Jean-Marc Gales, directeur général des marques Peugeot et Citroën.
Journal de l'Automobile. En guise de préambule, pouvez-nous expliquer la genèse de la nouvelle organisation du groupe et par extension, les objectifs qu'elle va poursuivre ?
Jean-Marc Gales. La genèse réside dans un paradoxe voulant qu'il faut parfois rassembler pour mieux différencier. Jusqu'à présent, les deux marques se sont concurrencées sur presque tous les segments. S'il ne s'agit pas de réserver des segments pour chaque marque, nous voulons cependant définir des territoires de marque plus dédiés et précis. Nous visons une différenciation de marques, de produits et de couverture géographique. Par exemple, avec C4 Picasso et 5008, vous avez deux produits très distincts. Dans une optique similaire, il serait difficile d'envisager la RCZ chez Citroën et la DS3 chez Peugeot. En revanche, entendons-nous bien, sur les nouvelles technologies, électriques ou hybrides, les deux marques sont sur un pied d'égalité et nous venons d'ailleurs de valider le lancement d'une Citroën électrique en même temps que la iOn. Même chose pour la sécurité.
JA. Cette nouvelle organisation est-elle aujourd'hui pleinement opérationnelle ?
J-MG. Nous y sommes presque. Auparavant, il convenait de renforcer chaque marque et chaque métier dans les marques, d'où la nomination de responsables VO, réseau, ventes sociétés etc. Ce chantier est abouti à 90 %, tandis que la constitution des équipes centrales est aussi très avancée, de l'ordre de 80 %. A la fin de l'année le dossier sera clos.
JA. Du point de vue des synergies, jusqu'où comptez-vous aller, sachant que le potentiel est important sur ce que le client ne voit pas ?
J-MG. C'est effectivement dans cette direction que nous allons. Ainsi, nous ne faisons qu'une fois les études de marché et cela peut s'appliquer à certains produits et services. Par ailleurs, dans le réseau propre, de nombreuses avancées sont à réaliser, notamment sur des centres de profit liés à la carrosserie ou à la mécanique lourde où nous avons des taux d'utilisation très bas… Mais les points de ventes et les forces de ventes resteront clairement séparés, bien entendu.
JA. Sur le volet de l'internationalisation, quelles priorités pour quelle marque et quels arbitrages sont à venir ?
J-MG. Il y en aura naturellement, mais ce ne sera pas non plus systématique. Ainsi, en Chine, en Amérique du Sud et au Brésil en particulier, notre présence se développera par le biais des deux marques. En Chine, nous sommes à 3,7 % et en Amérique du Sud à 5 %. Sachant que notre objectif est de 8 % en 2015, nous avons besoin de nos deux atouts. En Inde, nous sommes encore au stade de l'étude projet et nous n'avons pas encore arbitré entre les deux marques, mais il se peut qu'il n'y ait qu'un élu. Par contre, en Russie, nous voulions axer notre stratégie sur une marque, mais nous resterons finalement avec les deux, car elles sont bien positionnées.
JA. En évoquant la Russie, on pense forcément à la crise : quel scénario de reprise retenez-vous en ce moment ?
J-MG. Nous sommes prudents. Cette année, le marché devrait s'établir à 15,5 millions de véhicules. Pour 2010, nous estimons plutôt un marché compris entre 14 et 14,2 millions d'unités, car il faut prendre en compte la variable de l'Allemagne qui va perdre un million d'immatriculations avec la fin du programme d'aide gouvernemental. S'il est difficile de dater précisément la reprise, nous savons qu'elle s'amorcera par le biais des VUL et du marché "Sociétés" et notre nouvelle organisation est aussi conçue pour mieux exploiter ces marchés.
JA. Dans ce contexte, quels sont vos objectifs de parts de marché en Europe ?
J-MG. Au 1er semestre, nous affichons 13,6 % et nous visons 14 % sur le second semestre. Dès 2010, il s'agira d'aller au-delà des 14 %.
JA. L'intrusion du politique dans l'économie s'est renforcée avec la crise : quelles incidences cela a-t-il pour vous ?
J-MG. Il faut bien comprendre que l'automobile représente un nombre considérable d'emplois. En cas de crise et de risques majeurs, il n'est donc pas illogique qu'il y ait des interférences entre la sphère politique et cette industrie. L'intervention des différents gouvernements était nécessaire, mais il va de soi que cela ne peut pas se prolonger indéfiniment.
JA. Vous qui connaissez bien l'Allemagne, que pensez-vous de l'épisode Magna-Opel ?
J-MG. Je n'ai pas à commenter ce dossier, mais disons que ce n'est qu'un début et qu'il se passera sans doute encore beaucoup de choses après les élections. D'autant que les clients européens de Magna risquent de se fâcher un petit peu, certains commencent déjà…
JA. Pour conclure, vous présentez des véhicules électriques sur le Salon : quelles sont vos ambitions dans ce domaine, sachant que le risque de la promesse déçue vis-à-vis du client n'est pas nul ?
J-MG. Notre stratégie s'appuie sur trois axes. Tout d'abord, les solutions thermiques ont encore de l'avenir et représenteront l'essentiel des ventes ces prochaines années. Nous allons par exemple introduire le Start&Stop de 2nde génération chez Citroën l'an prochain et chez Peugeot début 2011, pour un gain de 5 à 8 g de CO2 selon les carrosseries. Par ailleurs, au chapitre de l'hybridation, nous sommes bien positionnés sur l'hybride diesel, avec une solution modulaire qui assure un gain de 35 % d'émissions et de consommation. C'est l'avenir pour les modèles haut de gamme. Enfin, nous disposons donc de la solution électrique avec iOn qui sera lancée en 2010. Nous travaillons actuellement sur le pricing et sur une offre de leasing complet. De surcroît, nous menons l'étude de faisabilité de la commercialisation de la BB1. Honnêtement, j'aimerais que ce projet aboutisse.
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