“Réenchanter la conduite électrique”

JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Quel message avez-vous voulu faire passer avec ce concept Fractal ?
GILLES VIDAL. L’idée était d’explorer ce que pourrait être le futur des véhicules électriques à vocation urbaine. Un véhicule électrique qui n’est en rien synonyme de renoncement aux sensations, aux expériences dynamiques et aux expériences en tous genres qui incluent la connectivité. Alors, certes, nous avons poussé ce travail très loin. Il s’agit d’un véhicule très compact, plus petit qu’une 208, qui dispose de deux moteurs électriques, un sur chaque essieu, afin de ressentir des sensations fortes au volant pour réenchanter, en quelque sorte, la conduite électrique sans que la performance ne représente toutefois une fin en soi.

JA. Comment avez-vous adapté l’habitacle à cette philosophie ?
GV. En partant du I-Cockpit, qui offre pour nous une très bonne ergonomie, nous sommes allés beaucoup plus loin en y intégrant le design sonore. Ainsi, nous avons un système de son spatialisé dans l’habitacle qui permet de plaquer le son, très précisément, à 360 degrés autour de soi avec une notion de distance également. Naturellement, un tel système a un intérêt pour la hi-fi et la musique mais l’aspect cognitif des choses améliore l’ergonomie. Un exemple avec un système de navigation. Souvent les annonces sont faites avec la même intensité et finissent par ne plus remplir leur rôle. Ici, notre idée est que la voix vienne du côté où le conducteur doit tourner mais aussi qu’elle permette d’intégrer une notion de distance, la voix se rapprochant du conducteur en même temps que l’intersection. Cette démarche au service de l’ergonomie peut d’ailleurs être utilisée pour toutes les fonctions sonores fonctionnelles ou informatives.

JA. Avez-vous également utilisé ce travail sur le son pour contrer le non-bruit caractéristique des VE ?
GV. Naturellement, notre travail sur le design sonore s’est poursuivi afin d’étouffer et annuler les sons que peut émettre un véhicule et en particulier un véhicule électrique comme les bruits de roulement ou aérodynamiques. Pour ce faire, nous avons généré à l’intérieur, comme à l’extérieur, des formes anéchoïques qui permettent de casser les échos. Ce sont ces piques saillantes que l’on voit souvent dans les studios d’enregistrement ou les chambres d’essai. Mais si ces formes doivent être fonctionnelles, elles doivent également avoir des formes agréables, plaisantes et graphiquement intéressantes. Pour résoudre cette équation, nous avons utilisé le design paramétrique qui est un outil qui nous permet d’obtenir, à volonté et de manière très rapide, un résultat graphique le plus efficient possible.

JA. Plus généralement, concernant le style extérieur de ce concept, peut-on y voir des indices sur le futur langage de Peugeot ?
GV. La morphologie de Fractal, qui est un concept assez extrême dans ses proportions notamment, n’est pas réaliste de ce point de vue là. En revanche, de nombreux détails, ses surfaces assez simples et tendues, ses galbes, montrent un design généreux, affûté et technologique à la fois. Ces caractéristiques sont une constante sur les derniers concepts de la marque et nous allons effectivement les amener dans les futures productions.

JA. A quelle date verrons-nous cette évolution de style ?
GV. Ce sera sur la prochaine voiture complètement nouvelle car ces derniers mois nous avons surtout travaillé sur des restylages, comme sur la 508 ou la 208 par exemple. Mais ces changements sont un long processus dont finalement la 308 a été le point de départ. Sur ce segment stratégique, nous avons reposé les fondations de la marque. Avec elle, nous avons franchi un palier en qualité perçue comme intrinsèque, en qualité de fabrication et en qualité d’exécution du design. Certes, nous aurions pu aller plus loin en termes d’expressivité mais nous avons dessiné un véhicule très homogène et très cohérent. C’était volontaire et assumé. Maintenant que ce travail est réalisé, pour nos futurs modèles nous pourrons aller plus loin dans l’expressivité. Naturellement sans être aussi extrêmes que sur les concept-cars Exalt, Quartz et Fractal, car il faut que les clients puissent s’approprier les lignes.