Constructeurs : La valse des usines
...à Saint-Pétersbourg et Ford aurait un projet de 9,2 milliards de dollars au Mexique.
La production industrielle française ne décolle pas. Le gros point noir ? L'automobile. Pour Jean-François Loué, de l'Insee, "les constructeurs ont réorganisé leur production en fabriquant davantage dans les pays où les coûts sont plus faibles." La production a plongé de 10,4 % en avril 2006 par rapport au même mois de l'année précédente et se trouve ainsi "à ses plus bas niveaux depuis la récession de 1993-1994", commente Alexandre Bourgeois, économiste chez Natexis Banques Populaires. Mais au-delà de la France, ce raisonnement peut être applicable au reste de la planète. Le déplacement de l'industrie automobile est en train de s'accélérer. Il y a quelques semaines, PSA annonçait la fermeture prochaine du site de Ryton en Grande-Bretagne. L'une des raisons invoquées : des coûts trop élevés par rapport aux autres usines du groupe. Une 206 y était 400 € plus chère à produire. Cependant, le groupe français poursuit sa croissance mondiale et de nouvelles usines sont aux programmes. Après la Slovaquie et la République Tchèque (avec Toyota), PSA va augmenter ses capacités en Chine avec l'implantation d'une deuxième usine. Il faut rester compétitif. Et les exemples ne manquent pas. Le cas Volkswagen devrait également rebondir dans les prochains jours. La suppression de 20 000 emplois devrait entraîner la fermeture totale ou partielle d'usines en Europe de l'Ouest. Il se murmure également qu'Opel pourrait en cas "de scénario catastrophe", fermer trois des neuf usines que le constructeur compte en Europe. En effet, Carl-Peter Forster, patron de GM Europe, a évoqué cette éventualité dans les colonnes d'Automotive News Europe. Les sites d'Azambuja au Portugal et d'Ellesmere Port en Grande-Bretagne seraient déjà dans le collimateur. D'ailleurs, cette usine anglaise, qui produit des Astra, vient de voir sa troisième équipe (900 personnes) supprimée. "La méthode la plus efficace, selon Carl-Peter Forster, pour réduire la voilure en Europe de l'Ouest afin de faire face aux coûts élevés de production."
Ford pourrait créer 150 000 emplois… au Mexique !
Et c'est encore pire aux Etats-Unis où GM et Ford ont annoncé la suppression de 30 000 emplois chacun, s'accompagnant logiquement de la fermeture (sur 4 à 5 années) d'une dizaine d'usines chez GM et d'une quinzaine chez Ford. Cependant, Ford a effectivement annoncé cette volonté de moderniser ses installations au Mexique sans toutefois confirmer l'investissement de 9,2 milliards de dollars qui a circulé ces derniers jours. Selon un document interne que l'AFP s'est procuré, cet investissement au Mexique permettrait à Ford de récupérer la moitié de la production qu'il va supprimer aux Etats-Unis et au Canada d'ici à 2012. Une aubaine pour le Mexique qui verrait ainsi 150 000 embauchés par Ford soit 15 % de chômeurs en moins ! Le montant annoncé représenterait 7 à 8 % de l'investissement annuel étranger dans ce pays et générerait quelque 18 milliards de dollars d'exportation. En outre, le document interne précise que "Ford quadruplerait ses achats de pièces détachées fabriquées au Mexique, dégageant pour les équipementiers une capacité d'investissement relevée de 3,6 milliards de dollars." Rappelons que le Mexique fait partie de l'Alena (l'association de libre échange nord américain) et qu'en vertu de cet accord les produits, fabriqués au Mexique, en direction des Etats-Unis et du Canada ne sont pas taxés. Rien n'est encore officiel et le syndicat UAW veille.
Du dynamisme à l'Est de l'Oural
GM, quant à lui, vient de poser la première pierre d'une nouvelle usine à Saint-Pétersbourg en Russie où il devrait investir 115 millions de dollars. Rien de comparable avec Ford, mais les investissements se poursuivent. Rick Wagoner, le président de GM, a signé avec le président russe, Vladimir Poutine, l'accord donnant corps à la nouvelle usine de Shushary dans la région de Saint-Pétersbourg. Ce nouveau site est le troisième site d'assemblage de GM en Russie. Grâce à sa production de 25 000 unités par an, le constructeur américain dispose dans le pays d'une capacité annuelle de 100 000 unités. La production du Captiva, entre autres, débutera en 2008. Et il faut dire que la Russie est à la mode en ce moment ! En effet, Nissan a confirmé, il y a quelques jours, la construction d'une usine de montage à Saint-Pétersbourg également. Carlos Ghosn, président de Renault et Nissan, a en effet signé un accord avec Guerman Gref, ministre du Développement Economique et du Commerce de la Fédération de Russie, sous l'œil de Valentina Matvienko, le gouverneur de la ville de Saint-Pétersbourg. L'investissement se monte ici à 200 millions de dollars et les premières voitures (50 000 par an), produites par 750 salariés, quitteront la chaîne en 2009. "Par la signature de cet accord, Nissan s'engage à contribuer de manière significative au développement du marché automobile russe", a indiqué Carlos Ghosn. Depuis la création de Nissan Motor Rus (NMR) en 2003, la marque nippone qui s'appuie sur une trentaine de concessionnaires a vu ses ventes passer de 9 470 unités à 46 485 unités en 2005. Le couple Nissan-Russie fonctionne déjà bien. Tellement bien, que la Russie sera le premier pays européen à voir débarquer les Infiniti. En effet, dès l'automne prochain, les clients moscovites pourront acheter un modèle de la marque de luxe de Nissan. FX en tête.
L'industrie automobile est en perpétuel mouvement, à la recherche d'une compétitivité toujours plus grande. Un peu comme les réseaux de distribution des constructeurs et à la vitesse où vont les choses, on pourrait presque faire une rubrique "Usines : elles ouvrent, elles ferment" !
Christophe Jaussaud
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