Grand Prix : Nouvelle donne
...à Melbourne pour se terminer le 16 octobre à Shanghai. Avant cet ultime rendez-vous en Chine, pays désormais sous les feux de la rampe d'un point de vue économique, 18 manches auront été disputées, dont une nouvelle à Istanbul, en Turquie. Record absolu ! Plus prosaïquement, la F1 s'exporte bien, d'autant qu'elle doit de plus en plus composer avec le lobby antitabac frappant bon nombre de pays de la Communauté…
Mais, au-delà du nouveau calendrier, ce sont bien les nouvelles règles techniques édictées par la FIA qui créent l'actualité. Dans les faits, les évolutions concernent trois domaines. Il y a d'abord l'aérodynamique. Les modifications font état d'une élévation de l'aileron avant de 50 mm, une avancée de 150 mm de tout l'ensemble constituant l'aileron arrière et une diminution de 125 mm de la hauteur du diffuseur. Le tout avec pour conséquence directe une diminution des appuis "aéro" évaluée à 25 % par les différentes équipes. "Sur les circuits à charge élevée comme Monaco ou Budapest, les niveaux d'appui seront plus bas qu'en 2004 puisque notre potentiel maximum sera limité, confesse Pat Symonds, directeur exécutif de l'ingénierie de Renault F1 Team. Cependant, sur des circuits comme Monza, nous utiliserons une charge similaire à celle de l'année dernière." Reste que les ingénieurs rivalisent d'ingéniosité pour retrouver de l'appui. D'où l'apparition sur les monoplaces 2005 de bon nombre de dérives aux formes plus ou moins originales. Un arbre qui cache la forêt dans la mesure où, chez McLaren par exemple, les concepteurs de la MP4-20 avouent que les changements intervenus au niveau de l'aileron avant ont débouché sur une refonte complète du système de flux d'air dédié au refroidissement des freins et du moteur.
Les deux manufacturiers présents en F1 ont procédé à un recentrage des mélanges
Deuxième domaine sur la sellette : les pneumatiques. Jusqu'à fin 2004, et ceci en prenant en compte une course émaillée de trois ravitaillements, un train de pneus parcourait en moyenne 80 km. En 2005, le même train devra effectuer les deux séances de qualifications et la course complète, c'est-à-dire 350 à 400 km. Le mode d'emploi ? Deux types de pneus sont mis à disposition des écuries, trois trains de chaque étant prévus par voiture (avec en plus un train de pneus pluie). Le vendredi, lors des essais libres, chaque pilote compare un train de A et un train de B. Le vendredi soir ou le samedi matin, chaque équipe doit déterminer son choix. Si le B est choisi, il reste donc deux trains neufs plus le train du vendredi, plutôt "éprouvé". Le 2e train roulera le samedi matin pour les deux séances libres. Quant au 3e train, il fera les qualifications du samedi après-midi et du dimanche matin, plus toute la course. Sur ces nouvelles bases, Bridgestone et Michelin, les deux manufacturiers présents en F1 (fort heureusement pour l'intérêt de la discipline, l'idée d'un manufacturier unique à l'horizon 2006 ne semble plus d'actualité), ont élaboré des produits à gomme dure. Mais le scénario n'est pas aussi simple, comme l'explique Pierre Dupasquier, le patron de Michelin Compétition. "Nous avons commencé par travailler sur l'endurance de la carcasse, confesse-t-il. Plus précisément, nous avons repensé son architecture en fonction de notre technologie et des matériaux employés, ceci pour faire en sorte d'obtenir un maximum de contact avec le sol tout en améliorant la notion d'endurance. En outre, nous avons opéré un recentrage des mélanges afin que l'usure demeure inférieure à la distance. Bien sûr, à partir du moment où nous avons travaillé en "virtuel", il nous faudra par la suite procéder à certains ajustements en fonction des circuits, le but final étant d'obtenir un maximum de constance sur toute la durée de l'épreuve. L'exercice n'est pas simple dans la mesure où les rainures compliquent le phénomène d'usure." Auparavant, la démarche était celle-ci : lorsqu'il proposait un produit un peu "juste" sur le plan de l'endurance, le manufacturier avait la possibilité de résoudre le problème en modifiant la stratégie de course. "Par exemple, nous pouvions passer très facilement de deux à trois arrêts, rappelle Pierre Dupasquier. Aujourd'hui, ce n'est plus possible. De ce fait, on peut s'attendre à des surprises…" Surprises d'autant plus prévisibles qu'un autre élément doit être pris en considération : la diminution des appuis. En effet, la perte de charges verticales augmente le glissement, donc l'usure. Un phénomène évidemment variable en fonction des écuries dans la mesure où elles ne partent pas toutes du même niveau. Mais, surtout, un cercle vicieux qui prend encore plus de relief avec une gomme dure, dont la montée en température sera plus longue…
Maintenant, une question s'impose : quelle procédure appliquer si un pilote "fusille" son train de pneus aux trois quarts de la course, ou même si un pneu crève ou éclate ? Là, le flou est encore de mise au niveau de la FIA. A une nuance près. Selon les uns, elle ne prendra aucun risque sur le plan de la sécurité et, de ce fait, acceptera le remplacement d'un pneu endommagé par un pneu du même type ayant déjà roulé. "Le tout est de définir exactement ce qu'est un pneu endommagé, note
FOCUSLe calendrier 2005
(Hockenheim) (Spa-Francorchamps) |
La règle du moteur unique pour deux courses a entravé (momentanément) la course à la puissance
Et puis, il y a le moteur. En 2005, il devra disputer non plus les qualifications et la course, mais les qualifications et deux courses d'affilée. Soit une distance d'environ 1 400 km, contre 700 km auparavant. "Pour nous, il s'agit d'un véritable challenge. Certes, nous le savions… Si surprise il y a, celle-ci réside plutôt dans les délais d'application de ce type d'expertise technique. Il faut prendre en considération que la genèse même des moteurs type 2005 (et il en va ainsi de notre nouveau bloc RS25 à 72°) s'est opérée avant que la règle du moteur unique pour deux Grands Prix soit soumise au cahier des charges", souligne Denis Chevrier, responsable de l'exploitation "moteur" au sein de Renault F1 Team. Autre aspect du problème, les motoristes avaient déjà défini un "step" significatif la saison dernière. Or, aujourd'hui, ils doivent composer avec des pièces d'usure dont la durée de vie a été multipliée par quatre, en prenant pour référence la saison 2003. Denis Chevrier reprend : "Il faut savoir que les pièces les plus exposées sont celles qui, traditionnellement, supportent toute la charge avec à la clé une notion de fatigue, d'usure due au nombre de cycles auxquels elles sont soumises. Il en va ainsi de l'ensemble mobile pistons, bielles, vilebrequin et, bien sûr, de la distribution. Dans ce contexte, certaines d'entre elles, et c'est bien le cas des pistons et des soupapes notamment, faisaient auparavant l'objet d'un remplacement systématique. D'où l'importance de l'enjeu aujourd'hui." Ainsi, en intégrant ce nouveau cahier des charges, tous les motoristes se sont fixés comme objectif technique d'atteindre en ce début de saison un certain niveau de performance, de résistance en température, etc., le tout à un niveau de régime… très probablement en deçà du niveau atteint fin 2004. C'est-à-dire un régime se situant entre 18 000 tr/min et 19 000 tr/min selon les constructeurs ! En effet, même s'ils ne l'avouent pas ouvertement, certains motoristes se donnent au moins trois courses pour revenir au niveau de régime de 2004. "De toute façon, nous sommes bien conscients qu'il fallait faire quelque chose, admet Denis Chevrier. En effet, sans ce nouveau challenge, nous aurions pu assez facilement gagner 500 tr/min durant l'intersaison." Eh oui ! La course à la puissance, puisque c'est bien d'elle dont il s'agit, demeure un challenge permanent.
Marc David
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