Les concessionnaires Citroën face à leur destin
Citroën a choisi de se désengager. Il y a un an, la direction de la marque a annoncé qu’elle remettrait les clés de la gestion des réseaux informatiques à ses concessionnaires. Au 30 juin prochain, Citroën France ne gérera donc plus le réseau MPLS qu’elle avait mis en place pour assurer les échanges bilatéraux de données avec ses distributeurs. Le constructeur ne conservera qu’un rôle de conseil dans l’aménagement des structures de substitution.
Dans l’absolu, ce n’est pas une situation de crise, mais il est évident que cela soulève quelques problématiques sur lesquelles le groupement des concessionnaires planche depuis le jour où le constructeur a dévoilé son projet de retrait. En effet, tant que Citroën avait la main sur les architectures, les distributeurs ne prêtaient que peu d’attention à ce sujet. Pour résumer, il ne leur était demandé que d’avoir une connexion Internet. Désormais, ils devront tout assumer.
De là, apparaissent certaines disparités : il y a les groupes qui ont une sensibilité aux problématiques informatiques et qui se sont donc renforcés, en recrutant des responsables de service, et il y a les autres. Pour le groupement, il n’est pas question de stigmatiser une partie des distributeurs mais de trouver le moyen de mettre, autant que faire se peut, tout le monde sur un pied d’égalité.
“Nous avons fait le travail en amont pour faciliter les négociations ultérieures”, récapitule José Menon, membre de la commission informatique du groupement des concessionnaires. Les négociations qu’il évoque, sont les conditions auxquelles vont être sous peu confrontés les distributeurs qui n’ont pas encore pris leurs dispositions pour répondre aux exigences de Citroën.
Accord-cadre avec France Télécom et CityPassenger
Au matin du 1er juillet prochain, il leur faudra impérativement disposer d’un réseau de communication sécurisé pour échanger des données commerciales avec le constructeur. Les concessionnaires doivent donc d’ici à cette échéance, souscrire une offre d’accès Internet et s’équiper de boîtiers de sécurité.
Pour trouver le meilleur compromis, le groupement a donc lancé un appel d’offres. “C’était une opportunité de négocier, sans que Citroën intervienne, des accords pour optimiser techniquement et économiquement nos infrastructures”, explique José Menon. Les représentants ont donc “provoqué une rencontre” et mis en compétition les offres des trois principaux fournisseurs. Au grand dam de SFR et de Bouygues Télécom, c’est Orange (France Télécom) qui a été retenu. “Nous avons fait ce choix pour des questions de tarification mais surtout pour la stabilité du réseau Internet, explique le porte-parole de la commission informatique. Cependant, l’inconvénient de France Télécom est que nous sommes confrontés à une grosse structure, avec tout ce qui la caractérise. Nous avons donc décidé d’y associer un prestataire pour bâtir et gérer le réseau VPN”. Entre alors en jeu CityPassenger, société française spécialisée dans les solutions réseau via des boîtiers A-Switch.
Fort d’une expérience auprès des plus grands groupes de distribution français et de la quasi-totalité des marques du paysage, Bruno Duval, le président de CityPassenger, avait tous les arguments pour défendre son dossier, en particulier ceux du tarif et de la technologie. “Au final, calcule brièvement José Menon, nous avons gagné environ 20 % sur les prix, par rapport à l’ancien système dont Citroën refacturait la prestation.” Et Grégory Turpin, DSI du groupe picard Sima, de donner un tarif : Avec CityPassenger, le concessionnaire loue le boîtier 87 euros par mois et par site (125 utilisateurs), paye son abonnement Internet de 8 Mo, 76 euros/mois et gère l’ensemble des connexions grâce à un autre A-Switch, à environ 450 euros par mois.
Si ce dernier descriptif n’est qu’un schéma d’organisation possible parmi tant d’autres, le principe ne varie que peu ou prou. En poussant la solution CityPassenger dans le réseau, le groupement a souhaité encourager les directeurs de services informatiques à repenser leur architecture. Il faut dire qu’il y a une réelle différence selon les versions adoptées. Une rapide consultation de DSI issus de diverses marques confirme ce fait. Patrick Arnoux, responsable du service informatique du groupe Rédélé, distributeur historique Renault en Ile-de-France, expliquait qu’entre une solution commercialisée par France Télécom et l’offre CityPassenger, on pouvait passer d’un budget de 100 000 euros à seulement 12 000 euros sur 36 mois pour deux boîtiers A-Switch ! Comment expliquer cet écart ? Les raisons sont multiples. Elles peuvent résulter d’un coût de service mais également d’une surestimation des besoins. “Il faut éviter de prendre le seul avis des conseillers commerciaux des fournisseurs Internet, avertit Philippe Pouly, DSI du groupe Schuller (MSA), ils n’ont pas forcément la fibre technique. Le risque est alors de payer cher pour une installation inadaptée”. Une mise en garde qui fait écho au discours de José Menon qui invite les membres du groupement au partage d’expérience, sinon à faire appel aux lumières des techniciens de CityPassenger.
A chaque problématique son application
Le premier enjeu d’un réseau VPN est de fiabiliser les systèmes de sécurité. “Dans un contexte de groupe, où toutes les concessions communiquent entre elles par l’intermédiaire du DMS, si un poste est contaminé par un virus, c’est toute la plaque qui tombe sous la menace”, prévient encore Philippe Pouly, de MSA. Pis, le programme malveillant pourrait remonter par les canaux du constructeur et infecter les réseaux d’autres concessions. Il faut donc tout verrouiller. Une fonction que remplissent les boîtiers VPN de CityPassenger. En plus d’avoir instauré une “charte informatique”, qui engage les employés à respecter des règles élémentaires, le groupe MSA s’est équipé des produits de Bruno Duval avec lesquels il contrôle les connexions à Internet. Le gestionnaire de parc peut ainsi poser des conditions suivant la logique des “listes noires” et “listes blanches”, soit des listes qui, respectivement, interdisent ou autorisent de manière restreinte l’accès à des sites Internet prédéterminés.
Au-delà de l’aspect sécuritaire, cette caractéristique du boîtier a une dimension fonctionnelle. A l’instar de Citroën Contact, l’outil lancé en milieu d’année 2010, qui propose aux conseillers commerciaux de remplir les bons de commande directement en ligne, la multiplication des applicatifs métiers nécessite de plus en plus de ressources. Les concessions ne peuvent donc plus se permettre de laisser leurs collaborateurs saturer la bande passante en surfant à titre privé et doivent maintenant être capables de hiérarchiser les priorités. Imaginez donc que le boîtier, bien programmé, peut orienter les flux principalement sur les après-vente dans la journée et sur les back-office, le soir, à l’heure des remontées d’informations vers le siège du constructeur.
Il y a d’autres applications envisageables. Elles sont nombreuses et motivent l’imagination des DSI. A titre d’exemple, le boîtier VPN de CityPassenger peut intégrer, dans l’écosystème, des postes mobiles qui auraient accès à Internet au moyen de clés 3G. Mais on peut aller plus loin aussi. Grégory Turpin, du groupe Sima, s’est inspiré des recommandations de BMW - autre marque du groupe - pour développer une offre de connectivité Wifi dans les points de vente Citroën. “Le client se présente à l’accueil, nous lui attribuons un compte et un mot de passe provisoire. Dès lors, il peut se connecter avec son propre matériel. Nous, nous régulons le hot spot Wifi”, explique-t-il. Techniquement facile à mettre en place, en toute sécurité, les constructeurs restent cependant encore frileux devant cette innovation, alors que le gain est réel pour les visiteurs de l’après-vente “prisonniers” de la salle d’attente.
Comme les membres composant le réseau Citroën, tous les constructeurs ne sont pas égaux devant les problématiques informatiques. Renault est, de l’avis de tous, le plus en avance sur le sujet. Rappelons que, dès 2004, la marque au losange imposait l’Internet en haut débit. Depuis, les autres ont suivi. Chez Volkswagen, par exemple, “les choses ne sont pas simples car le constructeur sous-traite sur trois niveaux”, remarquent les responsables. T-Systems choisit les plages IP du réseau français, contacte la cellule télécommunication de VW qui sollicite France Télécom pour la réalisation des travaux. Les concessions sont ensuite reliées à un serveur en Allemagne. “Il n’y a aucune communication sur ce sujet entre la marque et le réseau, déplore Philippe Pouly, ni même un spécialiste pour nous accompagner”. Le groupement des concessionnaires Citroën aborde une phase délicate. Les pièges sont multiples. Les équipes semblent avoir pris le sujet par le bon bout et s’être entourées des partenaires adéquats. “Avec nos solutions, les concessions achètent la possibilité de piloter leur affaire sans s’appuyer entièrement sur France Télécom et leur boîtier Netask, a souligné Bruno Duval. Nous nous félicitons d’avoir été retenus par le groupement des concessionnaires Citroën”. Fort de nombre de propositions à leur suggérer pour améliorer leur infrastructure, le président de CityPassenger pourrait prochainement leur glisser l’idée de migrer leurs lignes téléphoniques traditionnelles à la VoIP (voix sur IP) afin de réduire très nettement leurs factures de communication.
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