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Bâle III : l’inquiétude monte chez les financières

Publié le 3 décembre 2012

Par Armindo Dias
5 min de lecture
Plusieurs financières ont récemment mis en exergue les problématiques auxquelles elles risquent d’être confrontées avec le volet CRD4 de la réforme prudentielle dite Bâle III. La sonnette d’alarme a été tirée lors du 15e congrès conjoint des fédérations européennes Eurofinas (crédit à la consommation) et Leaseurope (crédit-bail).
Bruno Salmon, président de l’ASF.

Si les choses restent en l’état, plusieurs sociétés de crédit spécialisées vont voir leur production baisser et devront procéder à des réductions d’effectifs. Voilà en résumé le message qu’ont tenu à faire passer un certain nombre de sociétés de crédit spécialisées à l’occasion du 15e congrès conjoint des fédérations européennes Eurofinas (crédit à la consommation) et Leaseurope (crédit-bail). Nombre d’établissements risquent en effet d’être déstabilisés par le volet CRD4 de la réforme prudentielle dite Bâle III si rien ne bouge d’ici au 1er janvier 2013 (il s’agit de la date prévue d’entrée en vigueur de cette réforme, mais elle pourrait être reportée au 1er juillet 2013 ou au 1er janvier 2014) : toutes les sociétés de financement sans exception devront respecter à cette date les niveaux de fonds propres et les ratios de liquidités prévus dans la réforme, qu’elles collectent ou non des fonds. Autant dire, donc, que celles qui font de la collecte seront avantagées, la collecte de fonds permettant de respecter plus aisément les niveaux de fonds propres et ratios de liquidité du volet CRD4*.

Des difficultés pour certains établissements

Les autres établissements devraient connaître quant à eux des difficultés à se financer sur les marchés, trois catégories d’acteurs étant aujourd’hui particulièrement exposées dans l’Hexagone : les sociétés d’affacturage, les établissements spécialisés dans le crédit-bail et les captives de constructeurs. “Les experts de Bâle ont voulu toucher les excès de la finance internationale, mais ils ont indirectement englobé les services financiers spécialisés qui n’ont rien à voir avec la crise”, relève Bruno Salmon, président de l’ASF, par ailleurs président de BNP Paribas Personal Finance. Et autant dire que ces établissements n’avaient pas vraiment besoin de cela : le cabinet Athling vient d’estimer à 260 millions d’euros le coût de mise en œuvre de la loi Lagarde pour les établissements de crédit et a évalué leur manque à gagner en Produit Bancaire – PNB – à 1,5 milliard d’euros sur la période 2011-2014. La crise restant en outre très prégnante en Europe.

La crise reste présente

“Nous cherchons encore à nous remettre de la crise 2008-2009”, rappelle à ce titre Didier Hauguel, le directeur des services financiers spécialisés et assurances de la Société Générale. Pour preuve : les nouveaux crédits des adhérents d’Eurofinas ont progressé l’an dernier de seulement 1,2 %, à 323 milliards d’euros, dans 10 pays en Europe après avoir enregistré un recul de 15,7 % en 2009 (311 milliards d’euros), et ceux des adhérents de Leaseurope ont enregistré un gain de 4,6 % dans 18 pays en Europe, à 223 milliards d’euros, après avoir accusé une chute de 31,8 % en 2009 (204 milliards d’euros)**. “Nous nous attachons à diversifier nos fonds, et nous sommes plus prudents et plus sélectifs quant à l’usage de nos ressources depuis 2008-2009”, poursuit Didier Hauguel. Le responsable estime également que la réforme prudentielle en passe d’entrée en vigueur impactera toutes les sociétés de financement en matière de liquidités. “Il faudrait néanmoins instaurer des règles adaptées à nos différents métiers”, relève le directeur des services financiers spécialisés et assurances de la Société Générale. Et cela reste encore envisageable, tout du moins dans l’Hexagone. Plusieurs éléments abordés par la réforme doivent en effet encore être précisés au regard de la législation française.

Des demandes de définitions

“Nous aimerions que des définitions précises des dépôts et des fonds remboursables du public nous soient données par Bruxelles”, souligne ainsi Françoise Palle-Guillabert, déléguée générale de l’Association française des sociétés financières, ou ASF. Les dépôts à terme et les dépôts à vue doivent-ils être considérés comme des fonds remboursables, s’interrogent nombre de professionnels. Ces derniers aimeraient également qu’on leur précise le périmètre de l’expression “fonds remboursables du public” mentionnée dans le volet CRD4. “Certaines entités pourront procéder ou non à des émissions obligataires selon cette définition, et celles qui le pourront seront-elles considérées d’office comme des “crédit institutions” ?”, poursuit la déléguée générale de l’ASF. Les autres ? Elles seront considérées comme des “financial institutions”, l’autre statut prévu dans le volet CRD4 de la réforme Bâle III. Les professionnels français estiment au final que toutes ces modifications entraîneraient un véritable chamboulement dans l’activité des sociétés de crédit spécialisées, un chamboulement qui serait bien évidemment susceptible d’engendrer une baisse importante de production dans le secteur, et donc de nouvelles réductions d’effectifs. Or, plusieurs plans sociaux ont déjà été annoncés ces derniers mois dans des sociétés de financement en France…

*Ce volet distingue en fait deux ratios de liquidité, l’un de court terme, c’est-à-dire inférieur à trente jours, dit “Liquidity Coverage Ratio”, et l’autre de long terme, c’est-à-dire de plus d’un an, dit “Net Stable Funding Ratio”.
**Le financement de véhicules participe à hauteur de 28 % dans les nouveaux crédits d’Eurofinas et de 63 % dans les nouveaux crédits de Leaseurope (particuliers + professionnels et VP + VU).

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ZOOM - Chute de la production VN

D’après les dernières données de l’Association française des Sociétés Financières (ASF), les financements de véhicules particuliers neufs se sont contractés de 6,5 % à 4,3 milliards d’euros sur les neuf premiers mois de 2012 (crédit classique + LOA). L’an dernier à la même époque, ils avaient enregistré une progression de 4,4 %. Les établissements spécialisés n’enregistreront pas pour autant que des productions en recul sur l’exercice en cours. En effet, sur les neuf premiers mois de l’année, ils ont enregistré une hausse de production de 1,7 % à 2,1 milliards d’euros en financements VO.

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