Entretien avec Jacques Chauvet, directeur commercial France Renault.
...de Jacques Chauvet.
Journal de l'Automobile. Vous aviez annoncé que l'année 2006 serait difficile, l'est-elle plus que prévue ?
Jacques Chauvet. Nous avions effectivement dit que 2006 serait une année de résistance. Le marché est en baisse malgré un niveau de promotion très agressif de la part de certains constructeurs. En outre, les taux d'intérêt plus élevés ont augmenté le coût du crédit. Pour notre part, nous avons perdu 1,5 point de part de marché en VP mais nous enregistrons de bons résultats sur le VU. Renault réalise 24 % du marché VP à fin août et 33 % du marché VU. Cependant, il y a plus de clients particuliers qui ont acheté une voiture du groupe Renault qu'en 2005. Notre pénétration sur les ventes à particuliers a augmenté grâce à Dacia. Auprès des entreprises, Renault progresse également. En revanche, nous avons fait le choix de réduire nos ventes, moins rentables, aux loueurs courte durée. Dernier point, les ventes au personnel du groupe (26 000 à fin juin, ndlr) ont baissé car la revente des VO récents est plus difficile aujourd'hui.
JA. Comment voyez-vous la fin de l'année ?
JC. Nous allons avoir le même niveau de performance à fin décembre qu'aujourd'hui. Mais il y a plusieurs points positifs, comme le succès de Clio. Elle résiste bien, avec un niveau de rabais, très mesuré, un an après son lancement, même moins élevé que sur des véhicules concurrents lancés plus tard qu'elle. Cela correspond d'ailleurs à notre nouvelle politique commerciale. Le Scénic Phase 2 démarre très bien ainsi que les Trafic et Master, dans la gamme utilitaires. Puis, à partir de la fin de l'année, nous aurons le break Logan présenté ici. Il est extrêmement compétitif en prix.
JA. Que représentera la gamme Logan en 2007 ?
JC. Nous allons faire 20 000 berlines sur l'année, cela fait 1 % de part de marché. Avec le break, nous allons tenter d'éviter la cannibalisation avec la berline. Nous souhaitons créer une vraie valeur ajoutée, que 1+1 fasse effectivement 2. Mais nous pouvons nous attendre à un mix de break élevé car un break 5 portes à partir de 8 800 euros c'est sans équivalent sur le marché !
JA. Pas de bouleversements en vue dans le réseau Dacia ?
JC. Nous restons toujours très pragmatiques. Dacia avec deux véhicules, bientôt trois, ne justifie pas des showrooms séparés. Ce serait trop coûteux pour le réseau. L'idée de base est d'avoir de vrais corners, bien séparés, mais qui reste dans le showroom Renault. Si un concessionnaire veut un nouveau hall d'exposition rien ne l'empêche de le faire mais Dacia ne doit pas être une source d'inflation des dépenses pour le réseau.
JA. Le niveau de promotion vous inquiète-t-il ?
JC. Le marché français est irrationnel en ce moment. Il y a des opérations de promotion qui me paraissent extraordinairement agressives. Je ne sais pas comment les constructeurs qui les mettent en place s'y retrouvent financièrement. Par exemple, un concurrent vient de lancer une nouvelle gamme de fourgon en faisant pratiquement cadeau du quart du prix ! Une telle politique est destructrice de valeur et soutient le marché artificiellement. Alors nous essayons de lutter contre ça. Nous allons rapprocher le prix affiché du prix de transaction. Cela va changer beaucoup de chose.
JA. Mais, si vous êtes seul à agir, votre politique a peu de chance de faire inverser la tendance…
JC. Nous essayons d'avoir un mix de ventes par modèle et par canal qui tienne compte de cette contrainte. Des offensives très ciblées sur des reprises de parc Renault, nous gênent temporairement mais à long terme notre position est claire : nous essayons de limiter les rabais, de faire en sorte que les gens comprennent la valeur des prestations du produit et les payent à leur prix. Notre priorité est la profitabilité du groupe.
JA. Et celle du réseau ?
JC. La rentabilité du réseau cette année sera légèrement inférieure à celle de 2005 mais se compare avantageusement à celle d'autres réseaux généralistes. Nous avons accompagné notre réseau en compensant assez largement une partie de la hausse du coût de négociation. Mais notre travail porte surtout sur la préparation de l'année 2007. En plus de la qualité en usine, nous travaillons sur la qualité des services avec le plan Excellence Renault. Notre but est d'obtenir un maximum de clients "tout à fait satisfaits" quand ils achètent un véhicule ou lorsqu'ils viennent à l'atelier. Ce niveau augmente. Concernant les produits, nous sommes passés d'une voiture pour tous à une voiture pour chacun, donc les niches se développent, le marché se segmente et se sous-segmente. Renault, avec les 26 nouveaux modèles du Contrat Renault 2009, sera présent sur l'ensemble de ces niches. Evidemment pour le commerce c'est une très belle perspective qui va s'ouvrir dès mi-2007. Mais cette augmentation des gammes nous pousse également à remettre en cause la façon de les exposer car nous n'allons pas demander de doubler les showrooms. De même, la manière de lancer ces nouveautés va évoluer car avec huit lancements par an, soit une voiture tous les mois et demi, nous ne pourrons plus procéder comme avant. Toutes les politiques de publicité, mais aussi le marketing et le commerce vont évoluer afin d'être opérationnelles avec l'arrivée de la nouvelle Twingo.
JA. Le bio-éthanol est sur toutes les lèvres, qu'en pense Renault ?
JC. Nous sommes favorables à l'éthanol comme à tout ce qui va vers la défense de l'environnement. D'ailleurs, vous n'êtes pas sans savoir que la gamme Renault est la plus économe en consommation et en émission de CO2 par km. Le timing de la décision gouvernementale nous paraît bon. Dès ce printemps, nous lancerons la Mégane E85 puis ensuite sur le reste de la gamme. La vraie question est la vitesse d'installation des pompes. Elles conditionnent le succès de l'éthanol.
Propos recueillis par
Christophe Jaussaud
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