Renault F1: Doublé historique

...Prost. A 10 tours de l'arrivée, fort d'une avance de 20 secondes sur son coéquipier, le grenoblois ignore les panneaux lui rappelant la consigne brandis par son équipe. Dans les faits, il avait accepté, au nom des intérêts de l'écurie, de s'effacer le cas échéant derrière Prost qui était le mieux placé au classement du championnat. Seulement, 20 secondes de marge, ce n'était pas comme si celui-ci était dans ses roues, attendant qu'il lui cède le passage ! René franchit la ligne d'arrivée en grand vainqueur, devant Alain (à 17'') et Didier Pironi (à 42'') sur Ferrari. Et voilà comment Renault signa un retentissant doublé… à domicile !
Vingt-quatre ans plus tard, sur le circuit de Sepang en Malaisie, Renault vient de rééditer son exploit de 1982. A la seule différence que les voitures ont considérablement évoluées, que les pilotes s'appellent cette fois Giancarlo Fisichella et Fernando Alonso, et que ce second doublé de toute l'histoire de Renault en Formule 1 (le premier depuis le retour en tant que constructeur à part entière en 2002) a été obtenu de façon limpide, sans consigne particulière. Un pur bonheur à savourer sans modération…

Renault a parfaitement su interpréter et gérer le nouveau règlement en matière de moteurs

Pour le romain, l'objectif était de tourner la page au plus vite, suite à son abandon décevant à Bahreïn. Effectuant un départ impeccable depuis la pole position (en 1'33''840), Fisichella a maintenu un rythme élevé, effectuant ses deux arrêts ravitaillement aux 19e et 38e tours. Au final, il franchira la ligne d'arrivée avec 4''6 d'avance sur son coéquipier, bien revenu de sa modeste 7e place de grille (victime d'un problème sur la machine à ravitailler entre les 2e et 3e séances qualificatives, il s'élançait bien trop chargé en essence). A 33 ans, il signe donc sa 3e victoire en 160 Grands Prix. "Ce fut une course parfaite pour moi, mais très difficile à la fois mentalement et physiquement, explique après-coup le pilote Renault. Il faisait vraiment très chaud (37°C, NDLR), et j'ai commencé à le ressentir au milieu de la course. Mais je n'avais pas d'autre choix que de pousser jusqu'à la fin". Pour l'espagnol, une grande partie de son handicap était déjà comblée au deuxième virage. Profitant de l'affrontement entre les deux pilotes Williams qui se gênent mutuellement, Alonso sort de ce 2e virage en 3e position ! Puis, après avoir réussi à contenir les assauts de la Williams plus légère de Mark Webber dans les premiers tours, tout en préservant ses pneumatiques pour ce qui serait un très long premier relais, l'espagnol ravitaille aux 26e et 43e tours. A l'issue de son second arrêt, il ressort des stands en 2e position devant la Honda de Button, position qu'il conservera jusqu'au drapeau à damiers. Et voilà comment le doublé fut assuré ! En outre, si Alonso mène le championnat "Pilotes" avec 18 points sur 20 possibles, Renault figure en tête chez les "Constructeurs" avec 28 points, devant Ferrari et McLaren-Mercedes au coude à coude (15 points chacun). Plus important sans doute, le moteur de la RS26 de l'espagnol achève à Sepang son cycle de deux Grand Prix, sans problème majeur. Constat qui fait dire à Flavio Briatore (directeur général de Renault F1 Team), que "Renault a su interpréter et gérer au mieux le nouveau règlement, faisant état de l'introduction du nouveau moteur V8". Ce qui semble moins être le cas de la concurrence. Les deux Ferrari pénalisées de dix places sur la grille pour avoir changé leurs blocs, les deux Williams (décidément très performantes en ce début de saison) "out" durant la course en raison du bris de leurs V8 Cosworth, idem pour le V8 BMW d'Heidfeld… Pour les uns, la température élevée de Sepang s'est révélée quelque peu dévastatrice ! Une chose est certaine. En accédant à la 3e marche du podium, Jenson Button confirme le niveau de compétitivité de Honda, déjà entrevu à Bahreïn. Rien à voir avec les débuts laborieux de Toyota qui ne peut en rien se consoler avec le petit point (équivalent à la 8e place) de R. Schumacher… Une "performance" due en outre aux abandons qui n'ont pas manqué d'émailler la tête du peloton (à commencer par K. Räikkönen, accidenté dès le 1er tour).

Marc David