MAN veut carburer au B100
Pour Jean-Yves Kerbrat, directeur général de MAN Truck & Bus France, pas de doute : l’avenir du véhicule industriel sera électrique. Conscient de la mutation à l’œuvre dans l’industrie du poids lourd, le dirigeant rappelle toutefois que le "zéro émission" n’est pas pour demain : "En 2030, 90 % du parc sera toujours équipé de véhicules thermiques". Pour aider les professionnels du transport à faire face aux enjeux environnementaux avec une alternative aux carburants fossiles disponible immédiatement, le constructeur mise donc sur les biocarburants, et en particulier le B100.
Le 16 février 2022, la marque a ainsi lancé officiellement en France sa première offre en B100 sur les modèles TGS et TGX, équipés du moteur D 26 Euro6e. Ces véhicules sont tous équipés du capteur Greenbox, développé par la société aixoise SP3H. Placé au niveau du réservoir, ce dispositif analyse par spectrométrie le carburant afin de garantir l’usage exclusif du biocarburant, et ainsi bénéficier d’avantages fiscaux. Immatriculés avec l’identifiant B1, les camions MAN B100 exclusif donneront en effet accès au dispositif de suramortissement, disponible jusqu’en 2030. Le suramortissement s’élève à 40 % pour les véhicules d’un PTAC supérieur à 16 tonnes lors de la première immatriculation.
Le B100 pas (encore) éligible à Crit’Air 1
Mais au-delà des bénéfices fiscaux, cette nouvelle gamme de véhicules représente, selon le constructeur allemand, un moyen efficace pour ses clients de réduire rapidement leur empreinte carbone. En effet, le B100 garantit une réduction de 60 % des émissions de CO2 et de 80 % des particules fines. Ce carburant végétal est par ailleurs 100 % renouvelable et biodégradable.
Pour concevoir cette nouvelle offre, MAN s’est d’ailleurs entouré du groupe Saipol, producteur de l’Oleo100, un carburant issu de la production de colza français. Les deux partenaires ont mis au point une offre "tout compris" associant l’achat du véhicule avec un approvisionnement en Oleo100 et un contrat d’entretien spécifique. "Si la maintenance des véhicules B100 est globalement identique aux motorisations diesel, les intervalles d’entretien sont toutefois plus courts, réduits de moitié environ", précise Jean-Yves Kerbrat.
A lire aussi : Nouveau dispositif de soutien pour les poids lourds électriques
Autres contraintes du B100 : une légère surconsommation (+3 à 8 % par rapport au diesel selon les modèles) et, surtout, le carburant n’est pas éligible à la vignette Crit’Air 1, qui permet d’accéder aux zones à faibles émissions (ZFE). Une situation que le constructeur espère voir évoluer. "Nous pensons que la profession doit se mobiliser davantage sur l’utilisation des biocarburants. C’est une réglementation qui a été mise en place en 2015, les biocarburants n’étaient pas aussi développés. Nous devons faire la promotion de ces solutions de transition", insiste le directeur général de la marque.
Une organisation spécifique pour le ravitaillement
Sur le terrain, malgré ces quelques handicaps, le B100 semble toutefois séduire. C’est le cas notamment de Pascal Urano, directeur de Truck Location, qui s’est vu remettre le premier tracteur MAN TGS B100. L’entreprise spécialisée dans la location de véhicules de plus de 3,5 tonnes a misé sur le biocarburant pour amorcer la transition énergétique de sa flotte.
"Truck Location dispose de 40 véhicules qui tournent déjà au colza. Aujourd’hui, nous avons reçu notre premier camion en B100 avec une carte grise B1 […]. A terme, nous voulons passer l’ensemble de notre flotte en B100", annonce le dirigeant. Au total, Truck Location disposera ainsi de 120 camions B100 et de 90 véhicules "rétrofités" pour rouler avec l’agrocarburant.
L’entreprise a toutefois dû mettre en place une organisation spécifique pour convertir sa flotte : les capacités des réservoirs des véhicules ont été augmentés pour bénéficier d’une meilleure autonomie et 7 porteurs ravitailleurs ont été mis la route pour fluidifier l’approvisionnement.
Déjà 10 % des ventes de poids lourds
Estimant que le B100 devrait permettre de répondre à "80 à 90 % des cas d’usages" chez les transporteurs, Jean-Yves Kerbrat se montre optimiste quant à l’avenir de cette solution de transition. "Aujourd’hui 10 % des ventes de poids lourds sont en biocarburant non exclusif, et la tendance est à la hausse", ajoute-t-il.
Dans le transport de voyageurs, c’est déjà le cas puisque l’évolution du mix énergétique dans les ventes de bus et cars de la marque est clairement favorable aux biodiesels. Si ces motorisations alternatives représentaient 22 % des volumes de MAN et Neoplan en 2020, cette part devrait grimper à 55 % en 2022. De bon augure pour le constructeur allemand qui estime que le marché bus et cars a souvent une avance d’un ou deux ans sur celui des camions.
Sur le même sujet
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.