"Nous ne voulons pas hypothéquer l’avenir"
JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. En préambule, comment analysez-vous l’évolution du marché français après neuf mois d’activité, et les conséquences pour Seat ?
MARC DE LAITRE. En début d’année, notre prévision de marché se situait à environ 1,95 million d’unités, mais nous voyons qu’aujourd’hui la chute est bien plus brutale. Nous avons donc ajusté notre vision du marché 2012 à 1,880 million d’unités. De plus, sur ce marché en recul, le segment des citadines, où nous sommes très présents, a particulièrement été affecté. Beaucoup plus que nous le pensions. Nous avions programmé l’effet des anticipations liées à la fin de la prime à la casse, mais à cela se sont ajoutées des conditions de marché extrêmement tendues.
JA. On semble effectivement assister à une féroce guerre des prix. Est-ce que cela peut durer ?
MdL. Elle est bel et bien réelle. Jusqu’ici, nous avions connu des conditions commerciales tendues qui ne s’exprimaient que localement ou de manière un peu “déguisée”, alors qu’aujourd’hui, nous assistons à une communication très ouverte, dans des médias nationaux et en télévision, sur des remises plus fortes que jamais. Elles peuvent atteindre plus de 30 % sur certains VN. Cela n’a plus de sens économiquement et déroute complètement le client. Pour notre part, nous devons garder la tête froide. Certes, nous n’atteindrons pas les volumes escomptés cette année, mais nous n’avons pas voulu nous lancer dans cette course à la remise car nous ne voulons pas hypothéquer l’avenir. Cette situation confirme que nous devons réduire notre dépendance à l’Ibiza, qui a encore représenté 63 % de nos ventes en 2011.
JA. Réduire la dépendance à l’Ibiza, mais aussi celle au canal des particuliers ? Justement, les ventes sociétés font partie de vos priorités, avez-vous atteint votre objectif de 1 % de pénétration sur ce marché ?
MdL. Jusqu’ici, les ventes flottes sont restées relativement stables, contrairement à celles aux particuliers, mais nous n’avons pas atteint notre objectif car, même sur ce canal, il y a eu une course à la remise. De plus, pour être performants sur ce marché, nous devons offrir une offre produits plus large afin d’intéresser notamment les loueurs longue durée. Nous devons aussi pouvoir compter sur une organisation et des services dédiés à ces ventes. Mais cela se met réellement en place dans le réseau depuis le mois d’avril dernier avec, entre autres actions, la formation de vendeurs dédiés.
JA. Quel sera le rôle de la nouvelle Leon dans cet univers des sociétés ? De plus, quelles sont vos ambitions tous canaux confondus en 2013 ?
MdL. La Leon jouera un rôle crucial dans le développement de nos ventes sociétés. Quant à nos ambitions globales, elles sont très claires : nous voulons doubler les ventes de ce modèle. Cela pourrait représenter 10 000 immatriculations. En dessous, nous ne serons pas satisfaits. Nous pouvons compter sur de nombreux atouts. Déjà, nous avons une base de clientèle importante. Ensuite, nous allons mettre en avant une certaine accessibilité puisque la gamme va débuter à 15 000 euros environ, tout en offrant un vrai contenu technologique pour nos clients. Nous pourrons également compter, notamment pour les entreprises, sur un très faible niveau d’émissions de CO2, avec une version E-Ecomotive se limitant à 86 g/km. Cette nouvelle Leon est bien née et nous allons tout faire pour avoir des valeurs résiduelles à la hauteur du produit. Un produit dont le design sera également un atout important. En effet, cette Leon 5 portes est moins typée sportive que la précédente et ce sera un atout supplémentaire auprès des sociétés, comme la future variante ST.
JA. Les 10 000 unités visées en 2013 incluent-elles l’ensemble des trois carrosseries ?
MdL. Nous pourrons seulement compter sur la Leon 5 portes, qui sera lancée en janvier, et sur la 3 portes à partir du mois de juin prochain. En ce qui concerne la ST, nous aurons seulement des unités de démonstration en décembre 2013.
JA. Une fois Seat sur ses deux pieds avec l’Ibiza et la Leon, quel est le potentiel de la marque en France ?
MdL. Notre vision à cinq ans n’a pas changé : notre but est toujours de tangenter les 3 % de pénétration en France. Cet objectif demande des intermédiaires et, pour 2013, nous visons 2 %, ce qui serait une année historique pour la marque. La Leon est naturellement indispensable à ce projet, d’autant que son attractivité va également rejaillir sur les autres lignes de produits. Je conçois que ces objectifs soient ambitieux, d’autant que nous n’avons pas toujours atteint les précédents, mais aujourd’hui, nous couvrons beaucoup plus de segments que par le passé. Il nous manque encore un ou deux véhicules, mais ils arriveront.
JA. Vous avez évoqué la couverture du marché, quelle est-elle aujourd’hui ?
MdL. Avec la nouvelle gamme Leon, nous allons couvrir 72 % du marché. Nous devenons ainsi un constructeur généraliste sérieux. En outre, cette plus large couverture, ce potentiel supplémentaire, nous permettent de séduire de nouveaux investisseurs. Car la consolidation de notre réseau est également l’un de nos gros chantiers, même si je peux vous affirmer que la base de notre réseau est saine et solide. Durant le prochain exercice, notre but est de couvrir une douzaine d’open points. Nous allons démontrer avec la nouvelle Leon que nous pouvons retrouver de la profitabilité, et des marges de manœuvre.
JA. Comment votre réseau traverse-t-il cette année 2012 ?
MdL. Jusqu’ici, nous n’avons pas de “casse” car nous avons un réseau extrêmement sérieux. Pendant trois ans, il a affiché une rentabilité de 1 % et les dirigeants ont eu la sagesse et le bon sens de laisser de l’argent dans les affaires pour en faire des entreprises bien capitalisées. Malgré cela, l’année 2012 devrait se terminer dans le rouge bien que plus d’un tiers du réseau affiche toujours plus de 1 % de rentabilité. En moyenne, nous sommes aujourd’hui à - 0,5 %, mais nous ferons tout pour minimiser ce chiffre d’ici la fin de l’année. Beaucoup pourront le supporter une année, mais il n’est pas question de renouveler cela l’année prochaine. Nous allons travailler pour gommer les disparités et notre objectif est d’atteindre 1,5 % en 2013.
JA. La Leon est l’incontestable star du stand, mais vous y présentez aussi la nouvelle Toledo. Qu’attendez-vous de ce modèle en France ?
MdL. Il ne faut pas perdre de vue que nous avons une base de clients importante et fidèle. Cependant, nous ne sommes pas sourds aux changements de marché. La Toledo a atteint par le passé plus de 10 000 ventes par an, mais nous sommes conscients que celles de 2012 ne pourront retrouver un tel niveau. La Toledo d’aujourd’hui est un complément de gamme qui pourrait représenter jusqu’à 2 000 unités par an. Elle s’adresse à une clientèle attachée à Seat pour son dynamisme sans pour autant sacrifier son envie d’espace, de fonctionnalité, et sans oublier un certain côté rationnel que viendra conforter une grille tarifaire qui débute à 13 990 euros. Il y a vraiment de la place pour ce véhicule.
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