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Constructeurs

La Chine place ses pions sur l’échiquier automobile mondial

Publié le 22 juin 2011

Par Alexandre Guillet
5 min de lecture
Alors que la croissance tend à devenir plus mesurée sur leur marché domestique, plusieurs constructeurs chinois lèvent des fonds pour investir sur d’autres marchés émergents en Asie, en Afrique et en Amérique du Sud. Chery, Brilliance, Great Wall, JAC ou encore Lifan sont notamment en première ligne.
“Les pays émergents présentent un potentiel important pour les segments d’entrée de gamme et les modèles très accessibles. Or, c’est précisément le territoire de prédilection des constructeurs chinois”, met en exergue Namrita Chow, analyste pour IHS.

“Ces dernières années, les constructeurs chinois ont connu un fort développement en tirant profit de la croissance de leur marché domestique, mais leurs dirigeants tablent désormais sur un ralentissement de l’explosion des ventes et se tournent donc vers d’autres marchés”, souligne en préambule Namrita Chow, analyste pour IHS au bureau de Shanghai. En jouant sur le levier des banques qu’il détient, le gouvernement chinois les incite d’ailleurs à aller dans ce sens, d’autant plus qu’il finance le développement de nombreux projets de développement hors de ses frontières. Cependant, conscients de leur force mais aussi de leurs limites, les dirigeants de la “bulle” automobile chinoise ne ciblent pas les marchés matures, Etats-Unis, Europe et Japon, à la fois trop exigeants et concurrentiels, mais privilégient les marchés émergents. Une stratégie avisée qui s’articule actuellement autour de trois priorités : l’Asie, l’Afrique et l’Amérique du Sud.

Chery sur tous les fronts

Dans le détail, on constate ainsi que Chery, avec l’appui de la China Development Bank, vient d’obtenir une enveloppe de 6,58 milliards de $US pour renforcer ses unités de R&D ainsi que sa présence sur de nouveaux marchés. Dans le même temps, le China Africa Development Fund, créé en 1997 et qui planifie 5 milliards de $US d’investissements sur cinq ans sur le continent africain, est en négociations avec Chery pour financer l’ouverture d’une usine dans cette zone. Par ailleurs, Chery a annoncé fin mai son projet d’implantation au Myanmar, quelques jours après que le pays et la China Development Bank ont signé un accord de développement de 765 millions de $US. En outre, Chery a débloqué 200 millions de $US pour construire un site au Venezuela, ce qui constituerait sa troisième implantation en Amérique du Sud, une usine de 400 millions de $US étant en cours de construction à Sao Paolo, au Brésil, en plus du site existant en Uruguay. De son côté, Great Wall, qui achève actuellement la construction d’une usine en Bulgarie, usine qui doit assembler ses premiers véhicules à la fin de l’année, prévoit de créer trois autres nouvelles usines hors de Chine d’ici 2015, même si le dossier est conditionné par l’obtention de quelque 800 millions de $US via une introduction en Bourse en Chine.

Lifan, Brilliance et JAC au diapason

Lifan et Brilliance sont aussi très actifs en Afrique. Ainsi, après avoir créé la structure Africa Huachen Investment Company l’an dernier, Brilliance a signé un protocole d’accord avec le Beijing Runfar Investment Group afin de constituer une JV pour construire une usine au Bénin, pour un investissement estimé à 46 millions de $US. Le site de Cotonou sera dans un premier temps doté d’une capacité de production annuelle de 50 000 unités. Dans le même temps, Lifan a annoncé une extension de son usine en Ethiopie, où est assemblé le modèle 520 depuis 2010. Chez JAC, au-delà d’un projet d’implantation en Turquie, l’intérêt se focalise sur l’Amérique du Sud, et le groupe vient de provisionner 220 millions de $US supplémentaires pour faciliter l’exportation de voitures et de camions vers le Brésil, via SHC Group. Une usine est aussi en cours de construction en Argentine et les négociations vont bon train pour une création de site au Mexique. L’objectif affiché par JAC consiste à se concentrer sur le segment des compactes pour venir concurrencer les Fiat Palio et Siena, les Volkswagen Fox et Voyage, les Renault Sandero et Logan ou encore les Ford Fiesta et Chevrolet Corsa. Enfin, bien qu’aucun nouveau projet n’ait été annoncé, on peut noter que SAIC Motor vient d’obtenir l’autorisation pour une levée de fonds, via des émissions d’actions, à hauteur de 4,4 milliards de $US.

Les deux atouts maîtres des constructeurs chinois

D’une manière générale, les échanges entre la Chine et les pays émergents se développent très significativement. Avec le continent africain par exemple, ils se sont établis à plus d’un milliard de $US en 2010, soit onze fois plus qu’en 2000. “En Afrique, où les quatre principaux marchés automobiles sont l’Egypte, le Maroc, la Tunisie et l’Afrique du Sud, il s’est immatriculé 637 308 VP et 202 565 VUL en 2010. Chez IHS, nous prévoyons une très forte croissance d’ici 2015 : un million de VP et près de 315 000 VUL. Les constructeurs chinois ne représentaient que 4 % des ventes en 2010, mais le gouvernement en a fait une priorité, et les projets se multiplient”, indique Namrita Chow, avant d’ajouter : “L’approche est similaire pour l’Amérique du Sud, un marché qui pesait 3,6 millions de VP et 1,19 million de VUL en 2010. Les Chinois ne détiennent que 1,3 % de parts de marché et le gouvernement veut accélérer le mouvement. D’où les projets qui se précisent nettement.” De surcroît, le gouvernement chinois ne néglige pas la zone Asie et pousse les constructeurs à s’étendre au Vietnam, au Cambodge ou en République de l’Union du Myanmar. Même si la concurrence est rude et que les constructeurs chinois ne sont pas encore aux standards des constructeurs traditionnels, ils bénéficient aux yeux de Namrita Chow de deux atouts fondamentaux : “Au premier chef, la Chine est souvent très active dans les pays émergents, en investissant fortement dans les infrastructures lourdes, comme les routes, les voies ferrées ou encore les mines. Ce soutien global sert forcément les constructeurs chinois. En outre, ces pays présentent un potentiel important pour les segments d’entrée de gamme et les modèles très accessibles. Or, c’est précisément le territoire de prédilection des constructeurs chinois.”

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