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Constructeurs

Akio Toyoda, élu Homme de l'Année 2024

Publié le 31 janvier 2025

Par Nabil Bourassi
5 min de lecture
Alors qu’une tempête s’abat sur le secteur automobile, le groupe Toyota tire son épingle du jeu et creuse l’écart avec ses concurrents en confortant sa place de numéro un mondial. Ce succès doit beaucoup à Akio Toyoda, aujourd'hui président du conseil d’administration. Les membres du jury de l'Homme de l'Année, prix organisé par Le Journal de l'Automobile, l'ont élu Homme de l'Année 2024.
Akio Toyoda est élu Homme de l'Année 2024.
Akio Toyoda est élu Homme de l'Année 2024. ©Toyota

L'exercice 2025 du concours de l'Homme de l'Année n'a pas été une sinécure. Il faut dire que l'ambiance morose du secteur automobile a jeté le jury dans l'expectative : marché en berne, groupe Stellantis décapité, incertitudes sur les normes CAFE…

 

Dans ce paysage apocalyptique néanmoins, un groupe se dégage avec des résultats à contre-courant. Le groupe Toyota survole superbement les turpitudes du secteur et affiche des performances commerciales et financières qui frisent l'insolence.

 

En Europe, le japonais a enregistré la plus forte croissance des marques généralistes avec une hausse de 12 % de ses immatriculations, avec 828 000 unités. Sur un marché quasi stable, cette performance s'est traduite par des gains de parts de marché qui permettent à Toyota de peser plus de 7 % du marché européen. C'est plus que Peugeot et ses 4,9 %.

 

 

Cette forme olympique se ressent au niveau mondial, puisque Toyota a surperformé un marché américain pourtant déjà très dynamique. Avec 2,32 millions de voitures vendues aux États-Unis, le groupe a progressé de 3,7 % sur un marché en hausse de 2,7 %.

 

C'est d'autant plus remarquable que partout, Toyota affiche une croissance encore plus marquée de ses gammes électrifiées essentiellement du full hybrid, déjouant tous les pronostics de marché, mais également en se passant des faveurs des pouvoirs publics qui ont privilégié le 100 % électrique.

 

La stratégie muti-énergie d'Akio Toyoda

 

Ce succès extraordinaire est à mettre au crédit d'Akio Toyoda, le patron historique aux manettes depuis 2009. Le petit-fils du fondateur de la marque est arrivé au pire moment pour le groupe. Le marché automobile mondial venait de plonger dans les limbes de la crise des subprimes, et Toyota affrontait l'année suivante l'ouragan du scandale des défauts de freins aux États-Unis.

 

Akio Toyoda a pris conscience du danger d'une culture industrielle fondée sur l'obsession du podium mondial. Il surprend alors le monde de l'automobile en décrétant que désormais, Toyota ne faisait plus de sa place de numéro un mondial l'objectif principal et inconditionnel de l'entreprise. Selon lui, cette culture d'entreprise menait droit à la catastrophe. La nouvelle priorité était de concevoir de bons produits à la qualité irréprochable. Une révolution !

 

Mais cette philosophie a rendu Toyota encore plus exigeant sur ses programmes d'innovations et de compétitivité. Akio Toyoda a également inauguré une nouvelle ère de l'identité de marque avec un design audacieux et futuriste qui a également laissé les observateurs et les concurrents pantois.

 

Le succès des véhicules comme le C-HR a vidé de leur substance les arguments sur le risque de clivage de la gamme Toyota. D'ailleurs, la marque a persisté avec de nouvelles silhouettes très transgressives, notamment avec le bZ4X.

 

Ce succès est d'autant plus remarquable que le groupe Toyota travaille essentiellement avec deux marques : Toyota et le premium avec Lexus. Un modèle d'entreprise très éloigné d'un groupe Volkswagen ou d'un Stellantis qui ont ultrasegmenté leur gamme avec plus de dix marques chacune.

 

Un bilan impressionnant

 

L'autre leçon du règne d'Akio Toyoda, c'est cette profonde conviction que la voiture électrique à batterie n'était pas l'avenir. Le champion du monde des full hybrid a préféré miser sur la pile à combustible qui est, selon lui, le successeur le plus crédible au thermique.

 

Avec la Miraï, Toyota est un fervent défenseur de la propulsion à hydrogène mais pour l'heure, ce marché n'a pas décollé. Et Toyota a fini par se ranger à la réalité du marché en apportant des solutions électriques à batteries avec le bZ4X. Il a également promis d'être l'un des premiers à apporter un modèle équipé de batteries solides.

 

 

Le bilan d'Akio Toyoda reste néanmoins impressionnant. Il a su construire un groupe résilient face à de multiples crises. Ainsi, Toyota est sorti indemne du terrible tsunami qui a déferlé sur les côtes japonaises en 2011, provoquant au passage la catastrophe de Fukushima, et qui a stoppé une partie de la production.

 

Il a creusé l'écart avec Volkswagen jusqu'à battre des records absolus, comme en 2023 lorsque le groupe a annoncé onze millions de voitures vendues, soit deux millions de voitures de plus qu’à son arrivée. Au même moment, le groupe allemand reculait inexorablement de dix à neuf millions de voitures annuelles. Toyota est aujourd'hui la première capitalisation de la place de Tokyo.

 

À 66 ans, Akio Toyoda a dû laisser progressivement la main du groupe à son bras droit et patron de Lexus, Koji Sato, devenu en 2023, patron exécutif. L'héritier du fondateur reste néanmoins le président du conseil d'administration. Un patron un peu trop présent, au goût de certains actionnaires, notamment des fonds étrangers, qui estiment que le conseil a été verrouillé par Akio Toyoda.

 

En 2024, une fronde s'est organisée contre lui et contre Koji Sato, considéré comme une continuité stratégique. Ceux-ci voulaient pousser le constructeur à accélérer sa transition sur le 100 % électrique. Ils reprochent aussi à la direction d'avoir laissé des ingénieurs falsifier des tests de certifications de leurs véhicules. Ce scandale a ébranlé l'ensemble des constructeurs japonais.

 

Leurs manœuvres de déstabilisation de la direction ont été déjouées. Akio Toyoda conserve une puissante aura au sein du groupe et de la direction. Outre son bilan, il a attiré la sympathie de l'ensemble du personnel en modérant ses émoluments. Le patron du plus grand groupe automobile mondial percevait "seulement" trois millions de dollars par an. Une leçon de plus pour ses alter ego occidentaux…

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