qui devait faire émerger une nouvelle génération de voitures électriques avec l’objectif de cibler directement Tesla est reporté sine die. Initialement prévu pour 2026 et reporté en 2028, la presse allemande indique que le premier modèle issu de ce programme ne verra pas le jour avant… 2032. En outre, le groupe allemand a récemment annoncé la réduction de ses projets de gigafactories.

 

Les analystes s’alarment de la facture de la stratégie électrique lancée par la précédente direction (180 milliards d’euros), rapportée à ses résultats commerciaux… 

 

La filiale Cariad tarde à produire des résultats

 

Enfin, une question se pose autour de Cariad, la filiale dédiée aux logiciels et qui peine à donner des résultats opérationnels convaincants. D’ailleurs, l’une des difficultés de la stratégie électrique provient des retards cumulés par cette activité et qui devait donner à Volkswagen la maîtrise de ce maillon de la chaîne de valeur, appelée à devenir incontournable d’ici 2030.

 

Ces difficultés structurelles ont été largement accentuées par une conjoncture maussade : stagnation du marché européen, contraction des ventes en Chine, hausse des coûts matières premières, guerre des prix, baisse des subventions publiques à l’achat de voitures électriques. 

 

Le marché, lui, en a tiré ses conclusions. Le titre ne cesse de plonger. En six mois, la valorisation boursière de Volkswagen a perdu un tiers de sa valeur.

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