S'abonner
Constructeurs

Entretien avec Yutaka Higashikubo, président et Jean-Luc de la Ruffie, directeur commercial de Suzuki France.

Publié le 23 septembre 2005

Par Tanguy Merrien
10 min de lecture
Surfant sur le succès, Suzuki France vise la barre des 25 000 immatriculations, soit 1 % du marché à l'horizon 2007. Yutaka Higashikubo et Jean-Luc de la Ruffie, respectivement président et directeur commercial font preuve d'ambition et ne s'en cachent pas. Leur stratégie repose notamment sur un...
Surfant sur le succès, Suzuki France vise la barre des 25 000 immatriculations, soit 1 % du marché à l'horizon 2007. Yutaka Higashikubo et Jean-Luc de la Ruffie, respectivement président et directeur commercial font preuve d'ambition et ne s'en cachent pas. Leur stratégie repose notamment sur un...

...réseau étoffé et rentable.


Journal de l'Automobile. Avec 18 707 unités (VP + VU) commercialisées en 2004, Suzuki a battu son record d'immatriculations en France. Vous êtes optimiste pour l'exercice 2005 avec un objectif de 22 500 ventes. Quelle analyse portez-vous sur ces chiffres ?
Yutaka Higashikubo : Les résultats obtenus l'an passé nous ont satisfaits avec des ventes en augmentation de + 40 % par rapport à l'exercice précédent. Toutefois, ces résultats ne sont qu'une première étape. La commercialisation cette année de la Swift et du Grand Vitara vont permettre à nos ventes de franchir un échelon supplémentaire avec un objectif de 21 500 unités. Précisons, toutefois, que notre objectif a été revu à la baisse de 1 000 unités par rapport à ce qui avait été annoncé en début d'année. Par ailleurs, nous sommes également satisfaits des résultats globaux de la société Suzuki France (auto et moto) avec un chiffre d'affaires de 1,55 milliard d'euros et un bénéfice de 2 millions d'euros. Dans ces chiffres, l'activité de la division automobile représente 60 % du chiffre d'affaires global.


JA. A fin juin, la marque totalisait 10 259 (VP + VU) ventes. Vous pensez donc atteindre votre objectif ?
YH. En terme de ventes, le démarrage de l'année a été tardif notamment en raison du manque de produits. Nous n'avons pas pu livrer et immatriculer toutes les Swift en raison d'une forte demande autour de ce produit. Cependant, à la fin du premier semestre et de surcroît avec la sortie du Grand Vitara, nous allons rattraper notre retard. Outre ces deux produits qui constituent les événements majeurs pour nous cette année et additionnés aux autres véhicules de notre gamme, nous pensons résolument atteindre l'objectif de 21 500 unités, ce qui constitue pour Suzuki un nouveau record en France.

JA. Quelle sera la ventilation des ventes pour atteindre ce chiffre ?
YH. Le Liana devrait représenter 500 unités, l'Alto et le WagonR 1 000 chacun, 1 500 ventes pour le Vitara et 2 500 pour l'Ignis. De son côté, le Jimny devrait atteindre 4 500 unités. Enfin, nos deux nouveautés, le Grand Vitara et la Swift, devraient représenter respectivement 6 100 et 5 400 unités.

JA. Lancée en avril dernier la Swift semble porter beaucoup d'espoir en elle. N'est-ce pas également un tournant que semble prendre la marque Suzuki en passant peu à peu d'un statut de constructeur spécialiste à celui de généraliste ?
YH. La Swift n'est pas la seule voiture de notre gamme. Les prochaines années, notre stratégie produit portera sur deux axes principaux : la Swift, certes, mais également le Grand Vitara. A terme, nous espérons immatriculer 10 000 unités pour chacun de ces deux véhicules. Quant à la deuxième partie de la question, j'aimerais rappeler que Suzuki reste un spécialiste 4x4 au Japon tout en étant la marque leader sur le segment des petites voitures. Notre stratégie ne changera pas : nous ne serons ni un constructeur spécialiste ni un constructeur généraliste. Nous n'avons aucune ambition de changer de statut.

JA. Quels sont les prochains événements produits pour Suzuki ?
YH. Hormis le lancement du Grand Vitara, prévu dans les jours qui viennent, la gamme Suzuki se verra compléter en mars prochain d'un nouveau SUV produit en collaboration avec Fiat. En 2007, il y aura le lancement du nouveau WagonR puis, un an après, notre gamme sera composée d'une nouvelle petite voiture du segment A. Globalement, la marque devrait lancer une nouveauté par an, ce qui est déjà une belle réussite.

JA. Les résultats vous donnent raison et les ambitions ne manquent pas. Quels sont les prochaines étapes de Suzuki en France à court et moyen terme ?
YH. Une fois l'objectif des 21 500 unités atteint cette année, la seconde étape sera les 25 000 ventes à l'horizon 2007 qui nous permettrait ainsi de réaliser les 1 % de part de marché en France. Nous avons ensuite les yeux braqués sur 2010 date à laquelle nous souhaiterions doubler notre volume de vente. C'est un objectif qui toutefois n'est pas encore finalisé. Passons d'abord le cap des 25 000 unités. Suzuki fait preuve d'ambition et met tout en œuvre pour atteindre ces objectifs. La maison mère au Japon a décidé d'augmenter son chiffre d'affaires de 18 milliards d'euros à 25 milliards d'euros. Pour y arriver, Suzuki se doit d'être plus performant sur les marchés américain et européen. Aux Etats-Unis, la marque s'est fixé l'objectif des 300 000 voitures d'ici trois ans et celui des 350 000 unités en Europe dans les deux ans à venir. Pour réussir à atteindre cet objectif sur le Vieux Continent, la France est un passage obligé. A l'heure actuelle, nous réalisons 2 % de parts de marché en Europe contre moins de 1 % en France. Il y a un écart certes, mais pour l'instant, cet écart nous convient. Le marché français reste un marché difficile sur lequel il faut être patient.

JA. Justement, quel regard portez-vous sur le marché français ?
YH. Depuis quelques années, le marché en France reste stable au-delà des 2 millions d'unités. J'estime qu'il a atteint son potentiel et ne devrait pas dépasser les 2,5 millions à l'avenir. Par ailleurs, malgré la nette domination des marques nationales, l'écart a tendance à se réduire. Les constructeurs français auront de plus en plus de mal à conserver leur leadership. Ils doivent faire face à la politique de prix agressive des marques asiatiques particulièrement performantes dans ce domaine. Je crois même que les marques européennes auront du mal à l'avenir à conserver leur taux de pénétration.

JA. Quelle est la politique de Suzuki pour les ventes sociétés ? Jean-Luc de la Ruffie. Nous n'avons pas de politique de ventes sociétés bien que ce soit un marché prospère. A l'heure actuelle, nous disposons juste d'un accord avec EDF mais nous n'avons pas l'intention de développer ce secteur. En revanche, nos distributeurs reçoivent une aide financière de notre part pour leur permettre de développer leurs affaires dans ce sens.

JA. Lors de l'entrée en vigueur du nouveau de contrat de distribution, vous êtes le seul à avoir choisi, avec Porsche, la distribution exclusive. Quel recul avez-vous sur ce choix ?
YH. Je reste persuadé que ce choix ne fut pas mauvais même si deux ans après l'entrée en vigueur des nouveaux contrats de distribution, il est encore trop tôt pour en tirer des conclusions. Cependant, notre réseau s'est considérablement protégé et développé. Juste avant le nouveau contrat de distribution, il faut se souvenir que Suzuki France ainsi que son réseau étaient assez petits et peu représentatifs. Notre système de distribution exclusive a notamment permis à nos opérateurs de protéger leurs territoires, ce qui était le but recherché. Pour l'avenir et compte tenu de notre évolution, nous verrons si nous conserverons ce système.

JA. L'année 2004 a souri au réseau Suzuki avec 28 créations de sites. Le réseau comptait en fin d'année 190 points de vente pour 154 opérateurs. Qu'est-ce qui pousse les distributeurs à signer chez vous ?
J-L.R. Deux éléments essentiels sont la clé de notre réussite dans le recrutement de nos opérateurs et dans le développement de nos points de vente. Premièrement, la qualité et la fiabilité de nos produits qui montrent le dynamisme d'une marque comme la nôtre. Par ailleurs, il convient de souligner la bonne rentabilité de notre réseau situé entre 1,5 et 1,7 % après impôts. Sans trop en dévoiler, nous reconnaissons que nous laissons une marge faciale très importante sur nos produits permettant ainsi à nos distributeurs de s'en sortir. La marge sur un véhicule comme la Swift est bien supérieure à ce qui existe dans les marques concurrentes. Notre système de rémunération mis en place est alléchant, simple et intéressant. Notre réseau attire d'ailleurs de plus en plus de candidats et nous nous en réjouissons. Même si nous sommes obligés d'en refuser ces derniers temps.

JA. Justement, avez-vous fixé une limite en terme de recrutement réseau ?
J-L.R. Comme vous l'avez rappelé, nous disposons aujourd'hui de 190 points de vente, ce qui représente aujourd'hui une capillarité relativement importante. C'est d'ailleurs pour cela que nous nous limiterons à 200 points de vente. Nous nous en approchons mais la mise en place de notre réseau n'est pas terminée pour autant. Certains sites primaires disparaîtront probablement pour devenir des annexes. A terme, notre réseau, une fois accompli, se composera de 150 sites primaires pour 50 annexes. Quant au nombre d'opérateurs, il ne devrait pas bouger outre mesure.

JA. Globalement, si on s'arrête sur vos chiffres, la moyenne du réseau Suzuki serait de 110 VN par point de vente, autrement dit une moyenne élevée ?
J-L.R. Cela ne reste qu'une moyenne ! Si elle est importante, elle doit néanmoins être prise avec précautions. Dans les petites agglomérations, nos distributeurs sont bien en deçà de ce chiffre mais si une marque comme la nôtre n'est pas présente dans ces petites agglomérations, Suzuki n'atteint pas ses objectifs. Si une moyenne est importante et donne de bonnes indications, elle reste toutefois relative.

JA. Où en est la nouvelle identification des réseaux ?
YH. Pour la première fois depuis 1984, le réseau Suzuki va arborer une nouvelle identification avec des normes et des structures adaptées. Chaque distributeur recevra sur son point de vente des panneaux directionnels, des bandeaux et des totems de 6 mètres de hauteur. Si tout se déroule comme prévu, la mise aux normes de nos points de vente sera terminée aux alentours du 15 septembre. Je tiens à signaler que Suzuki a intégralement payé les frais de ces mises aux normes sauf ce qui allait au-delà des standards édictés.

JA. Alors que la plupart des marques ont du mal à être représentées à Paris sans succursales, Suzuki a réussi son implantation. Quelle est la recette ?
J-L.R. Notre maison mère au Japon a toujours souhaité disposer d'au moins une représentation dans les grandes villes comme c'est le cas aujourd'hui à Londres, Milan ou Paris. Les distributeurs privés sont de plus en plus rares dans ces villes et il est difficile pour eux de s'y maintenir. A Paris, une solution s'est imposée d'elle-même : nous avons racheté les locaux du site du 15e arrondissement pour les confier en location à un distributeur (groupe Lafranchis). Aujourd'hui, ce groupe possède dans Paris intra-muros deux points de vente et un service après-vente, largement suffisant pour nous. Cette solution est excellente. Il faut rappeler que chacun fait son métier : nous mettons à disposition tous les moyens possibles à l'opérateur et celui-ci distribue au mieux notre marque. A l'heure actuelle, le système marche : le groupe Lafranchis commercialise 700 VN dans Paris et espère vendre 1 000 VN dès l'an prochain. En outre, quoiqu'il arrive, nous sommes désormais dans nos locaux à Paris.

JA. Que vous inspire la suppression de la clause de localisation le mois prochain ?
YH. Depuis quelques années les constructeurs et les réseaux ont travaillé de concert pour préparer la nouvelle réglementation européenne. Tout est désormais en place, tout est défini et je pense sincèrement que rien ne va aujourd'hui changer.


Propos recueillis par Tanguy Merrien

Vous devez activer le javacript et la gestion des cookies pour bénéficier de toutes les fonctionnalités.
Partager :

Sur le même sujet

Laisser un commentaire

cross-circle