Tracauto, la petite plateforme qui monte

L’initiative Tracauto, plateforme de traçabilité des VHU, est née du parcours professionnel de son fondateur, Nicolas Brec, qui, après des études universitaires en biologie, a intégré l’école des métiers de l’environnement à Rennes (35). Après un passage chez PSA, à la gestion des VHU, vers la fin des années 90, il entre chez CFF Recycling (devenu Derichebourg), où il passera plusieurs années à la collecte et la logistique des déchets de garage.

Plus récemment, la directive européenne et sa transposition en droit français font naître le besoin d’indicateurs de performance chez les démolisseurs et les broyeurs pour satisfaire aux objectifs. Nicolas Brec tente sa chance…

Lente mise en place

Le chantier est vaste. Depuis des lustres, chacun a optimisé son métier, pour mieux démonter, c’est-à-dire plus vite, et surtout ne démonter que les composants intéressants pour la revente. Quant aux broyeurs, ils ont pris l’habitude de broyer les carcasses venant des démolisseurs, se contentant de récupérer les fractions métalliques commercialisables et laissant le reste pour la mise en décharge ou l’enfouissement. Or, le décret de février 2011 change la donne et vient structurer la filière en rééquilibrant les responsabilités des deux parties. La réglementation impose ainsi aux démolisseurs et broyeurs de mieux communiquer ensemble dans le cadre du suivi de la performance voulu par l’Europe.

Fort de son expérience et du constat que la France va peiner à remplir les objectifs, Nicolas Brec choisit de monter son propre projet. Il prendra la forme d’un site Internet baptisé “Tracauto”, qui constituera une plateforme de traçabilité des VHU rassemblant les remontées d’activité des centres VHU et des broyeurs, afin de proposer un suivi fiable du taux de recyclage des VHU pour les constructeurs. Bien entendu, le système s’adresse alors avant tout aux importateurs, puisque les marques françaises disposent déjà de modes de fonctionnement organisés par le biais de structures telles qu’Indra (filiale de Renault), Valorauto (groupe Galloo), Eco VHU (groupe Derichebourg). Tracauto devient alors une aubaine pour certains constructeurs, notamment Volkswagen en tête, qui utilisera d’ailleurs les recommandations de Nicolas Brec dans le choix des meilleurs partenaires démolisseurs et broyeurs pour la constitution de son réseau de centres VHU agréés.

Comment ça marche ?

Jusqu’à l’avènement de Tracauto, aucun outil informatique ne permettait de suivre les performances de la filière, à part les chiffres annuels de l’Ademe, prenant en compte la performance globale du pays. “C’est un peu comme si l’on imposait de rouler à 130 km/h, sans compteur. Impensable”, note Nicolas Brec. La problématique consiste donc à proposer un compteur permettant à chacun des acteurs de se positionner clairement. En cumulant les données remontées par les démolisseurs et les broyeurs, l’outil informatique parvient à constituer une mesure fiable de la performance individuelle ou globale. Par la suite, l’ensemble de ces données, à fin mars de chaque année, prend la forme d’un rapport remis au constructeur adhérent, qui indique la performance globale de son réseau de recyclage agréé et si, oui ou non, l’atteinte des objectifs de 85 % est avérée. Rappelons que ce pourcentage se répartit à 5 % d’obligation pour le démolisseur et 6 % pour le broyeur. Les 74 % restants concernent les métaux et n’entrent donc pas dans le calcul, puisqu’ils font l’objet, depuis toujours, d’un traitement clair en recyclage.

Très concrètement, un centre VHU adhérent Tracauto visualise sur le site, en temps réel, son niveau de performance et l’atteinte des 5 % requis pour son activité, mais peut aussi l’associer avec celle de son broyeur référant, afin de visualiser la performance globale et ce, pour chacune des marques pour laquelle il est agréé. Ce qui signifie qu’il est facile, pour un centre VHU, de choisir le meilleur partenaire broyeur pour que le “couple” atteigne les meilleurs résultats.

Un modèle unique

Le principal intérêt de Tracauto, c’est son indépendance. N’appartenant à aucun acteur de la filière (constructeur, démolisseur, broyeur), Nicolas Brec s’offre une liberté intellectuelle et d’action pour mieux appréhender les points bloquants, les partager et développer des outils permettant de les lever. Lors de la constitution des réseaux pour les marques du groupe Volkswagen, ainsi que Mercedes, Porsche et prochainement BMW, Nicolas Brec a sélectionné les 340 meilleurs professionnels en fonction de leurs performances déclarées sur Tracauto, et leur a fait signer des contrats directement avec les marques, ce qui constitue une particularité notable. De nombreuses marques ont en effet, par simplicité, choisi de confier l’ensemble de la gestion des VHU à des acteurs globaux, qui se chargent eux-mêmes d’afficher un large réseau de centres VHU. Mais, dans ce cas, le lien entre la marque et son réseau n’existe pas, le contrat étant signé entre un démolisseur et un acteur intermédiaire.

Tracauto met aussi à la disposition de ses partenaires un outil baptisé “marché matières”, qui permet d’accéder au prix de vente moyen des matières des démolisseurs aux broyeurs selon les secteurs géographiques. C’est une première en France et c’est très important pour un centre VHU, qui peut ainsi vérifier la cohérence des achats de son broyeur avec la moyenne sur sa région. Si un décalage est ressenti, Tracauto se propose même de jouer les négociants et de chercher une offre d’achat concurrente plus avantageuse. Comme le souligne Nicolas Brec, il s’agit, avant tout, de générer de la concurrence, sur la base de la performance.

Quant au modèle économique, ce sont les constructeurs qui financent Tracauto, mais l’entreprise se rémunère également en pratiquant des activités de gestion distribution, c’est-à-dire en jouant les intermédiaires entre les réseaux de constructeurs et les centres VHU, pour l’approvisionnement des véhicules en fin de vie. Ainsi, un centre VHU peut consulter sur le site le flux des véhicules à retirer dans le réseau d’une marque ainsi que leurs prix.