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Constructeurs

"Nous offrons un éventail de technologies : aux clients de choisir"

Publié le 3 décembre 2012

Par Clotilde Chenevoy
10 min de lecture
François Bancon, directeur général de la recherche exploratoire et de la stratégie produits, Nissan Global et Etienne Henry, vice-président Nissan du Product Planning pour la zone Europe, Afrique, Moyen-Orient et Inde - Au Mondial, le concept Terra démontrait les avancées du constructeur dans le domaine de la pile à combustible. La marque annonce ainsi la maîtrise de diverses technologies, qu’elle distribue selon les attentes des marchés. Le point sur les prochains projets de Nissan avec François Bancon et Etienne Henry.
François Bancon (à gauche), directeur général de la recherche exploratoire et de la stratégie produits, Nissan Global et Etienne Henry, vice-président Nissan du Product Planning pour la zone Europe, Afrique, Moyen-Orient et Inde

JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Comment se déroulent la commercialisation de la Leaf et les avancées dans le domaine des VE ?
FRANÇOIS BANCON.
Depuis le lancement de la Leaf fin 2010, nous en avons vendu près de 40 000 unités dans le monde. Nous ne nous attendions pas à ce que cela soit facile. Carlos Ghosn a été visionnaire en lançant un programme “zéro émission” il y a cinq ans. Ce ne fut pas une décision aisée. Les barrières d’achat sont relativement hautes, la technologie est chère et l’infrastructure prend plus de temps que prévu à être déployée. Nous ne sous-estimons pas les obstacles. Et j’estime qu’atteindre ce niveau de ventes, compte tenu du contexte, c’est correct. Cela ne signifie pas que nous nous contentons de ce chiffre. L’investissement dans le VE, pour l’Alliance, tourne autour de 4,5 milliards d’euros. Nous allons donc insister, avec la sortie de deux autres produits électriques. A certains moments, dans l’industrie, il faut y croire. Le Qashqai en est un bon exemple. A la sortie du premier concept il y a six ou sept ans, peu de gens pariaient alors sur la réussite du modèle.

ETIENNE HENRY. La Leaf est la voiture électrique la plus vendue au monde, toutes marques confondues. Pour la recharge, nous recherchons également des solutions en interne, notamment de charge rapide. Nous avons travaillé sur le produit, les systèmes de recharge, les infrastructures, et initié dès le départ des discussions avec les gouvernements, pour pouvoir aller de l’avant. Et d’un point de vue véhicule, nous continuons d’investir. Notre implication est telle que nous avons choisi de fabriquer dans les prochains mois la Leaf en Europe, à l’usine de Sunderland, en Angleterre, où seront produits batteries et véhicules sur le même lieu. De plus, nous allons passer le NV200, notre utilitaire, en VE, en exploitant la même technologie (chaîne cinématique, batterie, moteur électrique) que celle de Leaf. Nous pensons que les professionnels représentent une autre population de clients pour le VE, à l’heure où l’on évoque régulièrement la qualité de l’air en centre-ville et toutes les contraintes environnementales.

JA. Quel est le retour d’expérience des premiers usagés de Leaf ?
FB.
Nous avons réalisé 150 interviews de gens qui ont acheté une Leaf, certains depuis près d’un an. Ils estiment que le produit est parfait, ils ne nous remontent pas de demandes d’améliorations majeures. Le taux de satisfaction atteint 98 %, ce qui est de loin le plus élevé de Nissan. En revanche, ils pointent le souci des infrastructures, car lors de la vente des véhicules, nous avions annoncé des accords avec les gouvernements, qui ne sont pas forcément pleinement réalisés. Nous travaillons donc fortement auprès des institutions pour qu’elles tiennent les objectifs fixés. Le bilan utilisateur n’est donc pas négatif.

JA. Comment impliquez-vous votre réseau dans cette vision du VE ?
EH.
Si on prend l’exemple de la France, nous avons commencé par déployer en interne les bornes de recharge sur un certain nombre de concessionnaires ciblés. Nous travaillons aujourd’hui pour atteindre 100 % du réseau, et nous les formons également pour vendre les modèles. Nous allons de l’avant sur tous les points que nous contrôlons. L’Alliance joue d’ailleurs un rôle important, puisque la technologie de charge se trouve identique chez Nissan et Renault.

FB. Le seul pays où le déploiement a été simple, c’est au Japon, car nous y possédons notre réseau de distribution. Aux Etats-Unis comme en Europe, nous ne pouvons pas imposer à notre réseau, puisque nous sommes avec des partenaires. Les bornes de recharge rapide font partie d’un élément stratégique pour faire en sorte que les ventes de Leaf décollent encore plus. Nous allons travailler sur l’anxiété des clients face à l’autonomie.

JA. Améliorer la mobilité urbaine est-il un sujet mondial ?
FB.
La mobilité urbaine, qui demande des véhicules compacts et hyper-compacts, est un phénomène qui va croissant dans le monde entier. Seuls les Etats-Unis, où la taille compte, font exception ! Les derniers chiffres sur la croissance annoncent une hausse de l’ordre de 40 % des gens vivant dans les villes à l’horizon 2020 ; 60 % de la planète vit dans des villes, soit un accroissement d’un milliard de personnes sur le même horizon. La mobilité urbaine représente donc un enjeu clé. Il suffit, par exemple, de venir au Mondial en voiture pour comprendre ces problèmes ! Nous avons des offres sur les différents segments. La Micra a été étudiée pour répondre à ce besoin de mobilité urbaine, et nous aurons certainement d’autres modèles. Toutefois, il n’y a pas un champ d’innovations profondes dans ces catégories-là. La compacité présente une limite sur le plan du design comme de l’architecture. Nous aurons les bons produits pour répondre à ces enjeux, ils arrivent.

EH. Nous arrivons avec des véhicules plus émotionnels, qui sont décalés par rapport à la norme. Nous avons d’ailleurs répondu à une attente du marché avec Juke, qui est un véhicule agile en ville, facile à utiliser au quotidien, tout en ayant une étincelle émotionnelle. Le prochain Note, qui a été préfiguré par le concept Invitation présenté à Genève, cible davantage une clientèle familiale, mais reste sur un design différenciant et un gabarit compact. La nouvelle génération, lancée au Japon en septembre, arrivera l’année prochaine en Europe.

JA. Le Concept Terra annonce-t-il un modèle à pile à combustible ?
FB.
C’est une technologie sur laquelle nous travaillons depuis quinze ans. Nous avons déjà fait des tests aux Etats-Unis. Nous sommes à jour sur cette technologie, mais elle reste très chère. Le problème principal repose sur l’architecture et la distribution de l’hydrogène. Soit on produit l’hydrogène à partir de l’électricité, soit l’hydrogène est distribué en réseau, comme l’essence, et il se passera un peu de temps avant que cela soit effectif. Dans tous les cas, nous sommes déjà prêts.

JA. Et des hybrides ?
FB.
Nous en avons déjà au Japon. L’Europe n’est probablement pas le client le plus sérieux pour l’hybride, alors qu’en Chine, on ne peut pas se passer de ce produit, notamment avec la deuxième vague de régulation chinoise. Nous venons d’ailleurs de lancer un nouveau mini-van hybride. Nous avons la technologie. Mais nous ne sommes pas un vendeur de technologie. En Europe, l’hybride n’est pas très convaincant aujourd’hui face au Diesel, en termes d’usage réel par le client. Pour autant, je pense que le Diesel mourra à terme, au profit de toutes les technologies d’électrification. Nous avons une réflexion stratégique sur l’ensemble des technologies, la pile à combustible, le plug-in, le Range Extender qui, à terme, supplanteront le Diesel.

EH. La consommation des hybrides, surtout pour des voitures urbaines, ne délivre pas les promesses du CO2. Nous avons l’avantage, au sein du groupe, d’avoir une couverture géographique importante qui nous oblige à développer plusieurs technologies. L’hybride est une réalité pour les marchés américain, chinois, et japonais, où le Diesel n’existe pas. Avec Terra, nous sommes sur une pile à combustible. Le Range Extender sera certainement un très bon trait d’union entre le véhicule électrique, réservé à un usage très urbain, et les véhicules de moteur à combustion. En Europe, on peut prendre des paris, mais ce seront les clients qui décideront. Nous offrons un éventail de technologies.

JA. Quelles actions mettez-vous en place pour vous déployez sur les BRIC ?
EH.
Nous menons beaucoup d’actions sur ces pays. En Russie, nous disposons d’une usine sur Saint-Pétersbourg, qui fabrique les modèles X-Trail, Teana, une berline du segment D, Murano, et depuis peu des Infiniti. L’usine produit 50 000 véhicules, et nous comptons investir pour doubler sa capacité, afin de suivre notamment la croissance du marché russe. C’est d’ailleurs le principal marché européen et le 5e mondial pour Nissan, avec 5,3 millions de véhicules. Nous y avons vendu 140 000 unités l’année dernière. Notre ambition est encore plus importante, puisque nous avons annoncé lors du salon de Moscou la commercialisation d’une berline conçue pour ce marché, avec une production faite chez AvtoVAZ. Toutefois, la Chine reste le premier marché de Nissan, avec la vente de plus d’un million de véhicules. Nous avons d’ailleurs un objectif de 10 % de parts de marché, alors que nous tournons actuellement à 7 %. Au Brésil, nous venons d’annoncer la construction d’une usine, toujours pour être proches des marchés. En Inde, nous disposons d’une usine, qui produit notamment Micra.

JA. La nouvelle Micra trouve-t-elle sa place sur le marché ultra-concurrentiel des citadines ?
EH.
La nouvelle Micra est un modèle beaucoup plus global que la précédente, nous permettant d’élargir notre couverture de marchés en entrant, par exemple, en Inde. Nous obtenons ainsi des chiffres de ventes plus importants que le modèle précédent. En Europe, avec 75 000 unités, Micra n’est pas au niveau de nos attentes. Nous continuons donc à travailler sur le produit, notamment au travers de séries spéciales. Sur le Salon, nous présentons un partenariat avec le magazine Elle, qui rapproche la voiture de nos clientes. Nous allons ajouter quelques éléments pour la rendre plus forte sur le marché européen.

JA. Votre succès est très lié aux crossovers, n’est-ce pas ?
EH.
Juke et Qashqai représentent la majorité de nos ventes, avec respectivement 140 000 et 250 000 unités écoulées. Si on ajoute Murano, on arrive autour de 400 000 crossovers. Ces véhicules représentent l’image de Nissan, mais nous ne voulons pas nous arrêter là. Nous avons l’ambition de vendre plus, nous ne pouvons donc pas négliger le cœur des ventes, en Europe, que sont les petites voitures. Nous comptons donc sur Note. Nous avons également annoncé la production d’une berline du segment C en 2014, sur notre site anglais. Pour rappel, nous disposons de deux usines importantes en Europe, à Sunderland et à Barcelone, qui sont des atouts car elles nous permettent de produire en étant proches de nos marchés et de nos clients, et de bénéficier de tous les avantages de l’Alliance.

JA. Quels sont vos objectifs avec le nouveau Note ?
EH.
Nous comptons vendre une centaine de milliers de Note en Europe. Ce qui correspond à une augmentation de 30 à 40 % de nos ventes actuelles. Nous allons retravailler le positionnement du véhicule, en élargissant la cible. Nous voulons à la fois toucher les automobilistes qui cherchent une berline compacte, et ceux qui souhaitent un véhicule avec beaucoup d’espace intérieur et de rangements. Le design est aussi plus émotionnel, avec des lignes plus fluides, sans compromettre la fonctionnalité intérieure. Les tarifs varieront peu. Les volumes de ventes sont ambitieux, mais jusqu’à présent, nous avons respecté nos plans. Ainsi, nous ciblons les 5 % de parts de marché à l’horizon 2016. Quelques années en arrière, nous étions autour de 2 à 2,5 %. Aujourd’hui, nous tournons autour de 3,5 %, ce qui est en ligne avec nos objectifs. La nouvelle Note va apporter sa pierre à l’édifice en termes de croissance. L’année 2014 sera également importante pour nous, puisque nous lancerons plusieurs nouveaux véhicules, avec un renouvellement de gamme des modèles clés d’aujourd’hui.

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