Opel dévoile sa bonne étoile
Chaque mois, ce sont à peu près 800 000 appels qui sont traités par les téléopérateurs. Le tout sur la seule zone nord-américaine. Une statistique édifiante, en constante progression, qui prouve que le service OnStar est entré dans les habitudes des automobilistes. Né en 1996 d’une division à part entière, ce système mis au point par General Motors fait figure de précurseur dans le domaine de la connectivité des véhicules. Outre les Etats-Unis, la Chine et le Mexique l’ont adopté. General Motors y revendique environ un million d’abonnés cumulés, qui s’ajoutent aux 6 millions d’Américains et de Canadiens. Pas loin de vingt ans après avoir été imaginé, il débarque en Europe, tandis que le Brésil suivra fin 2015.
General Motors a dû prendre son mal en patience. De l’aveu des directeurs de la division, en visite à Detroit, le Vieux Continent a été le plus difficile à aborder. Pour s’assurer d’un service uniforme, il fallait disposer d’un réseau de communication transfrontalier. “Il nous a fallu de longues années pour trouver un opérateur téléphonique capable de nous accompagner sur chacun des territoires ciblés”, explique un responsable. C’est chose faite et les noms des partenaires relèvent du secret industriel. Ceux-ci garantissent que les véhicules – à commencer par l’Astra – disposeront d’une connexion 4G à travers 13 pays, sur la base d’un tarif unique. Une couverture destinée à s’étendre.
“Créer des liens plus étroits avec la marque”
“Opel OnStar, déjà distingué par un prix Connected Car, est une preuve supplémentaire que nous voulons diffuser à un large public des systèmes innovants dans le domaine de la connectivité, affirmait il y a quelques semaines Karl-Thomas Neumann, le P-dg d’Opel Group. Opel OnStar va faire faire un bond à nos véhicules en matière de sécurité, et rendra par la même occasion la conduite plus confortable. Le dialogue en direct avec nos clients va créer des liens plus étroits avec la marque.”
Concrètement, en usine, Opel/Vauxhall intègre une carte SIM dans le véhicule. Un procédé en voie de standardisation avec la future entrée en vigueur de la législation européenne concernant l’appel d’urgence. Toutefois, OnStar va plus loin que servir de lien vers les secours. Au quotidien, le système permet de solliciter une assistance individualisée, après une simple pression sur un bouton situé dans l’habitacle. Le conducteur peut alors se faire aider pour trouver un point d’intérêt (hôtel, restaurant, entreprise…), comme on le ferait en pianotant sur le système de navigation. D’ailleurs, une fois identifiée, l’adresse du lieu peut être chargée par l’opérateur du centre d’appel directement dans le système. En revanche, aucune transaction ne peut être effectuée. Le rôle des concierges s’arrête à la mise en relation téléphonique avec le commerce.
Le conducteur peut aussi commander un diagnostic à distance des points vitaux du véhicule (pression des pneus, huile…) pour gérer l’entretien de son véhicule. Opel ne prévoit pas, à court terme, d’automatiser le transfert de l’information vers un concessionnaire, dans une logique de génération de contacts. Il appartient aux clients de demander une mise en relation ou un guidage vers le centre le plus proche, y compris un centre-auto. Autre service disponible : le contrôle à distance du véhicule via une application mobile spécifique. Il est alors notamment question de géolocalisation de la voiture, de verrouillage/déverrouillage des portes, d’activation du klaxon et des feux.
En soi, sur nos terres européennes, OnStar ne peut plus être considéré comme une révolution, puisque, entre temps, BMW a en effet pris place sur ce créneau du service télématique. La conciergerie et le Remote Control sont deux options disponibles au catalogue de l’Allemand. Néanmoins, Opel/Vauxhall fera la différence sur le segment des généralistes en démocratisant le concept, d’autant qu’en 2016, Opel activera la borne Wi-Fi haut débit permettant de connecter plusieurs terminaux à Internet. Sauf surprise à l’IAA de Francfort, peu de marques opposeront une concurrence dans les prochains mois. Le groupe présidé par Karl-Thomas Neumann devrait donc garder une avance technique qui constituera un avantage concurrentiel. “Nous regardons de près le déploiement d’OnStar”, admettait Jean-François Martin, directeur des services connectés de Renault, lors d’un entretien à paraître dans le prochain JA Connect. La généralisation de l’appel d’urgence apportera aux autres la première brique, certes, mais nullement l’essence du schéma d’affaires.
Huit langues parlées au lancement
Il y a en effet une structure conséquente à mettre en place. A titre d’illustration, à Detroit, le département OnStar emploie environ 700 personnes, constituées en trois équipes qui assurent une présence continue. Selon General Motors, 80 % des appels sont ainsi pris en moins de vingt secondes. Le recrutement se fait en priorité en interne. Une manière de s’assurer de la connaissance de la philosophie d’entreprise et des produits. Cinq jours de formation aux rudiments du système sont toutefois nécessaires. Il faut y ajouter trois semaines pour ceux qui veulent rejoindre l’équipe de gestion des appels d’urgence. “Les gens nous contactent pour trouver des solutions à leurs problèmes. Nous changeons leur expérience de l’automobile”, raconte une des téléopératrices américaines, rencontrée entre deux tours de garde, et qui reconnaît néanmoins que la patience s’avère être un prérequis.
A Luton, dans la région nord-londonienne, siège de Vauxhall, le groupe vient d’ouvrir un centre de contact identique. Au lancement, une centaine de collaborateurs ont été embauchés. Ils couvrent ainsi huit langues. Au fil des ventes et des déploiements dans les pays, les ressources humaines vont s’étoffer, en quantité et en diversité. La mixité culturelle locale fournit un excellent vivier, à l’image de l’une des premières opératrices, trilingue français, anglais et allemand.
A ceci s’ajoute un centre d’hébergement de la donnée. Une toute nouvelle pièce sur l’échiquier de General Motors érigée à Rüsselsheim, en Allemagne, qui complète un réseau de 4 sites en Amérique du Nord et d’un à Shanghai. C’est via ce complexe que les données relatives aux véhicules transiteront pour délivrer la prestation. Encore flou, un projet de renfort en Grande-Bretagne était évoqué par certaines sources en interne. Une information qui n’a pu être confirmée en haut lieu.
Un modèle économique à multiples entrées
General Motors n’a pas souhaité dévoiler non plus le montant des frais de déploiement de OnStar en Europe. Une “véritable industrie de la connectivité”, dont l’essentiel du retour sur investissement proviendra des abonnements. Après une période d’essai gratuit de douze mois, les conducteurs s’acquitteront en effet de “quelques centaines d’euros” par an pour bénéficier de l’intégralité des fonctions. Si on considère qu’Opel propose, en marge, la récupération du véhicule après-vol, l’avantage client devrait s’en trouver accentué. “Nous n’avons aucun accord avec les assureurs en Europe”, admet-on toutefois. Charge au client, donc, de faire valoir OnStar auprès de sa compagnie. Pour mémoire, aux Etats-Unis, Chevrolet avait présenté au CES de Las Vegas, en janvier dernier, une offre inédite chez un constructeur visant à analyser la conduite pendant un an après l’achat, grâce au boîtier télématique, avant de soumettre une offre de prime d’assurance ajustée. A étudier.
Sur le modèle des Etats-Unis toujours, d’autres sources de revenus s’envisagent. Là-bas, General Motors a créé un modèle économique qui consiste à revendre de la donnée anonyme à un éditeur d’information trafic. Compte tenu du fait que le groupe entend mettre à la route des centaines de milliers de véhicules équipés par an, en Europe, la flotte pourrait atteindre une taille critique valorisable à moyen terme. Prudence, rien d’officiel n’a été évoqué en ce sens. Rien d’officiel non plus concernant la piste d’une concurrence aux services de gestion de flotte de véhicules de Peugeot-Citroën et de Renault-Nissan. Pourtant, avec OnStar, le constructeur ne manque plus que d’une plate-forme spécialisée. Une source interne reconnaissait que cette évolution n’était pas à exclure. “Toute la gamme Business Connect accueillera OnStar en série”, précisait-on en juillet dernier. Dans un premier temps, le système va concourir à mieux gérer les flux de passages à l’atelier et à préparer des solutions de mobilité pour les professionnels de la route.
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FOCUS - Opel et la confidentialité
L’Europe a ceci de spécifique que la confidentialité des données importe plus qu’ailleurs. Soucieux de ne pas se couper de sa clientèle, General Motors a consenti à un “tuning” de la version européenne d’OnStar. Ainsi, fait son apparition un bouton supplémentaire qui coupe toute transmission de données. Test à l’appui, le téléopérateur ne peut délivrer aucun service géolocalisé lorsque cette fonction est activée. Elle se déverrouille automatiquement en cas d’urgence.
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FOCUS - GM en sous-traitant
Il faut sortir par le nord de Detroit pour rejoindre Warren et le centre d’appel national de General Motors. Là où sont traités tous les clients d’OnStar, américains et canadiens. Il fonctionne en duo avec un étage complet du Renaissance Center, la mythique tour où siège le président de GM. A l’intérieur, le constructeur cultive la discrétion. Les appareils photo doivent rester à l’accueil. Et pour cause, General Motors possède des contrats de sous-traitance avec d’autres constructeurs aux Etats-Unis. Ainsi, le plateau se divise en sections au-dessus desquelles flottent des panneaux indiquant pour quelle marque les équipes opèrent. Parmi elles, on retrouve General Motors sans distinction de logo, mais également Isuzu, Acura ou encore Lexus. Toutes ont mis en place des systèmes d’assistance et s’appuient sur les compétences des équipes en place. Une manière d’amortir les frais. Dans ces locaux, certains disent même se souvenir qu’il y a plusieurs années, Continental et Motorola avaient acheté des technologies pour proposer des fonctionnalités similaires aux constructeurs.
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