Alain Visser : "Lynk&Co peut se passer d’un réseau de distribution"
La marque chinoise Lynk&Co, propriété de Geely Auto (50 %), Geely Holding (20 %) et Volvo Cars (30 %) a débarqué en Europe, à Amsterdam en octobre 2020. Sa particularité : vendre à un abonnement à l’automobile, comme Netflix le propose pour l’industrie cinématographique. Son président, Alain Visser, ancien vice-président de Volvo Cars en charge du marketing des ventes et du service client, a démarré sa carrière automobile chez Ford. Autant dire que notre homme connaît tous les rouages de l’industrie auto.
JA : En octobre 2020, le premier Club européen de Lynk&Co a ouvert ses portes à Amsterdam aux Pays-Bas. Quel est votre plan d’implantation de la marque en Europe ?
Alain Visser : Le plan n’a pas changé malgré la pandémie de coronavirus. Heureusement, nous sommes une marque digitale et l’effet coronavirus est plutôt limité. Notre présence physique est beaucoup plus réduite qu’une marque automobile normale. Nous prévoyons une quinzaine de clubs en Europe. Le prochain ouvrira à Göteborg, en Suède, la ville où nous sommes implantés, puis Berlin dont l’inauguration est prévue mi-2021 et Paris pour la seconde moitié de 2021. L’année prochaine, nous prévoyons d’ouvrir 6 clubs à Göteborg, Berlin, Paris, Barcelone, Milan et Anvers.
JA : Votre offre produit se limite à un seul véhicule pour l’Europe, Lynk&Co 01 : un SUV hybride rechargeable. Sur quelle plateforme est conçu ce modèle et où est-il produit ?
A.V. : Le design véhicule tout comme son ingénierie ont été réalisé en Suède dans le centre, chez CEVT (China Euro Vehicle Technology) qui un centre d’ingénierie basé en Suède, partagé entre Volvo et Geely. La plateforme, qui s’appelle CM1, est la base de la Volvo XC40 aussi bien que de la Polestar 2. La production se déroule en Chine, dans l’usine Yuyao dédiée à Lynk&Co, dans la ville de Ningbo. Pour l’instant, seul ce modèle est assemblé là-bas.
JA : Quel est l’accès au véhicule en Europe ?
A.V. : Nous avons deux concepts : le principal pour l’Europe est celui qui, contre un abonnement mensuel de 500 euros permet de devenir membre d’un club. C’est un abonnement identique dans tous les pays qui permet de rouler dans un SUV PHEV, et qui inclut la voiture, l’assurance, les services, ainsi que l’accès, en tant que membre d’une communauté, à de nombreux évènements qui peuvent être des festivals de musique, des concerts, des ouvertures de nouveaux bars, des fashion shop… Devenir membre revient à obtenir plus qu’une voiture et plus qu’un accès à la mobilité mais une expérience. Bien sûr, vous pourrez aussi acheter la voiture. En France, son prix sera de 41 500 euros, car nous n’avons pas d’option. Tout est inclus.
JA : Est-il exact de dire que votre business modèle est plus proche d’un loueur que d’un constructeur ?
A.V. : Oui sans doute, il faut bien se rendre compte que cette industrie est incroyablement absurde car sa rentabilité repose essentiellement sur le service. Toutes les marques automobiles essaient par tous les moyens de vous garder au sein de leurs concessions. Chez nous c’est totalement le contraire puisque le service est inclus dans l’abonnement de 500 euros. Chaque fois que votre voiture devra être gérée en après-vente, cela viendra grever notre rentabilité. C’est donc dans notre ADN d’avoir un service de très haute qualité car nous n’avons pas l’intention de vous voir trop souvent pour l’après-vente. Pour autant que je sache, nous sommes les seuls à proposer cette approche.
JA : Dans deux ans entrera en vigueur un nouveau règlement européen qui va régir les relations entre les constructeurs et leurs réseaux. Pouvez-vous réellement vous passer d’un réseau de distribution ?
A.V. : C’est une question très sensible mais oui je pense que la marque va réussir à se passer d’un réseau de distribution. Rendez-vous compte : si la marge moyenne en Europe est de 15 % et que toutes les marques automobiles dépensent encore plus d’argent pour pousser leurs ventes, il est clair que le système de la distribution est extrêmement cher. D’un point de vue presque philosophique, c’est même absurde que tous les secteurs industriels se battent pour une chose : obtenir un contact direct avec le client pour 2 raisons. D’une part, c’est là où la relation avec la marque se noue et enfin où la marge s’établit. Dans l’industrie automobile, tout est internalisé : le design, l’ingénierie, la production… La seule chose qui ne dépend pas directement du constructeur, c’est le contact avec le client. C’est complétement absurde.
Retrouvez l'intégralité de l'entretien avec Alain Visser dans le numéro du Journal de l'Automoble N°1291, daté de décembre 2020 et réservé à nos abonnés.
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