BMW France condamné
...concessionnaires résiliés dans le cadre du changement de règlement souhaitent se faire renommer en tant que distributeurs et/ou réparateurs agréés. En l'absence de critères quantitatifs pour la sélection des réparateurs, les constructeurs peuvent difficilement refuser d'agréer leurs anciens concessionnaires, sauf à démontrer que, du jour au lendemain, ces derniers ont perdu la capacité technique de réparer leurs véhicules. Ainsi, les quelques procès qui ont eu lieu ont permis à d'anciens concessionnaires de poursuivre une activité de réparateur agréé. Il n'en va pas de même pour la distribution des véhicules neufs. En effet, le nouveau règlement autorise une sélection quantitative des candidats, critère limitatif que les constructeurs utilisent très largement pour faire leur choix. Mais de nombreuses questions restent en suspens quant à ces critères, questions auxquelles seule la jurisprudence peut répondre. Ce que l'on sait déjà, c'est que ces critères doivent être définis précisément. "Un critère vague et incertain n'est pas valable", confirment les avocats Louis et Joseph Vogel. En revanche, le constructeur n'a pas à justifier du bien-fondé de ce critère, comme l'a confirmé la cour d'appel de Dijon le 1er avril dernier (lire JA n° 872/873). La cour était allée plus loin, en autorisant le constructeur à refuser une candidature sur une zone de chalandise pour la simple raison qu'un candidat, "qui remplissait toutes les garanties pour remplir les critères qualitatifs à la date prévue", avait déjà été sélectionné. Une manière de reconnaître aux constructeurs le droit à l'intuitu personae lorsque deux candidatures s'opposent.
Des critères objectifs ou légitimes
Un nouvel arrêt, rendu par la cour d'appel de Douai, en date du 15 avril dernier, confirme ce droit à l'intuitu personae, mais condamne néanmoins le constructeur à dédommager son concessionnaire exclu. Un ancien concessionnaire BMW dépose sa candidature le 16 juin 2003, pour être distributeur BMW dans le Pas-de-Calais. La cour relève tout d'abord qu'il n'est pas démontré que le concessionnaire ne respecte pas les critères qualitatifs pour la distribution des VN. Quant aux critères quantitatifs, "BMW n'en fournit pas, constate Pierre Urion, du cabinet Bertin, comme c'est fréquemment le cas de la part des constructeurs". La cour constate simplement que les deux parties sont d'accord pour dire que "le secteur d'Arras ne permet pas à deux distributeurs agréés de dégager une rentabilité suffisante". Or, justement, BMW a déjà sélectionné un autre distributeur, lettre de confirmation en date du 10 juin à l'appui : "Nous vous confirmons que nous envisageons de vous proposer la distribution des produits BMW et Mini à partir de ce site d'Arras sous réserve que votre société soit en conformité avec les standards de vente qui vous seront communiqués dans les meilleurs délais et dont une version provisoire vous a été remise lors de notre réunion du 2 mai." C'est insuffisant pour estimer que la candidature a été acceptée, estime la cour qui souligne que, le 15 janvier 2004, les travaux pour la construction de ce site n'ont pas débuté. Dans ce cas, fallait-il nommer le premier des deux candidats qui remplissait les critères ? Non, répond la cour : "L'organisation d'un réseau déterminée par des critères quantitatifs conduit nécessairement le constructeur à faire un choix entre plusieurs candidats répondant aux conditions qualitatives qu'il a fixées ; ce choix ne peut être uniquement guidé par des éléments chronologiques." La cour va beaucoup plus loin en expliquant que le système de distribution n'interdit pas à BMW "de choisir le contractant qui lui apparaît le plus sûr, ni extrait des contrats tout intuitu personae". Le constructeur a même la faculté "de ne pas affecter momentanément un distributeur à un secteur (...) dès lors que cette absence temporaire ne trahit pas sa volonté de s'exonérer du respect de tout critère objectif de sélection ". Or, en n'adressant pas au premier concessionnaire les courriers d'information sur le nouveau contrat de distribution, "alors qu'il n'apparaissait pas le moins bien placé dans les évaluations produites par le constructeur", et en refusant d'examiner sa candidature sous le seul prétexte qu'un autre candidat avait été choisi, BMW a agi de manière fautive : l'ancien concessionnaire "a été victime d'une discrimination et d'un rejet de sa candidature non fondé sur des critères objectifs ou légitimes", conclut la cour avant de condamner BMW à lui verser 650 000 euros de dédommagements, soit un an de marge brute.
Xavier Champagne
ZOOMBMW sur Arras Dans le cadre de la constitution de son réseau de distributeurs agréés, BMW France a confié sa représentation à Luc Guidez sur Arras et Cambrai (ouverture en juin). Luc Guidez est un important concessionnaire Peugeot qui distribue 2 630 VN à travers trois sites : Arras, Cambrai et Caudry. |
3 questions àService juridique de BMW France JA Quelles conclusions tirez-vous de cet arrêt ? JA BMW a néanmoins été condamné à verser des dommages et intérêts à son ancien concessionnaire ? JA La cour d'appel ne semble pas gênée par l'absence de critères quantitatifs définis par BMW France. Pourquoi ? |
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